Les détenus québécois consomment de plus en plus de médicaments. De 2002 à 2008, les dépenses à cet égard dans les prisons ont bondi de 50 %. Cette année, les médicaments prescrits aux prisonniers ont coûté 4 476 300 $ aux contribuables.

Chaque détenu a consommé en moyenne pour 1020 $ de médicaments en 2007, révèlent des documents obtenus en vertu de la Loi sur l'accès à l'information.

C'est bien plus que la moyenne des citoyens. Chaque Québécois dépense en moyenne 699 $ par année en médicaments prescrits, selon l'Institut canadien d'information sur la santé. Environ la moitié de ces frais (348 $ par année) sont remboursés par le système public. Mais en prison, tous les médicaments sont payés par le gouvernement.

Dans certains centres de détention, la consommation de médicaments par personne est effarante. À Saint-Jérôme, chaque détenu consomme en moyenne pour 2000 $ de médicaments par année. De 2002 à 2003, la consommation totale de médicaments dans cet établissement a bondi de 117 %.

La situation est encore pire à la prison de Valleyfield. Depuis 2002, la consommation totale de médicaments y a fait un bond spectaculaire de 315 %.

Pendant ce temps, les Québécois ont augmenté leur consommation de médicaments de 40 %.

Au ministère de la Sécurité publique, on refuse de commenter la situation. «On ne commente pas la pratique médicale. Tout ce que je peux vous dire, c'est que la distribution de médicaments en prison est bien encadrée», affirme le porte-parole du ministère, Mario Vaillancourt.

Les gardiens de prison qui côtoient les détenus chaque jour remarquent quant à eux que les médicaments sont de plus en plus populaires. Selon eux, plusieurs facteurs sont en cause.

«Le commerce illicite est partout. En prison, ça vaut cher, des médicaments ! C'est de la drogue. Les détenus sont rendus très bons pour faire semblant d'être malades et pour se faire prescrire des médicaments», affirme le président national du Syndicat des agents de la paix en services correctionnels du Québec, Stéphane Lemaire.

Il explique que le trafic est de plus en plus difficile à enrayer, car les centres de détention débordent.

«Les 18 centres du Québec sont en surpopulation. C'est vraiment difficile pour nous de tout contrôler», dit-il.

M. Lemaire cite le cas de la prison de Trois-Rivières. Conçue pour recevoir 118 détenus, elle en compte actuellement 218. De 2002 à 2007, la consommation de médicaments y a fait un bond de 131 %.

La hausse de la consommation de médicaments en prison est aussi liée à l'augmentation du nombre de criminels psychiatriques, selon M. Lemaire.

Le président de l'Office des droits des détenus, Jean-Claude Bernheim, explique que le milieu carcéral a toujours été propice à la consommation de médicaments : «Des études ont montré que les médecins en prison sont plus enclins à prescrire des médicaments pour calmer les détenus. Cette tendance est-elle en hausse au Québec ? Il faudrait voir.» Il ajoute que l'âge moyen des détenus augmente et qu'il est donc normal que la consommation de médicaments en prison soit en hausse.

Avec la collaboration de William Leclerc