Hébergement rarissime, restaurants aux heures d'ouverture aléatoires, attractions touristiques qui ferment sans préavis... Voyager à Sept-Îles - et dans l'ensemble de la région de Duplessis - peut mettre les nerfs à dure épreuve.

Le grand responsable de ces maux de tête: le boom économique qui souffle sur la région. En effet, l'arrivée de grands projets miniers et la croissance économique importante des entreprises métallurgiques provoquent une crise de la main-d'oeuvre sans précédent dans la région.

Les PME et les entreprises de service ne peuvent rivaliser avec les hauts salaires offerts par les grandes industries. Résultat: le personnel manque dans les restaurants, qui se trouvent forcés de fermer le dimanche ou certains midis, même en pleine saison touristique. Le risque de se cogner le nez sur une porte fermée est élevé.

Au Casse-croûte du pêcheur, dans le port de Sept-Îles, la propriétaire, Corine Leblanc, a décidé de mettre le paquet pour recruter (et garder) ses employés. Elle les paye 18$ l'heure pour prendre les commandes et préparer poutines, guédilles et hamburgers. «Les filles travaillent cinq mois par année et reçoivent les mêmes indemnités de chômage que les pêcheurs pendant l'hiver. Certains me disent que je les paie trop cher, mais je n'ai pas le choix. Chaque midi, je sers 100 repas. Il faut que les employés fonctionnent à pleine vitesse.» Au restaurant McDonald's de Sept-Îles, le propriétaire a quant à lui fait appel à des travailleurs venus des Philippines.

Des entreprises touristiques doivent aussi mettre la clé sous la porte, faute de personnel qualifié pour assurer les activités. C'est le cas de l'entreprise Agaguk, de Havre-Saint-Pierre, qui offrait des excursions de kayak de mer dans l'archipel de Mingan.

Les îles sont considérées comme la Mecque du kayak de mer au Québec. La publicité de la région s'articule beaucoup autour de cette activité. Or, cet été, il est impossible d'en faire dans l'archipel, à moins de disposer de sa propre embarcation: personne en Minganie ne loue d'embarcations, personne n'offre des sorties guidées. Le néant.

À Parcs Canada, Marlène Arsenault, gestionnaire responsable de l'expérience du visiteur à la réserve de parc national de l'Archipel-de-Mingan, promet que la situation sera corrigée l'an prochain.

En attendant, il faut se contenter d'explorer les îles en canot pneumatique. Le hic: pour connaître l'horaire ou le trajet des croisières, c'est la croix et la bannière. Leurs sites internet ne sont pas à jour, les appels téléphoniques aboutissent dans des messageries vocales.

Pénurie de lits

Outre la crise de main-d'oeuvre, la région souffre aussi d'une pénurie de logements. Un «quatre et demie» à Sept-Îles peut se louer 1200$ par mois! Les travailleurs embauchés pour des projets à court terme, notamment dans la construction, emplissent les hôtels pour de longues périodes. Lors de notre passage, il ne restait plus une chambre libre à Rivière-au-Tonnerre, et ce, depuis des semaines. Et les propriétaires du seul hôtel du village ne savaient pas quand les travailleurs quitteraient les lieux.

À Sept-Îles, la situation pourrait s'améliorer avec la construction, près de la marina, d'un hôtel de 80 chambres avec balcon et vue sur la mer.

D'ici là, mieux vaut peut-être visiter la région en véhicule récréatif... La Côte-Nord est d'ailleurs l'un des derniers endroits au Québec où les roulottes et autres motorisés peuvent s'arrêter presque n'importe où - une halte routière, une plage - pour passer la nuit. C'est la façon la plus facile - et la plus agréable - de profiter de la nature, splendide et démesurée, de la région.