Quelles sont les destinations les plus populaires ? Lorsqu'on pose la question à plusieurs voyagistes, la réponse fuse instantanément : la Tunisie et l'Espagne.

«En ce qui concerne la Tunisie, il n'y a pas de mystère : nous offrons un forfait d'un mois dans un quatre étoiles à Hammamet pour 1729 $», remarque France Gauthier, directrice des ventes de Rêvatours. «Les prix y défient toute concurrence.» Quant à l'Espagne, Colette Girard, directrice des ventes de Jolivac, fait observer que c'est surtout la Costa del Sol qui fait recette. «À cause du climat, bien sûr, mais aussi du grand nombre de sites exceptionnels situés à proximité, qui offrent autant de possibilités d'excursions : Grenade, Séville Cordoue, Ronda, Tanger, et j'en passe, lance-t-elle. Nous commercialisons également d'autres régions espagnoles : les Baléares, les Canaries et la Costa Brava. Mais la demande pour ces endroits reste marginale.»

C'est d'ailleurs la force de la demande pour la Costa del Sol qui a incité Vacances Transat, qui se définit comme un « voyagiste de masse », à programmer des vols sur Malaga (à partir du 26 janvier) et à les compléter par un volet hôtelier destiné à la clientèle des «longs séjours».

Cette année, on constate une remontée du Maroc, pays qui traînait un peu de la patte, après avoir caracolé dans le peloton de tête des destinations longs séjours, pendant les années 90. «La demande n'atteint pas encore le même niveau que pour la Tunisie, mais il y a rattrapage», note Claude St-Pierre, directeur général de Tours Chanteclerc. Chez Aviatours, par exemple, on met l'accent sur la station balnéaire d'Agadir, située dans le sud du Maroc. «C'est une destination qui se prête d'autant mieux aux séjours d'hiver que le climat y est un peu plus chaud que sur la Costa del Sol ou en Tunisie», remarque Patrice Malacort, président d'Aviatours.

Autre destination «qui monte» : l'Italie. Tout comme pour la Costa del Sol, le nombre de sites accessibles en une journée depuis la Côte amalfitaine ou de son prolongement dans le golfe de Salerne (la région d'Agropoli) est impressionnant : Capri, Naples, Ischia, Paestum, Pompéi, toutes les stations de la Côte amalfitaine elle-même...

La Côte d'Azur reste aussi un des chevaux de bataille de la programmation d'hiver, mais Claude St-Pierre remarque encore que la demande jadis très vigoureuse pour cette région a baissé. «Il y a des vogues , dit-il. Il y a des habitués qui ont séjourné dans un endroit trois ou quatre années consécutives et qui décident de s'essayer ailleurs. Mais il faut aussi observer que l'offre se modifie, sur la Côte d'Azur. Les immeubles d'appartements, qu'affectionnent les Québécois, sont de plus en plus remplacés par de l'hôtellerie traditionnelle.»

Le Portugal, un temps très populaire, continue à se vendre. Mais la demande est freinée par l'absence d'une liaison aérienne directe.

Pendant les années 90, les grossistes actifs dans le créneau tentaient de varier les programmations en lançant de nouvelles destinations : Malte, Chypre, la Grèce et, plus récemment, la Croatie, si populaire en été. Avec des succès mitigés. Rêvatours, qui a exploité pendant plusieurs années un important programme hivernal sur la Grèce, a rayé cette destination de sa brochure (du moins pour les séjours, pas pour les circuits). «Il y a des destinations, comme la Croatie ou Malte, qui se vendent très bien l'été en circuit, mais qui ne suscitent pas une demande conséquente pour les séjours d'hiver», remarque Claude St-Pierre.

Cette année, un grossiste comme Sélim Tours tente de lancer la Turquie et, plus précisément, la station balnéaire d'Antalya, dans le sud du pays. «La région est magnifique et le produit se prête très bien aux longs séjours d'hiver, mais la clientèle n'accroche pas facilement», déplore Sélim Hentati, président du voyagiste.

Un grossiste comme Aviatours mise sur des combinés : Maroc/Costa del Sol, Maroc/Tunisie, Maroc/Égypte. «Nous sommes persuadés que la demande pour les combinés prendra de l'ampleur dans le cas des longs séjours», estime Patrice Malacort, président d'Aviatours. «Beaucoup de gens commencent à s'ennuyer après deux semaines passées au même endroit : ils ont vu ce qu'il y avait à voir et fait toutes les excursions qui les intéressaient. Et cela ne coûte pas plus cher de faire deux destinations : à peine un léger supplément pour défrayer les transferts, qui est vite amorti lorsqu'on l'étale dans le prix du séjour.»

Des «longs séjours» pas si longs que ça

«Longs séjours»... l'étiquette héritée de l'époque où les retraités passaient les quatre ou cinq mois d'hiver en Floride ne reflète plus vraiment la réalité. À tel point qu'un des ténors de la spécialité, Tours Chanteclerc, l'a laissée tomber pour sa brochure d'hiver. «Beaucoup de nos clients partent encore en Tunisie, sur la Costa del Sol ou au Maroc pour deux ou trois mois, mais depuis trois ans, nous traitons les demandes d'une clientèle moins âgée, qui achète des forfaits de 9, 12 ou 17 jours», explique Claude St-Pierre, directeur général du voyagiste. «Il s'agit souvent de travailleurs autonomes qui, entre deux contrats, décident de prendre quelques jours de vacances sous des climats plus cléments.»

Selon France Gauthier, directrice des ventes de Rêvatours, toutes clientèles confondues, la durée moyenne des forfaits commercialisés sous l'étiquette «longs séjours» se situe aujourd'hui entre trois et quatre semaines, même si les demandes pour des séjours plus longs sont encore nombreuses.

On pourrait se demander pourquoi cette clientèle en rupture d'hiver ne choisit pas de séjourner dans les Caraïbes ? Quelques voyagistes - c'est le cas de Vacances Sunwing et de Caribe Sol - prévoient des séjours dont la durée dépasse le cadre habituel des forfaits d'une ou deux semaines. Sunwing, par exemple, offre des forfaits de trois à six semaines dans six stations balnéaires cubaines et deux destinations mexicaines. Mais la demande pour ces produits reste marginale.

«Nous ne détenons pas de réponse sûre, mais nous présumons que les clients qui achètent l'Espagne, la Tunisie ou l'Italie en hiver sont des personnes qui ont séjourné à plusieurs reprises dans les destinations soleil et qui optent désormais pour des destinations plus «culturelles», dit Claude St-Pierre. «Quand on va à Cuba ou en République dominicaine, on reste généralement toute la semaine dans son tout-inclus. Nous savons que nos clients qui séjournent dans un complexe hôtelier italien, espagnol ou tunisien font énormément d'excursions. Ils visitent et prennent réellement le pouls du pays.»

À cet égard, Colette Girard, directrice des ventes de Jolivac, observe une tendance à troquer les excursions pour des circuits. «Les agences locales qui vendent des excursions d'une journée recrutent leurs clients partout dans la station , explique-t-elle. On se retrouve donc presque toujours avec des voyageurs de plusieurs nationalités dans l'autocar et les explications sont dispensées en trois, voire quatre langues, ce qui devient lassant. Aujourd'hui de nombreux clients achètent un circuit d'une semaine en Tunisie ou en Andalousie. Ils peuvent choisir des circuits uniquement guidés en français. Ils le font au début ou en cours de séjour et, le reste du temps, ils sortent peu de la station où se trouve leur hôtel.»