Des investissements de 258 millions. Des travaux d'infrastructures colossaux sur 140km de rails, dont le remplacement de 28000 traverses, la réparation de 22km de rails et l'ajout de 2500 wagons de roches. Après trois ans d'attente et de chantier, le Train touristique du Massif a effectué son voyage inaugural mardi dernier, entre le parc de la Chute-Montmorency, près de Québec, et La Malbaie, dans Charlevoix. LaPresse était à bord. Récit d'une croisière ferroviaire dans un Québec de carte postale.

Du blanc partout. Et de la lumière à profusion. C'est ce qui frappe d'emblée lorsqu'on monte à bord des voitures du tout nouveau Train touristique du Massif.

Achetées en 2009 par le Groupe LeMassif et son président (et cofondateur du Cirque du Soleil), Daniel Gauthier, les huit voitures Pullman qui desservaient jadis la banlieue de Chicago, ont été totalement métamorphosées. Les mezzanines sont disparues pour laisser place à de hauts plafonds. Les banquettes sombres sont parties. Les petites fenêtres ont été élargies au maximum. L'intérieur a été métamorphosé: murs blancs, lignes pures, banquettes d'un vert tendre avec appuie-tête de cuir couleur crème.

Rien pour accrocher l'oeil, pour le distraire de l'essentiel: le paysage. Pendant trois heures trente à l'aller, idem au retour, le fleuve dévoile ses plus beaux paysages derrière les larges fenêtres.

Au gré des marées, haute le matin, basse en soirée, le Saint-Laurent se fait tantôt plein, avec des vagues qui viennent presque lécher les rails, tantôt distant, révélant de longues plages humides couvertes de gros cailloux luisants.

Ce Saint-Laurent de carte postale, impossible de le voir ailleurs qu'à bord du train touristique. Surtout pas de la route, qui passe souvent à des kilomètres des rives, au creux des montagnes. Les rails se faufilent comme un mince ruban entre la falaise et l'eau. Le fleuve, le train, le vert des arbres. Rien d'autre, sauf parfois un cargo au loin.

Dans le doux roulis du train, on voit aussi défiler l'île d'Orléans et l'Isle-aux-Coudres, avec son phare rouge et blanc. Le cap Tourmente et ses battures. Le village de Saint-Irénée avec ses maisons multicolores et ses habitants sortis sur leurs balcons pour saluer notre passage. Le clocher de Baie-Saint-Paul. Puis le coeur de La Malbaie.

Au fil du parcours, l'ambiance à l'intérieur des locomotives se transforme. À des points précis (détectés par GPS), la musique (une création originale composée pour le train) change et la tablette iPad installée sur chaque table s'anime. On y voit défiler photos, vidéos, dessins ou animations qui, à la manière du Moulin à images de Robert Lepage, évoquent plus qu'ils n'expliquent. Pas de narration, ni de contenu didactique ici. On reste dans la poésie des images et de la musique, l'intention étant d'accompagner le paysage, pas de le supplanter.

Un exemple? En soirée, lors du passage dans un tunnel, l'écran s'illumine de la lumière de plusieurs chandelles, comme pour un souper romantique. Ailleurs, ce sont des photos sous-marines qui défilent. Plus loin, on présente des oeuvres d'art. Ou des vieilles photos de famille.

Le Manoir sur rail

Pour prolonger jusque dans l'assiette la découverte de la région de Charlevoix, le Groupe Le Massif a fait appel au chef Jean-Michel Breton, du Fairmont Le Manoir Richelieu. Il a élaboré un menu gastronomique qui fait la part belle aux produits charlevoisiens: foie gras de canard de La ferme Basque, fromage de la fromagerie Saint-Fidèle, pleurotes de Champignons Charlevoix, tomates des Serres Lacoste.

Le défi était de taille pour le chef Breton: préparer des menus diversifiés, raffinés et savoureux, qui ne perdront rien dans la préparation ou le transport (ils sont cuits en partie au Manoir, puis parachevés dans les espaces cuisine de chaque wagon).

Le résultat est un pur plaisir (du genre qui vous hante pendant des jours): les plats sont délicieux, présentés avec tout le raffinement habituel du Manoir. Les ravioles de mascarpone à l'huile de truffe, les gros macarons aux petits fruits, le «milk shake» de tomates et poivrons rôtis sont autant de bonheurs qu'on ne peut savourer qu'à bord, puisque tous ces plats sont préparés exclusivement pour le train.

Depuis hier et jusqu'au 16 octobre, Le Massif offre 27 départs entre le parc de la Chute-Montmorency et La Malbaie. Les départs se font à 10h avec arrivée à La Malbaie à 13h30. Après une escale de trois heures, le train repart vers Québec, pour une arrivée à 20h. Un dîner trois services et un souper gastronomique quatre services sont servis à bord. Prix par personne: 249$ pour les adultes, 199$ pour les 6 à 17 ans, gratuit pour les 5 ans et moins.

Le tarif est le même, peu importe que vous soyez assis côté montagne ou côté fleuve. Un conseil: demandez qu'on vous place, si possible, côté fleuve. La vue y est vraiment plus belle, tant à l'aller qu'au retour.

Selon les disponibilités, il est possible de dormir à La Malbaie et de faire le trajet de retour le lendemain. Il faut toutefois savoir que les billets s'envolent vite: mardi, Le Massif avait atteint 75% de ses objectifs de vente.

Pendant les week-ends de février, mars et avril, le Massif proposera 16 voyages entre Québec et La Malbaie, dont certains avec arrêt au pied de la montagne de ski. Ceux qui le souhaitent pourront descendre pour profiter d'une journée sur les pentes. Les autres poursuivront le trajet jusqu'à La Malbaie. Les départs se feront plus tôt (à 8h) et les repas servis différeront: petit-déjeuner et souper. Prix: 229$ par adulte, incluant le billet de remonte-pente. Huit wagons, dont deux adaptés pour les personnes à mobilité réduite, seront alors prêts (contre quatre cet automne). Skis et bagages seront transportés dans des wagons distincts.

Pour en savoir plus:

Le train du massif

www.lemassif.com/train