Le Lion d'or: le professeur à la rescousse du houblon

Non, les professeurs d'université ne vivent pas tous dans leur tour d'ivoire, à creuser des sujets obscurs. Certains sont très terre à terre, festifs même, et ont du coup de drôlement bonnes idées.

C'est le cas du professeur d'économie Stan Groves, de l'Université Bishop, qui a eu l'idée, avec deux collègues, il y a près de 40 ans, d'ouvrir, rien de moins, un bar, à Lennoxville près de Sherbrooke.

Un bar? Plutôt un pub, dans la plus pure tradition british. «Il n'y avait pas d'autre endroit décent où socialiser en ville!» se souvient le professeur retraité, qui est toujours un fidèle client du Lion d'or, ou plutôt Lion's Pub, comme tous l'appellent affectueusement ici. L'homme est même goûteur, à ses heures, des toutes dernières créations de ses fils (qui ont repris les rênes du commerce avec les années).

Stan Groves et ses deux collègues, donc, ont acheté, au début des années 70, une magnifique maison victorienne du village, une des rares à avoir été épargnées par le vaste incendie qui a rasé le coin, au tournant du XXe siècle. Après avoir abrité un magasin d'armes à feu, puis une maison funéraire (certaines serveuses croient d'ailleurs que la maison est toujours hantée...), le bâtiment allait donc abriter un bistro.

Pendant près de 10 ans, le bar - que les fils du «Professor» Groves nettoient plusieurs matins par semaine, avant de se rendre à l'école - sert donc les habituelles Molson et Labatt à ceux qui fréquentent l'Université Bishop. En échange, plusieurs étudiants (et le professeur les évalue à quelques milliers, échelonnés sur toutes ces années) y travaillent comme serveurs, pour gagner de quoi arrondir leurs fins de mois et payer leur loyer.

Puis, en 1984, c'est la révélation. Alors que vient d'ouvrir en Colombie-Britannique la toute première microbrasserie du Canada (Horseshoe Bay Brewing Comp.), Stanley Groves fils lance: «Mais c'est quelque chose qu'on peut faire ici, nous aussi!»

Deux ans plus tard, et après une formation de six semaines en Angleterre («On a un pub anglais, la bière anglaise est la meilleure, autant apprendre là-bas»), ouvre, à Lennoxville, la toute première microbrasserie du Québec, bien avant les Cheval blanc, Dieu du Ciel et autres Alchimistes de ce monde.

Leur première bière, baptisée Lion's Pride, une bière brune et plutôt amère, ne fait pas l'unanimité. «Personne ne savait ici, à l'époque, ce qu'était une bière brune», justifie Stanley, le fils, désormais brasseur du Lion d'or. Du coup, quelques années plus tard, le pub lance une blonde, nettement plus rassembleuse: La blonde des Cantons.

Aujourd'hui, quatre bières brassées ici sont offertes en fût. L'été, ne manquez pas la bière aux bleuets et au melon d'eau, franchement désaltérante. Un passage par le bar, même si la terrasse est invitante, vaut d'ailleurs aussi le détour. «C'est un mini-musée», dit humblement Stephen, deuxième fils du fondateur (un troisième, Kevin, s'occupe quant à lui du marketing), qui officie désormais aux cuisines (à ce sujet, ne ratez pas non plus son fish & chips, le meilleur à l'ouest de Halifax, dit-il). S'entassent ici quelque 2000 canettes de bières obscures, dont plusieurs ont été repêchées par le cuisinier lui-même dans les fonds du lac Massawipi. En nous montrant de vieilles photos d'époque, il glisse: «Les gens pensent que les micros sont un phénomène nouveau, mais c'est faux. C'est vieux comme le monde. En 1900, il y avait trois microbrasseries ici, à Sherbrooke!»

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Lion's Pub

2, rue College, à Lennoxville

www.lionlennoxville.com

Les bières de cette microbrasserie sont offertes dans certains dépanneurs de Lennoxville et de Sherbrooke, au Boni Soir Peluso (2500, Rachel Est) et au marché Atwater. Pour une liste complète de tous les points de vente, consultez le site (en anglais) de la microbrasserie.

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