Moins d'un mois après son lancement, le Tournant vert de Stéphane Dion est attaqué devant les tribunaux. Un organisme environnemental de Toronto, Green Shift, a lancé hier une poursuite de 8,75 millions contre le Parti libéral du Canada.

La petite firme de consultants en environnement affirme que le parti lui cause un tort irréparable en utilisant le même nom (anglais) qu'elle pour son plan de taxe sur le carbone, annoncé en grande pompe par Stéphane Dion le 19 juin.

Dans sa procédure, Green Shift inc. demande à la Cour supérieure de l'Ontario d'ordonner aux libéraux de cesser d'utiliser ce nom et de détruire son matériel promotionnel.

Jennifer Wright, fondatrice de l'entreprise, a indiqué hier en conférence de presse que plusieurs clients voulaient se dissocier de la compagnie depuis que les libéraux avaient adopté la même dénomination. Elle dit avoir été «inondée» de courriels et d'appels.

«Uniquement parce qu'ils sont une grosse organisation et que nous ne sommes qu'une petite société, ils pensent qu'ils peuvent nous passer dessus, a-t-elle lancé. Mais ils ne peuvent pas le faire. Ils doivent le retourner au vrai Green Shift, à son véritable propriétaire.»

Green Shift inc. a été fondé en 1999. Elle a enregistré des profits de 1,5 million l'an dernier, de 300 000$ il y a deux ans. L'entreprise offre des services de consultation et a mis sur pied un programme de certification de produits jugés bons pour l'environnement.

«Non fondée»

Du côté du PLC, on nie avoir agi illégalement. «L'usage très répandu en anglais des expressions «green shift» ou «green tax shift» permettait à tout un chacun d'utiliser ces mots pour faire référence à un programme fiscal», a déclaré le président du parti, Doug Ferguson.

«Ce n'est pas une entreprise commerciale que nous avons, c'est une politique que nous proposons, a indiqué Stéphane Dion. Nous sommes prêts à collaborer avec cette dame pour s'assurer que les choses se passent bien. Mais il est très dommage qu'elle utilise comme ça une poursuite qui, à notre avis, n'est pas fondée.»

Frédéric Letendre, expert montréalais des marques de commerce, juge que la poursuite est loin d'être gagnée, même si une victoire n'est totalement impossible. «À ce stade, l'injonction me paraît prématurée parce que je trouve qu'il n'y a pas assez de preuves, a indiqué l'avocat du cabinet Lafortune Cadieux. À plus long terme, ce n'est pas farfelu et ils vont sans doute travailler sur leur preuve.»

«Au niveau des dommages, ça me paraît nettement exagéré. Nous ne sommes pas aux États-Unis! Dans ce contexte-ci et surtout que le Parti libéral savait avant que Green Shift inc. existait, a-t-il conclu, ils ont peut-être manqué de délicatesse.»