Une femme séropositive qui a eu une relation sexuelle avec un homme sans le prévenir de son état a été condamnée à une peine de 12 mois à purger dans la collectivité, hier, au palais de justice de Longueuil.

En rendant sa décision, le juge Marc Bisson a noté qu'il s'agit d'une très grave infraction devant être sanctionnée par une peine de prison. C'est le fruit du hasard que l'homme n'ait pas été infecté par cette maladie aux conséquences mortelles, a fait valoir le magistrat, qui a aussi relevé le fait que la femme de 49 ans n'a pas manifesté de remords et s'entête à considérer qu'elle n'était «pas obligée de le dire.»

Cependant, compte tenu de ce «dossier exceptionnel», il a conclu que l'accusée pouvait purger sa peine dans la communauté. Il lui a imposé un couvre-feu, et une probation d'un an.

Au terme de son procès dans cette affaire, en février dernier, la femme avait été déclarée coupable de voies de fait graves et d'agression sexuelle. Hier, à la demande de Me Christian Desrosiers, avocat en défense, le magistrat a prononcé l'arrêt du processus judiciaire sur l'accusation d'agression sexuelle.

La femme et la victime s'étaient rencontrées lors des matchs de soccer auxquels participaient leurs fils respectifs. Le 31 août 2000, ils ont eu une relation sexuelle non protégée, sans que la femme ne dévoile quoi que ce soit, même si elle se savait séropositive depuis 1991. Elle n'a avisé l'homme de la situation qu'en septembre. L'homme était sous le choc et s'est tenu coi. Néanmoins, quelques semaines plus tard, ils se revoyaient et entreprenaient une relation, avec contacts sexuels protégés, qui allait durer quatre ans. La relation s'est finie dans la tourmente en décembre 2004. La femme a déposé une plainte de violence conjugale contre l'homme, et celui-ci a porté plainte contre elle pour la non-divulgation de son état lors de leur première relation sexuelle. «Il est difficile de ne pas voir dans la démarche de monsieur une vengeance», a signalé le juge, hier.

L'homme, qui était assis à l'arrière de la salle d'audience, est sorti furieux. «On la fait passer pour une victime. C'est une manipulatrice qui m'a arnaqué. Depuis le début, je me suis fait traiter en coupable», fulminait-il, en disant qu'un «homme qui porte plainte contre une femme va perdre automatiquement».

Plusieurs membres de la Coalition des organismes communautaires québécois de lutte contre le sida sont venus appuyer l'accusée, qu'ils considèrent effectivement comme une victime dans cette affaire.

«L'acte sexuel est une responsabilité partagée», a estimé Lise Pinault, porte-parole de la Coalition. Contrairement à ce que le tribunal venait de démontrer, elle considère que le dévoilement n'est pas automatique. «Tant qu'il y aura autant de discrimination envers les séropositifs, on n'est pas obligé. Si on ne se sent pas en confiance, on n'a pas à le dire.»

La femme, dont on doit protéger l'identité en vertu d'une ordonnance du tribunal, réside actuellement dans une maison de soins. Elle ne répond plus à la trithérapie et doit se soumettre à un nouveau traitement.