Les Français du Québec auront en 2012 un député à l'Assemblée nationale de France. La Loi sur la modernisation des institutions de la Ve République adoptée de justesse hier par les députés et sénateurs français réunis en congrès à Versailles crée en effet des postes de «députés des Français de l'étranger».

Jusqu'à présent, les 2,3 millions de Français établis hors de France étaient représentés par 12 sénateurs élus par des grands électeurs et par des conseillers élus à l'Assemblée des Français de l'étranger (AFE).

Ces «Français oubliés par la démocratie» ne pouvaient voter dans leur pays de résidence aux élections législatives. Ils devaient donner une procuration à une personne de confiance ou retourner dans leur commune d'origine, soit le dernier endroit où ils avaient vécu avant de partir.

Avec l'adoption de cette loi, la Constitution française comprend dorénavant la phrase: «Les Français établis hors de France sont représentés à l'Assemblée nationale et au Sénat.»

Ces députés seront donc élus dès les prochaines élections législatives, en 2012, directement par la population de Français de l'étranger. Ils siégeront au Palais Bourbon, à Paris, avec les autres députés de l'Hexagone. Par une autre loi, des circonscriptions seront définies pour encadrer le territoire auquel ces députés seront rattachés. Le Québec et l'Est canadien auront sans doute un député tout comme l'Ouest canadien.

L'adoption de la loi a été acquise de justesse. Au sein des partis politiques, il y avait des pour et des contre. La réunion du Sénat et de l'Assemblée nationale faisait que 905 élus étaient appelés à voter: 896 l'ont fait. Il fallait une majorité de 3/5 des voix exprimées, soit 538 voix. Il y a eu 539 voix en faveur et 357 contre.

«Nous avons corrigé une injustice institutionnelle dont étaient victimes nos compatriotes expatriés, a réagi Robert Del Picchia, sénateur UMP des Français établis hors de France. L'inscription dans le marbre de la Constitution est donc une garantie pour les Français de l'étranger.»

«En tant qu'élu, c'est une excellente chose car on avait besoin de renforcer le processus législatif, ajoute François Lubrina, conseiller élu à l'AFE. En ayant des députés, on va pouvoir initier des lois en faveur de nos compatriotes et mieux défendre leurs intérêts en matière de retraite, de pension ou d'éducation.»

Pour l'ex-ministre péquiste Louise Beaudoin, qui possède la nationalité française, la nouvelle est intéressante. Mais elle ne compte pas pour autant se porter candidate en 2012. Son choix, «c'est le Québec», dit-elle. Elle fait remarquer qu'il y a déjà 12 députés et six sénateurs italiens représentant leurs compatriotes à l'étranger.

Il n'y a par contre pas encore de représentants des centaines de milliers de Canadiens qui vivent hors du Canada.

Mme Beaudoin pense que la France et l'Italie ont «toujours voulu garder une présence étrangère forte». «Ce sont des pays qui accordent beaucoup d'importance à leur rayonnement culturel et la diaspora est là pour resserrer les liens», dit-elle.

Le député NPD Thomas Mulcair, qui a la nationalité française depuis une quinzaine d'années, applaudit aussi la décision française. «C'est une excellente idée car cela donne une voix aux Français de l'étranger et les incite à rester branchés à leur pays», dit-il.

Enfin, Louise Beaudoin est satisfaite que la modification constitutionnelle contienne aussi un article sur la francophonie. «L'article 87 fait état de la participation de la France dans la francophonie. Pour la première fois, la France en fait mention dans sa Constitution. C'est important pour tous les francophones.»