Derrière les produits équitables, il y a des hommes et des femmes qui luttent pour leur survie ou pour l'amélioration de leur condition. Éric St-Pierre les a rencontrés, a partagé leur vie quotidienne et les a photographiés alors qu'ils accomplissaient tout naturellement leurs tâches.

Il en résulte un livre profondément humain, touchant d'authenticité. «Aucune photo n'a été mise en scène, précise le photojournaliste de Montréal. J'observais les gens et j'attendais le moment propice pour les photographier.»

 

Éric St-Pierre habitait également chez ces travailleurs, partageait leurs repas, les accompagnait aux champs et au marché. Il a ainsi rencontré 25 groupes de producteurs dans 15 pays d'Asie, d'Afrique et d'Amérique latine pour présenter autant de filières du commerce équitable. Un projet auquel il travaille depuis 1996.

En plus des produits équitables bien connus (artisanat, café, cacao, etc.), l'auteur en présente d'autres moins connus, comme le karité, le quinoa et le guarana. Pour chaque produit, il retrace toute la chaîne de transformation à partir des producteurs. Ainsi, le café, le riz ou le coton acquièrent une toute nouvelle dimension une fois que nous savons comment ils sont récoltés et que nous prenons conscience de tous les efforts que nécessite leur transformation.

«Ce sont de petites fenêtres ouvertes sur les cultures, dit l'auteur. J'ai eu la chance, qu'ont rarement les touristes, de côtoyer ces travailleurs et je voulais partager mes découvertes.» Il nous raconte si bien ces petits moments du quotidien que nous avons l'impression d'être sur place.

Les textes du livre nous font voyager au coeur de la culture des pays visités par l'intermédiaire de la vie d'une fileuse de chanvre, d'un coupeur de canne à sucre ou d'une productrice de karité. Et les magnifiques photos, croquées sur le vif, sont d'un naturel criant de vérité. Chacune des personnes dans le livre est identifiée, de sorte que l'emballeur de bananes a un visage et un nom. «Aucune personne n'a refusé de se laisser photographier», dit-il.

Éric St-Pierre connaît bien le commerce équitable. Il a fait plusieurs voyages avec Laure Waridel, figure emblématique du commerce équitable au Québec, et a longuement étudié les retombées des échanges commerciaux qui visent à rétablir une certaine justice. «Au-delà de l'argent dont profitent les producteurs pour améliorer leurs conditions de vie, il y a toute cette solidarité qui se crée dans les villages. C'est cela, la véritable force du commerce équitable.»

Pour réaliser son projet, il a obtenu le soutien de 10 partenaires, dont Oxfam-Québec et le CECI. Cela lui a permis de financer ses séjours. Un mois chacun, en moyenne, le temps d'établir une véritable relation. «Je ne voulais pas être un simple visiteur», dit-il.

Quand on lui demande ce qui l'a le plus marqué, il sourit tendrement. «Assez curieusement, ce sont des choses relativement simples. C'est surtout le fait d'avoir établi des liens avec ces gens d'une autre culture et d'avoir eu la chance de partager leur vie quotidienne. Même si j'ai souvent dormi sur le plancher, même si j'ai mangé des tortillas aux haricots noirs trois fois par jour pendant une semaine, même si...

«Quand on est prêt à sortir de sa zone de confort, on s'offre la possibilité de vivre des choses extraordinaires, voire magiques», dit-il avec des étincelles dans les yeux.

Le tour du monde équitable, Éric St-Pierre, Les éditions de l'Homme, 240 pages, 49,95$