La mère d'Omar Khadr a exprimé un sentiment d'impuissance, mardi, en voyant son «petit gars», qui est accusé de la mort d'un soldat américain en Afghanistan, l'appeler en pleurant dans l'enregistrement d'un interrogatoire subi par le jeune Canadien à la base militaire américaine de Guantanamo, à Cuba, en 2003.

C'était la première fois en plus de six ans qu'elle voyait le visage de son fils, âgé de 16 ans au moment de l'interrogatoire mené par un agent du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS).

Dans l'interview exclusive qu'elle a accordée à La Presse Canadienne chez elle, à Toronto, Maha Elsamnah a avoué qu'elle se sentait impuissante devant la vidéo de la séance conduite par un agent du renseignement canadien. «Mon fils m'appelle et je suis assise ici, a dit Mme Elsamnah, tour à tour stoïque et éperdue, en décrivant ses réactions. J'ai pleuré. J'ai dit: 'dieu, s'il-vous-plaît, répondez-lui. Je ne peux pas répondre'.»

Une partie de la vidéo montre l'adolescent pleurant à chaudes larmes. Entre ses sanglots, il dit quelque chose qui ressemble à «Aidez-moi», mais en fait, selon Mme Elsamnah, il s'agit d'une expression arabe voulant dire «Oh, maman».

À un autre moment de l'interrogatoire, Omar Khadr, qui avait 15 ans au moment de sa capture, réclame de pouvoir rentrer au Canada. «Je ne peux rien y faire, répond l'agent, dont le visage n'est pas visible. Je veux rester ici avec toi, à Cuba. Il fait tellement beau - pas de neige.»

La mère et la soeur d'Omar Khadr, Zaynab, âgée de 28 ans, se sont dites atterrées par l'attitude de l'agent du SCRS. «Il est assis dans une cellule, en cage, il souffre de la chaleur. (...) C'est tout simplement ridicule de comparer des vacances à Cuba à son séjour à Cuba», a lancé Zaynab Khadr. Intervenant, sa mère s'écrie que l'agent «se moque» de son fils.

Le frère d'Omar, Karim, qui a été gravement blessé dans le même combat, a dit qu'il avait eu du mal à regarder la vidéo, et qu'il avait ressenti de la colère à cause de «ce qu'ils lui font subir, pour rien». «Pourquoi voulaient-ils l'interroger? Il n'a que 16 ans. (...) Je suis pas mal certain que s'il détenait de l'information, les Américains l'avaient déjà.»

Les Khadr ont déjà été des amis personnels du leader terroriste Oussama ben Laden, une amitié entretenue par le patriarche de la famille, Ahmed Said Khadr, tué dans un échange de tirs avec les forces pakistanaises en octobre 2003.

Mme Elsamnah a déclaré qu'elle est consciente que beaucoup de Canadiens la tiendront responsable, elle et son défunt mari, pour ce qui arrive à Omar Khadr. Mais elle maintient que faire porter le blâme à un enfant est inacceptable. «Omar n'est jamais allé en Afghanistan pour se battre. Nous ne sommes jamais allés là pour nous battre. Nous y sommes allés pour aider.»