Des femmes conquérantes, la tête haute, perchées sur des hauts talons, et souvent nues: les photographies d'Helmut Newton sont reconnaissables au premier coup d'oeil et reflètent une époque, la révolution sexuelle des années 1970 et la conquête de bastions masculins par les femmes.

À travers plus de 200 clichés réunis au Grand palais à Paris, pour la première rétrospective depuis la mort accidentelle du photographe en 2004, ce sont toutes les facettes de ce provocateur que son épouse et assistante June Newton, commissaire de l'exposition avec Jérôme Neutres, a voulu montrer.

«La femme dans le travail d'Helmut Newton est puissante et dominatrice, le maître d'un monde sans homme», résume Jérôme Neutres. «Il a commencé à travailler dans les années 1960, aux débuts des combats féministes», et photographie toute sa vie de belles femmes, mannequins ou célébrités, dans des positions souvent érotiques, voire provocatrices. C'est à Paris qu'il se fait remarquer en réalisant ses premières photos de mode aux mises en scène étonnantes pour les magasines Vogue et Elle notamment. Il commence à déshabiller ses mannequins dans les années 1970, comme cette photo d'un duo constitué d'une femme en smoking Saint Laurent aux cheveux tirés, avec à son bras une femme nue à l'exception d'une voilette et de ses talons hauts, dans une rue du Marais. Il explore le concept pendant les années 1980 du «Habillé/déshabillé», où des mannequins posent habillées en train de marcher dans un studio l'air décidé, mains sur les hanches, puis, sur un autre cliché, nues, avec leurs hauts talons, dans la même position. Des corps sculpturaux, mais féminins avec des seins et des hanches, présentés pour l'exposition sur des tirages à taille réelle qui impressionnent le visiteur.

Exposés en miroir de ces nouvelles amazones, «Les Grands Nus», inspirés des photos d'identité judiciaire de terroristes allemands. «J'en ai réalisé 21, par intermittence, jusqu'en 1993 (...) J'ai fini par abandonner en 1990 parce que l'exercice était techniquement trop difficile», expliquait Helmut Newton dans Autobiography paru en 2003.

Souvent présenté comme le précurseur du «porno-chic», Helmut Newton peut choquer qui ne connaîtrait pas son goût pour la provocation, son humour parfois scabreux qui le fait jouer avec les codes d'une époque: la mode, l'argent, le sexe.

«J'adore la vulgarité. Je suis très attiré par le mauvais goût, plus excitant que le prétendu bon goût qui n'est que la normalisation du regard», disait Helmut Newton, l'enfant juif de Berlin, exilé à Singapour puis en Australie, avant de vivre en Europe. «Les mouvements sado-maso, par exemple, me paraissent toujours très intéressants: j'ai en permanence dans le coffre de ma voiture des chaînes et des menottes, non pas pour moi mais pour mes photos», plaisantait-il.

Une approche sulfureuse qui n'a pas freiné les nombreuses célébrités dont il a tiré le portrait comme les actrices françaises Isabelle Huppert, très touchante dans son peignoir blanc et la très belle Catherine Deneuve, sensuelle dans son déshabillé noir.