Le naufrage meurtrier du paquebot Costa Concordia près des cotes italiennes il y a trois semaines a entraîné une baisse des réservations sur le marché de la croisière, où les professionnels cherchent à rassurer une clientèle devenue attentiste.

Si aucune vague d'annulations n'avait été constatée dans les tout premiers jours après le drame, qui a fait 17 morts et 15 disparus le 13 janvier, les inscriptions ont ensuite fléchi.

Le groupe américain Carnival, maison mère de Costa et numéro un mondial de la croisière avec dans son giron d'autres compagnies comme Aida, Cunard, Ibero Cruises, P&O..., a vu ses réservations baisser de 15% depuis l'accident spectaculaire du fleuron de Costa. Ce qui va amputer les bénéfices du groupe, a-t-il prévenu cette semaine.

Son concurrent direct, le numéro deux mondial Royal Caribbean Cruises Ltd (RCCL), a dit souffrir lui aussi et averti d'un impact sur son bilan annuel.

Avant le naufrage du 13 janvier, «la tendance des réservations était soutenue», a relevé RCCL: «Nous pensons que la plupart des observateurs et des passagers potentiels comprennent que les croisières sont sûres et que cet incident est une anomalie rare (...) Mais à court terme cela a un impact significatif sur nos réservations», a ajouté Royal Caribbean.

En Amérique du Nord, la chute est de 13 à 16% sur un an. «En Europe, où la couverture média a été plus complète, le recul a été plus élevé», contre seulement une «légère baisse» en Asie-Pacifique et en Amérique du Sud.

«Ca se confirme un peu chez tout le monde dans le milieu de la croisière, il y a un ralentissement du marché», résume auprès de l'AFP le président de l'association des tour-opérateurs français Ceto, René-Marc Chikli.

«Il ne s'agit pas de traumatisme mais d'attentisme, les clients sont circonspects», estime-t-il.

Selon lui, «une chute de 15-20% des réservations, ce n'est pas si dramatique, ça peut se dissiper dans les semaines à venir».

Rémy Arca, PDG de la Compagnie Internationale de Croisières (CIC), qui représente en France notamment Seaburn, Norwegian Cruise Line ou Seadream, abonde: «L'activité s'est un peu calmée, mais je ne suis pas inquiet pour la suite».

Plus inquiétante est, selon M. Chikli, «l'attitude d'un certain nombre d'agents de voyage qui en ce moment, par pudeur, ne proposent pas de croisières à leur clientèle. Cela n'aidera pas à réanimer le marché».

Chez Costa Croisières, «on ne constate d'annulations (de voyages) qu'à la marge», a assuré à l'AFP un porte-parole.

Mais le naufrage a contraint la compagnie à réorganiser son programme de croisières afin d'assurer le rythme prévu. Deux paquebots vont se substituer au Concordia pour des départs à partir de ports français notamment: le Magica et le NéoRomantica, dont la rénovation s'achève et qui doit être mis à flot d'ici quelques semaines.

L'accident du Concordia a déclenché le branle-bas de combat concernant la sécurité des croisières. Objectif: rassurer la clientèle de ce marché particulièrement florissant, notamment pour la France, en retard par rapport à ses voisins (Allemagne, Italie, Espagne...). Près de 400.000 Français sont partis en croisière en 2010.

La sécurité est la «priorité numéro un», a souligné Christine Duffy, présidente de l'Association internationale des croisières (CLIA) qui veut que l'Organisation maritime internationale (OMI) tire les leçons de l'accident pour l'améliorer à bord des navires.

Quelques jours après le naufrage, une conférence d'experts s'était aussitôt tenue sur ce thème à Londres.

Carnival, selon qui l'accident pose des questions «sur les procédures et sur les pratiques de sécurité et d'urgence», a lancé un audit sur ses itinéraires pour qu'un tel naufrage «n'arrive plus jamais».

Le Conseil européen de la croisière (ECC), et l'Organisation maritime internationale (OMI) comptent passer en revue les procédures. Un sujet sur lequel se penche aussi le commissaire européen aux Transports, Siim Kallas.