Un mois après l'entrée en application de la loi interdisant l'usage du téléphone cellulaire au volant, le Service de police de la Ville de Montréal a déjà distribué 1697 contraventions, et ce, sans mener d'opérations ciblées.

Les fautifs ont reçu une amende de 80$ à 100$, ainsi que trois points d'inaptitude.

Guy Paquette, directeur du Groupe de recherche sur la sécurité routière de l'Université Laval ne s'étonne pas que plusieurs conducteurs utilisent toujours leur cellulaire. «Il faut toujours une période d'adaptation. Lorsque la loi sur l'obligation de porter la ceinture de sécurité a été implantée, les taux de port ne dépassaient pas les 25% ou 30% au début au Québec.»

Dans les rues du centre-ville, hier, La Presse a constaté que les automobilistes sont effectivement loin d'avoir perdu leurs mauvaises habitudes. En 40 minutes rue Sainte-Catherine, 10 délinquants ont été vus une main sur le volant, l'autre à l'oreille.

C'est le cas de Steve. Au moment de se faire prendre, le livreur de courrier était en pleine conversation avec sa femme. Lorsque La Presse lui a rappelé que son geste était illégal, l'homme a immédiatement reconnu sa culpabilité : «Ah, c'est vrai! J'ai une oreillette, mais je ne pense pas à la mettre», s'est-il exclamé, visiblement mal à l'aise.

Les automobilistes fautifs n'admettent pas tous leur méfait aussi facilement. Shawn, lui, est contre la nouvelle loi. «Je ne crois pas que c'est imprudent de conduire avec mon téléphone. Je suis capable de me concentrer sur la route en autant que je ne parle pas à ma femme», rigole-t-il, peu affecté de s'être fait prendre en flagrant délit. Le conducteur n'a pas l'intention de faire l'achat d'un système mains libres. Les appareils sont trop inconfortables, estime-t-il.

M. Paquette croit que la nouvelle loi «est de la poudre aux yeux et qu'elle ne va rien changer au bilan routier». Selon lui, la concentration des conducteurs diminue avec l'utilisation du dispositif mains libres.

M. Paquette s'offusque lorsque certains automobilistes comparent une discussion avec un passager avec celle qu'on peut avoir avec un dispositif mains libres. « Quand on conduit avec un passager, lui-même peut servir de copilote. Il va ralentir son débit verbal en fonction des conditions de circulation. Alors que lorsqu'on est au cellulaire, notre interlocuteur n'a aucune idée dans quoi on est embarqué », affirme-t-il.

Chez Planète mobile, un détaillant qui vend des dispositifs mains libres, les affaires vont bien. Pourtant, l'entreprise estime que la majorité des utilisateurs de cellulaires n'ont toujours pas fait l'achat d'une oreillette. « Les gens qui n'ont pas d'appareil mains libres en ce moment vont attendre d'avoir trois ou quatre amendes avant de s'en acheter un », croit Benoît Sauriol, directeur marketing chez Planète mobile.

Les contrevenants pris sur le fait étaient tous des hommes. Le fruit du hasard? M. Paquette en doute. «À ma connaissance, les hommes font un usage plus fréquent du cellulaire, explique-t-il. Et les femmes ont plus tendance à se conformer aux lois et aux réglementations. Elles ont sûrement pris les choses plus au sérieux que les hommes et ont fait l'achat de systèmes mains libres.»