La chanson Harmonie du soir à Châteauguay, un succès qui date du premier album de Beau Dommage, paru en 1973, évoque le calme paisible et naturel de cette banlieue au sud-ouest de Montréal. Quatre décennies plus tard, cette balade garde tout son sens. Malgré l'étalement urbain, la nature n'a pas complètement cédé sa place à Châteauguay.
Dans l'île Saint-Bernard, un territoire préservé situé au confluent de la rivière Châteauguay et du lac Saint-Louis, c'est encore plein d'oiseaux qui chantent «leurs chansons d'oiseaux», comme le disait, en toute simplicité, la composition de Robert Léger. C'est que depuis 1993, le refuge faunique Marguerite-D'Youville protège presque la totalité de cette île de 223 hectares. Il s'agit d'un des milieux les mieux conservés de l'archipel de Montréal.
Dans cette fenêtre ouverte sur la nature, les randonneurs trouvent 8km de sentiers, larges et facilement accessibles, circulant à travers six écosystèmes: marais, érablière à caryers, chênaie, prairies, marécages et rives. L'île abrite notamment deux forêts reconnues comme écosystème forestier exceptionnel par le ministère des Ressources naturelles du Québec et sert de milieux de vie à 22 sortes de mammifères, dont le cerf de Virginie et le coyote. Elle est aussi reconnue comme une importante halte migratoire pour la sauvagine.
Buffet pour les oiseaux
La réputation du refuge auprès des ornithologues n'est d'ailleurs plus à faire. À mi-octobre, canards colverts, canards noirs, grands hérons et aigrettes posaient généreusement devant les appareils photo. Les bêtes à plumes viennent se nourrir dans ces buffets à volonté que sont les immenses marais de l'île. Ces milieux humides se transforment, au printemps, en frayère pour une multitude de poissons, dont le grand brochet.
Depuis juin dernier, Héritage Saint-Bernard, l'organisme à but non lucratif qui gère les activités et assure la protection du refuge, propose un nouvel outil pour découvrir les lieux: les audioguides. Mettant en valeur son caractère naturel et historique, ils sont disponibles en location au pavillon de l'île au coût de 6$. Sont compris le lecteur numérique, les écouteurs et des jumelles. Onze stèles d'interprétation, situées aux principaux points d'intérêt de l'île, nous indiquent quand écouter les capsules d'info, d'une durée moyenne de deux minutes. Bien faites et divertissantes, elles enrichissent la visite.
Sandwichs et salades
Accessible à l'année, le refuge faunique ouvre ses portes tous les jours, du lever au coucher du soleil. L'entrée coûte 3,50$ par adulte. En hiver, c'est un paradis pour la raquette (dont on fait la location sur place). Les vents en provenance du lac Saint-Louis enneigent continuellement les sentiers, permettant aux raquetteurs de jouer dans les congères plutôt que de marcher sur une croûte. Les visiteurs profitent aussi d'un service de restauration sur place, le Café de l'île, qui propose des sandwichs et salades.
En avril dernier, la Ville de Châteauguay a acquis ce qu'on appelle le tertre, c'est-à-dire l'ancien domaine des Soeurs grises, qui était exclu de la réserve faunique. Depuis, Héritage Saint-Bernard travaille à trouver une nouvelle vocation aux lieux, où l'on trouve deux manoirs, l'un datant du XIXe siècle, l'autre construit en 1964.
Ce dernier servait jusqu'à tout récemment de lieu de retraite. On y trouvait 120 chambres disponibles en location, avec pension complète. Cet hôtel un peu vieillot fermera ses portes sous peu. «On va profiter de la saison hivernale pour lui donner une cure de jouvence», indique son nouveau directeur, Carl Champagne. La réouverture est prévue pour l'été 2012. À suivre.
En attendant, l'acquisition du tertre profite déjà aux randonneurs, qui peuvent dès maintenant se balader sur ce magnifique domaine. On peut y visiter un moulin à farine érigé vers 1686, un verger aménagé à la même époque, quelques bâtiments patrimoniaux et le cimetière des religieuses, tout en se régalant de splendides vues sur le lac Saint-Louis. Vous comprendrez pourquoi Marguerite D'Youville, fondatrice des Soeurs grises, avait été si charmée par l'endroit.