Lorsqu'ils ont décidé de se marier dans l'île d'Antigua, Denise Gomes et son conjoint Brian ont apporté bien plus que la robe ou les souliers vernis dans leurs valises. Les deux Canadiens y ont aussi glissé des cahiers, des crayons et du papier de construction pour venir en aide aux écoliers de l'école primaire du village de Willikies.

Le couple avait demandé à ses 60 invités de faire de même. Résultat: les écoliers de la petite école antiguaise ont eu de quoi se réjouir lorsqu'ils sont venus prendre possession de la montagne d'articles scolaires arrivés pour eux, par les airs, un matin d'avril 2014.

Cette histoire, recensée photos à l'appui sur le site de Pack for a Purpose, réjouit Rebecca Rothney. L'Américaine de Raleigh, en Caroline du Nord, a fondé en 2010 cette organisation à but non lucratif qui met en contact des voyageurs désireux d'aider et des établissements dans le besoin.

Formule simple

La formule est simple, mais il fallait y penser: Rebecca et ses bénévoles ont recensé des centaines d'établissements dans le monde - écoles, cliniques, orphelinats, refuges animaliers, centres antibraconnage... - dont la cause est soutenue publiquement par des lieux d'hébergement ou des entreprises touristiques officielles.

Ces établissements publient sur le site de Pack for a Purpose la liste de leurs besoins matériels, depuis le moindre stylo jusqu'à l'ordinateur alimenté à l'énergie solaire. Les voyageurs peuvent aider dans la mesure de leurs moyens en apportant dans leurs bagages qui du matériel scolaire, qui des pansements stériles, de la nourriture pour chiens ou des accessoires de sport. Une fois à destination, il suffit d'aller déposer la marchandise dans un point de chute prédéterminé.

«C'est une simple façon d'être courtois et reconnaissant pour l'accueil que nous fait un pays», lance Rebecca Rothney, en entrevue avec La Presse.

L'idée a germé dans la tête de l'ex-enseignante et entrepreneure après deux voyages au Botswana et au Kenya, au début des années 2000. Rebecca et son conjoint Scott ont réalisé que le poids des bagages permis sur les vols internationaux était de loin supérieur à ce qu'ils pouvaient prendre sur les vols intérieurs. «Il y avait des dizaines de kilos en poids de bagages perdus, et je déteste le gaspillage», dit-elle.

Sachant qu'elle allait visiter une école au Kenya, elle décide d'utiliser tout ce poids perdu pour transporter des articles scolaires qui manquaient à l'établissement. La réaction des écoliers l'émeut: «Ils n'avaient jamais eu une règle à eux.» Lors du séjour kényan suivant, c'est une clinique qui reçoit la visite des Rothney. «Le personnel n'avait pas de stéthoscopes ni de brassards pour leur tensiomètre. Je n'en revenais pas!»

«Je me suis demandé pourquoi les clients qui avaient comme nous un surplus d'espace dans leurs bagages ne transportaient pas tous du matériel de première nécessité. Un stéthoscope pèse moins de 1 kg et il peut toucher des milliers de coeurs...»

Rebecca Rothney décide de remédier à la situation. Elle recense un par un tous les lieux d'hébergement ou les entreprises touristiques qui appuient une ou plusieurs causes caritatives. «Au départ, j'ai trouvé 29 hôtels et entreprises, surtout en Afrique. Aujourd'hui, le site en compte 440, répartis dans 60 pays, y compris au Canada, à Churchill, au Manitoba. Il y a des besoins partout, sauf peut-être à Monaco et au Liechtenstein!»

93 910 kg de marchandises

Depuis la fondation de Pack for a Purpose, les voyageurs ont transporté 93 910 kg de marchandises grâce au réseau de contacts colligés par Rebecca Rothney. «Les voyageurs n'ont pas besoin de loger dans les hôtels participants ni de faire affaire avec les entreprises touristiques. Tout ce qu'ils doivent faire, c'est un détour pour déposer la marchandise, par exemple dans le lobby de l'hôtel participant...» L'hôtel se chargera ensuite de livrer les articles aux établissements concernés. Et si les donateurs espèrent visiter l'école ou la clinique aidée? «C'est parfois possible, mais pas toujours, et ce, pour toutes sortes de raisons. Nous ne faisons aucune promesse, mais nous pouvons mettre le voyageur en contact avec l'organisme en question.»

Trois fois par année, les 440 lieux participants contactent Pack for a Purpose pour faire le suivi. Quelle quantité de marchandises leur a été livrée? Comment ces articles ont-ils été utilisés?

«Certains organismes envoient même des photos. C'est un moyen pour nous de s'assurer qu'il n'y a pas d'abus et que les articles sont bien acheminés à ceux qui en ont besoin. Si un organisme ne nous contacte pas comme prévu, il est rayé de notre liste. Or, en 17 ans, nous n'avons jamais eu un cas d'abus...»

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www.packforapurpose.org (en anglais)