«Faites attention à la vitre les enfants», lance cette mère, en escaladant les escaliers couverts d'éclats de verre menant à son logement.

Au rez-de-chaussée de l'immeuble situé à l'intersection de la rue Maurice-Duplessis et du boulevard Langelier, une scène de désolation s'offre aux nombreux passants et badauds.

>>> Écoutez notre entrevue avec le photographe de La Presse Robert Skinner, victime d'une agression lors des émeutes hier soir.



Les commerces ont été complètement saccagés dans les émeutes de la veille.

Pendant que les vandales pillaient et détruisaient le dépanneurs, la pizzeria, un pawnshop (prêteur sur gage) et une boucherie, ces deux mères monoparentales et leurs six enfants voyaient tout de leur balcon perché au deuxième étage. «Ils ont lancé des cocktails molotov en bas, on a essayé d'appeler la police quatre fois, ils nous ont finalement répondu: faites ce que vous pouvez», raconte une des deux mères, encore secouée.

Les deux mamans ont eu peur que les vandales ne décident d'étendre la casse jusqu'à leurs appartements. «Ma fille a tremblé pendant une demi-heure, ce n'est pas un endroit pour élever des enfants», tranche une des mamans, qui refuse de s'identifier par crainte de représailles.

Un étage plus bas, Siho Orum constatait avec découragement les dégâts dans sa pizzeria, ouverte depuis deux mois seulement.

Il comptait sa caisse avec son associé à la fin de leur quart de travail, hier, quand l'émeute a éclaté. «Nous avons couru nous réfugier en bas, nous avons enlevé les ampoules et nous n'avons pas bougé durant deux heures», raconte le restaurateur d'origine kurde. Il avait installé une couverture sur des planches dans une pièce glauque de son abri de fortune en béton. «On a eu peur quand ça a commencé à sentir l'essence», ajoute le restaurateur.

Dans les rues du secteur, les vestiges de cette nuit chaotique sont encore bien visibles. Outre les commerces vandalisés, il y a les carcasses calcinées des véhicules incendiés.

L'odeur des nombreux brasiers allumés hier flotte toujours.

Si les jeunes sont responsables de la casse, la majorité des personnes interrogées en avaient plutôt contre les policiers. «Ils sont restés debout les bras croisés. On paie des taxes, mais on n'a pas droit à la protection», tonne Alexandre Monsef, propriétaire d'un immeuble vandalisé.

Plusieurs résidants du quartier ont également dénoncé le profilage racial dont ils disent être victime.

À première vue, le lien de confiance ne sera pas facile à rétablir entre la population et les policiers.