Quelles sont les villes qui méritent d'être considérées comme des étapes gastronomiques internationales? Montréal en fait-il partie? Ce sont deux questions auxquelles seront confrontés les experts au colloque Tourisme, gastronomie et médias, organisé par l'UQAM et le festival Montréal en lumière, dans le cadre des entretiens Jacques Cartier, les 6 et 7 octobre prochains.

La gastronomie est devenue un des piliers du marketing touristique. Plus d'un touriste international sur trois (35 %) choisit une destination en fonction d'une demi-douzaine de critères au sein desquels le «bien manger» occupe une place privilégiée. Et pour 5% des voyageurs, c'est même le seul critère de référence. Pour les restaurateurs et les hôteliers, ces touristes gastronomes sont des cibles de choix, parce qu'ils bénéficient de revenus supérieurs à la moyenne et qu'ils ne regardent pas à la dépense.

 

Pour prendre le train en marche, Montréal s'est joint, l'an dernier, au Réseau des villes gourmandes créé à l'initiative de Lyon. Parmi les 24 membres fondateurs, on retrouve aussi Barcelone, Bruxelles, Osaka, Lausanne, Canton... Mais le réseau n'est pas vraiment connu du grand public. «Actuellement, c'est le nombre d'étoiles au Guide Michelin qui confère le statut de haut lieu de la gastronomie, observe Jean-Pierre Lemasson, professeur au Département d'études urbaines et touristiques de l'UQAM et coorganisateur du colloque. C'est le seul guide rigoureux qui envoie des professionnels objectifs sur le terrain. Le guide américain le plus populaire, Zagat, cote les restaurants en se basant sur les commentaires envoyés par les lecteurs. Ce qui manque de rigueur: n'importe quel restaurateur peut demander à ses amis d'envoyer des avis louangeurs. Les seuls organismes de classification sérieux en Amérique du Nord sont l'American Automobile Association (AAA) et son pendant canadien, le CAA. Mais ils ne bénéficient pas du prestige international de Michelin.»

Or, les restaurants de Montréal n'ont jamais été évalués par les inspecteurs du Michelin (s'ils le faisaient, on verrait quelques étoiles locales déboulonnées de leur piédestal), pas plus que la plupart des métropoles membre du Réseau des villes gourmandes, d'ailleurs. «Ce n'est pas parce qu'une ville a beaucoup de trois-étoiles au Michelin qu'on y mange bien dans les restaurants fréquentés par les touristes moyens, note Jean-Pierre Lemasson. Ce n'est qu'une faible minorité des gens qui fréquentent des trois-étoiles. Il y a des touristes qui veulent bien manger sans pour autant se payer des restaurants étoilés au Michelin.»

En 2006, Zachary Paul Neal, professeur de sociologie à l'Université de l'Illinois, a réalisé une étude portant sur la qualité de la restauration dans 243 villes américaines. Il en a conclu que dans 228 des agglomérations scrutées, on ne trouvait pas de restaurant de qualité supérieure à celle des fast-foods. Et il a déterminé qu'il existait, aux États-Unis, 15 «oasis culinaires» (des grandes villes des côtes Est et Ouest) où on trouvait une restauration diversifiée et de qualité. «Montréal est une oasis culinaire au même titre que ces 15 villes-là, remarque Jean-Pierre Lemasson. La question qui se pose, maintenant: que pouvons-nous faire pour que Montréal se démarque de ce peloton?»

Une question à laquelle il tentera de répondre au colloque Tourisme, gastronomie et médias, en compagnie d'experts tel qu'André Gayot, président de Gault Millau Inc, Jean-François Mesplède, directeur du Guide Michelin France, Jean-Claude Ribaut, critique gastronomique au quotidien Le Monde, et quelques autres.

Information: www.gastronomieejc2008.uqam.ca