Air Canada suspend ses vols vers la Chine et permet à ses passagers qui devaient se rendre en Italie, où des cas ont été décelés, de modifier leur réservation. Certaines compagnies aériennes connaissent une baisse de la demande. Les agences de voyages québécoises reçoivent quant à elles un nombre important d’appels de consommateurs inquiets parfois prêts à changer de destination.

Bien que les effets de la propagation du COVID-19 soient palpables, elles ne dissuaderont pas complètement les gens de voyager, estiment les experts de l’industrie interrogés par La Presse.

« Je ne crois pas au bout du compte qu’il y aura des effets insurmontables », estime Paul Arseneault, titulaire de la Chaire de tourisme Transat de l’École des sciences de la gestion de l’UQAM.

« Je ne connais personne qui ne prendra pas de vacances à cause du coronavirus. Ce qui se passe dans la tête du voyageur, c’est qu’il y a des destinations qui disparaissent du radar et d’autres qui apparaissent. Si une personne se dit : “Je n’irai pas au Brésil, je n’irai pas en Italie”, elle peut décider d’aller en Espagne, au Portugal ou en Argentine. »

Il va y avoir de la substitution et non pas de la perte sèche. Ce qui va être perdu d’un bord va être regagné de l’autre.

Paul Arseneault, titulaire de la Chaire de tourisme Transat de l’École des sciences de la gestion de l’UQAM

« Ce que la littérature dit, en fait, c’est que les gens vont éviter d’aller vers les points chauds où il y a des risques de contamination », ajoute Alain A. Grenier, professeur en tourisme à l’École des sciences de la gestion de l’UQAM. Rappelons qu’en plus de l’Asie, où la Chine a fortement été touchée, on a notamment fait état de cas en Italie et au Brésil.

Dans un communiqué publié sur son site, l’Organisation mondiale du tourisme indique que « l’OMS [Organisation mondiale de la santé] n’a pas recommandé de restreindre les voyages ou les échanges commerciaux ».

« Les restrictions en matière de voyages allant au-delà sont susceptibles de créer d’inutiles entraves au trafic international, avec des répercussions négatives sur le secteur du tourisme », peut-on également lire.

Le ministère canadien des Affaires étrangères, quant à lui, invite les voyageurs canadiens qui atterrissent en Italie à faire preuve d’une grande prudence. En ce qui concerne la Chine, on suggère fortement d’éviter tout voyage non essentiel.

Inquiétude des voyageurs

De son côté, André Desmarais, propriétaire de l’agence Aéroport Voyage et président de la section Québec de l’Association canadienne des agences de voyages, affirme que, bien que les gens aient la volonté de continuer à voyager, « l’industrie du tourisme est touchée ». Il a par exemple reporté à 2021 un voyage de groupe prévu prochainement au Japon.

Il y a beaucoup plus de questionnements de la part des clients en ce moment. On a des annulations, des changements de destination. On a des gens qui partaient pour l’Italie qui sont inquiets.

André Desmarais, président de la section Québec de l’Association canadienne des agences de voyages

« On a eu le 11-Septembre, on a eu l’éruption du volcan en Islande [en 2010]. Le COVID-19 nous fait vivre un peu ce genre de situation là, croit-il. Les gens sont sur le frein. Ils se disent qu’ils vont attendre de voir comment va aller le virus. Il va y avoir une diminution. »

Il mentionne néanmoins que les ventes continuent et que le téléphone n’a pas cessé de sonner.

Compagnies aériennes

Dans les airs, l’Association internationale du transport aérien soutient que certaines compagnies aériennes sont en danger en raison de la baisse des réservations. Le virus pourrait même entraîner un premier recul de la demande dans le secteur aérien depuis la crise financière de 2008-2009.

Le manque à gagner attribuable à l’épidémie pourrait atteindre 30 milliards US pour les compagnies aériennes en 2020, dont 27,8 milliards pour les transporteurs de la région Asie-Pacifique, estimation qui date du 20 février. 

Selon l’Organisation de l’aviation civile internationale, près « de 70 compagnies aériennes ont annulé tous les vols internationaux à destination et en provenance de Chine, et 50 autres réduisent leurs activités aériennes ».

Air Canada fait partie du lot puisque le transporteur aérien a suspendu ses vols vers Pékin et Shanghai jusqu’au 10 avril.