Le contentieux de la ville centre, qui a aidé l'arrondissement de Ville-Marie à rédiger son règlement sur la propreté en 2007, n'a pas pensé qu'il pourrait entrer en contradiction avec la convention collective des cols bleus. Pourtant, des organismes du centre-ville utilisent des employés privés pour nettoyer des trottoirs depuis des années.

Le «règlement sur le civisme, le respect et la propreté» entré en vigueur le 1er juin 2007 violerait une clause de la convention collective des cols bleus, selon l'avis rendu le mois dernier par l'arbitre André Rousseau. Ce dernier étudiait un grief déposé le 29 juin 2007 par le Syndicat des cols bleus après que le règlement est entré en vigueur.

Me Rousseau estime que le règlement, qui oblige l'occupant ou le propriétaire d'un immeuble à faire en sorte que la propreté règne devant sa porte, viole la clause 18.01 de la convention des cols bleus sur la sous-traitance.

«Il ne m'appartient pas de juger si la Ville peut ainsi contraindre ses citoyens, mais en agissant par voie réglementaire, la Ville cherche à faire indirectement ce que la clause 18.01 lui interdit de faire directement», écrit Me Rousseau dans sa décision. Il ajoute que, avec le règlement, «des citoyens, oeuvrant sans rémunération, se trouvent tenus d'accomplir certaines tâches qui relèvent de descriptions d'emplois de cols bleus».

«On avait eu l'aide du contentieux de la Ville pour rédiger le texte afin qu'il soit applicable», dit pourtant Karim Boulos, conseiller municipal du district Peter McGill et maire suppléant de Ville-Marie.

Le président du Syndicat des cols bleus, Michel Parent, estime que le règlement «force les commerçants à agir comme des sous-traitants, sans les payer en plus». Ce n'est pas l'avis de Jean-Yves Hinse, directeur des relations professionnelles à la Ville, qui croit que l'arbitre a erré et confondu «les citoyens avec des bénévoles» et que la décision est «déraisonnable et sans fondement». Du coup, la Ville a porté le dossier devant la Cour supérieure.

Mais, curieusement, la décision de l'arbitre ne fait pas mention du fait que des organismes de Ville-Marie font nettoyer les trottoirs par des employés privés. En effet, mis à part la brigade des jeunes de la propreté, d'autres personnes que les cols bleus nettoient les rues du centre-ville. On en voit notamment rue Sainte-Catherine Est, employées par la SDC du Village. L'organisme Destination centre-ville embauche aussi depuis une dizaine d'années des employés pour nettoyer les trottoirs.

«On ne se mêle pas de cette histoire, dit le directeur général de Destination centre-ville, André Poulin. On ne nettoie pas les trottoirs à la place de qui que ce soit. On essaie d'améliorer la propreté de notre bout de territoire, car ce n'était pas propre, avant.»

«Peu importe la décision du juge, on va la respecter, dit toutefois M. Boulos. La loi est la loi. C'est basé sur la jurisprudence. Parfois, on crée des précédents. Pour ce qui nous concerne, on est contents des résultats obtenus avec ce règlement. Les marchands et les résidants sont contents. Il est très évident que le centre-ville est plus propre.»

Les 2700 constats d'infraction délivrés entre le 1er juin 2007 et le 1er juin 2008 dans le cadre de ce règlement ont rapporté 1 079 850$ à l'arrondissement. Le règlement est toujours valide, en attendant que la Cour supérieure se prononce.