Les députés conservateurs ont tout tenté, mercredi, pour retarder les travaux du comité parlementaire de l'éthique ou encore imposer leur volonté, mais en vain.

Les partis d'opposition, majoritaires, ont eu le dernier mot en s'assurant de la comparution des candidats conservateurs et agents officiels qui sont au centre d'un stratagème de transfert de dépenses qui aurait permis d'excéder le plafond des dépenses électorales.

Après quelques joutes procédurales et des critiques bien senties lancées par des députés conservateurs visiblement frustrés, l'opposition a fait adopter une motion qui obligera les 67 candidats conservateurs au coeur de cette controverse, leurs agents officiels respectifs ainsi que les organisateurs du Parti conservateur lors de l'élection de 2006, à témoigner devant le comité.

Ces 67 candidats, dont 17 ont été élus et siègent actuellement aux Communes, ont fait l'objet de transferts de dépenses avec leur maison mère, des transferts totalisant environ 1,3 million $. L'argent a servi à défrayer les coûts de publicités nationales des conservateurs lors de la dernière campagne électorale.

Le stratagème, qui est sous enquête par Elections Canada, aurait pu permettre au Parti conservateur de dépasser le plafond des dépenses électorales permises d'environ 1,3 million $.

Il aura fallu près d'un an aux partis d'opposition pour arriver à ce résultat. Leur première tentative remonte à septembre 2007, devant le comité des opérations et de la procédure, où les tactiques dilatoires des conservateurs, combinées à un président conservateur qui fermait les yeux, avaient mis un frein aux multiples

motions présentées.

Les choses ne se sont pas déroulées de la même façon au comité de l'éthique, présidé par un député libéral, au grand dam des conservateurs qui ont dû se résigner devant l'implacable réalité de la majorité des partis d'opposition.

Malgré leurs tentatives, les conservateurs n'ont pas réussi à faire inviter devant le comité des représentants des autres partis politiques, dont ceux du Bloc québécois, pour tenter de faire la preuve, comme ils l'avancent, que tous les partis agissent de la même façon.

Frustrés, les représentants conservateurs ont qualifié le comité «d'exercice de relations publiques du Parti libéral».

Les premiers témoins seront convoqués le 11 août, et le comité entend se réunir tous les jours pendant cette semaine-là.

Mais déjà les conservateurs laissent entendre qu'il est peu probable que les députés et ministres conservateurs qui sont visés par le comité se prêtent au jeu. En vertu des règles parlementaires, un député peut refuser l'invitation d'un comité. Tout autre citoyen ne peut, par contre, s'y dérober.

«Je ne crois pas que les ministres et députés participeront à ce cirque», a souligné le député conservateur Pierre Poilievre.

Toutes les critiques et accusations formulées par les conservateurs n'ont pas réussi à effacer les sourires des visages des libéraux, bloquistes et néo-démocrates, qui voyaient bien qu'ils allaient remporter cette manche.

«On ne veut pas le voir dérailler (ce débat), comme est en train de le faire le parti conservateur. Parce que c'est exactement ce que vous faites, a lâché la députée du Bloc québécois, Carole Lavallée, aux conservateurs. Vous êtes en train

de 'morpionner» le débat parce que vous n'aimez pas ce que vous entendez.»

Il est vrai que les conservateurs n'ont vraiment pas apprécié les réponses que leur

a données le directeur général des élections (DGE), Marc Mayrand, lors de sa deuxième journée de comparution au comité, mercredi. Les débats ont failli tourner à la foire d'empoigne lorsque les conservateurs ont persisté à accuser M. Mayrand de partisannerie.

Ils se sont aussi offusqués de ce que le DGE refuse de répondre à certaines de leurs questions sous prétexte que cette affaire fait l'objet d'une enquête du commissaire aux élections et d'un litige devant la Cour fédérale.

«Le comité et Elections Canada avaient beaucoup d'outils pour empêcher des réponses aux questions que nous posions et maintenant, nous allons continuer de défendre notre position, a fait valoir M. Poilievre. Ce que nous avons fait pendant les élections est tout à fait acceptable dans la loi, c'est ce que tous les partis font et

nous avons raison.»

La libérale Marlene Jennings a pour sa part rappelé que le fait qu'un témoin limite ses réponses devant un comité pour éviter de nuire à un litige devant les tribunaux n'est pas inusité.