Des champs et des forêts à perte de vue. Le mont Ham et les panoramas que l'on peut observer, contemplatif, à son sommet, comme si le temps s'arrêtait lui aussi pour regarder au loin. L'étang Burbank et sa biodiversité exceptionnelle. Les raisons ne manquent pas pour visiter le joli patelin de Danville. Tour d'horizon.

Marie Vaillancourt est restée interloquée un moment. Bouche bée devant une question pourtant toute simple. Pourquoi? Pourquoi être revenue vivre à Wotton, bled minuscule du fin fond de l'Estrie, après des années passées dans le trépidant Montréal?

Bouche bée, donc, alors qu'elle a le verbe facile, la fromagère, on le comprend tout de suite en débarquant chez elle, dans sa belle «Maison Grise» (qui est en fait d'un joli bleu pâle). Bouche bée parce que la réponse était limpide: les paysages. Les gens. Une évidence.

Les paysages, oui. La MRC des Sources englobe les bas plateaux des Appalaches: c'est le pays des grandes côtes, des routes qui tuent le cycliste en le faisant grimper encore et encore sans le moindre virage pour y prendre un répit. De belles lignes droites qui n'en finissent pas de finir avec, à droite et à gauche, des champs rectilignes suivant les routes plutôt que les plans d'eau, souvenir de la colonisation des townships par les Américains fidèles à la couronne d'Angleterre au XVIIIe siècle.

Mais les paysages ne sont jamais plus jolis qu'au sommet du mont Ham, 713 m d'altitude et une vue dégagée sur 360 degrés. Champs et forêts à perte de vue. C'est elle, cette belle montagne, qui nous attire d'abord dans la région.

Mais parce qu'elle n'est pas tout à côté de la maison, on s'attarde un peu aussi dans les villages et c'est là qu'on découvre «les gens» de Marie. D'abord à Danville, parce que c'est, de loin, le plus joli patelin d'un coin qui a mis du temps à se développer et où les villages sont encore épars. Normal, il a connu, lui, des jours plus fastes, au milieu du XIXe siècle, quand des moulins, des scieries, une tannerie s'y sont installés et qu'on a construit, encore et encore, de somptueuses maisons victoriennes.

Puis, le chemin de fer l'a relié à Montréal et, incidemment, au reste du monde. L'arrière-arrière-grand-père de Marie participait chaque semaine au «Cheese Day», le marché qui permettait aux éleveurs de la région d'expédier le cheddar produit avec leurs surplus de lait jusqu'en Angleterre. «C'était quelque chose», remarque Mme Vaillancourt, une pointe de fierté dans la voix et une photo d'époque à la main.

Le retour des jeunes

Les choses ont bien changé, mais cet après-midi-là, la fromagère s'en allait justement vendre ses crottins de chèvre au marché public niché dans le beau Café du Flâneur de Saint-Camille qui, pour la première fois cette année, restera ouvert tout l'hiver: on ressent les effets de la création de la coopérative de solidarité des Fermettes du Rang 13, qui a permis à une vingtaine de familles de s'installer ici, un projet qui a fait parler de lui jusque dans les pages du Monde diplomatique.

«La situation a deux facettes: d'un côté, la fermeture de la mine Jeffrey [à Asbestos, en 2011] a fait très mal dans la région, mais de l'autre, on voit beaucoup de jeunes venir s'installer ou se réinstaller, des projets pour dynamiser la communauté. Les gens sont tellement accueillants», explique Marie Vaillancourt.

À Danville, on ressent cette même belle énergie à La Mante du carré, un café en plein coeur du village qui vend et cuisine les produits de la région. Ou encore à la galerie des Nanas, où nous accueille une étudiante souriante pour en faire la visite, un mercredi après-midi d'octobre, expliquant au néophyte ce qu'est l'art insubordonné au féminin, un cousin de l'art brut, le seul présenté ici.

On a aussi fait des efforts, ces dernières années, pour mettre en valeur le mont Ham: il y a maintenant une aire de jeux pour les enfants, de l'hébergement, des sorties guidées et on a tenté un projet-pilote pour permettre aux randonneurs de venir, à l'occasion, avec un chien.

On comprend au fil des heures passées dans la région que Marie ait eu envie d'y revenir.

Photo Bernard Brault, La Presse

Danville est le plus joli patelin d'un coin qui a mis du temps à se développer et où les villages sont encore épars.

Que faire à Danville

Le mont Ham

Le mont Ham, c'est le trésor de la MRC des sources. La vue y est spectaculaire depuis le sommet que l'on atteint par les sentiers très bien balisés, de niveau intermédiaire à difficile. On l'aime en toutes saisons, même l'hiver - avec des crampons ou des raquettes - et l'automne, les sentiers n'étant pas trop boueux. On peut y dormir - en camping ou en chalet rustique - et pour la première fois à l'hiver, on y organisera des excursions guidées au clair de lune avec soupe chaude à l'arrivée, la belle idée.

Étang Burbank

Il ne faut pas juger l'étang Burbank à sa petite superficie, 1 km2, mais à la biodiversité exceptionnelle qu'il a à offrir. C'est le paradis des ornithologues. On y observe tout l'automne la migration de dizaines de milliers d'oies blanches: on en recensait plus de 80 000, au début de novembre! Mieux: le sentier de 3 km qui fait le tour du plan d'eau est accessible en fauteuil roulant ou avec une poussette. Ouvert à l'année. Gratuit.

Circuits patrimoniaux

La municipalité de Danville a élaboré trois circuits mettant en valeur divers aspects de l'architecture de ses plus belles ou plus importantes demeures. Les informations sont assez succinctes, mais permettent de mieux apprécier la valeur patrimoniale de la ville. On sera surpris d'apprendre que certaines maisons victoriennes, magnifiques, étaient commandées par catalogue et livrées en pièces détachées, par train: on est loin, très loin des maisons usinées contemporaines! Le guide Sur les pas de l'histoire est vendu (3,50 $) à la mairie et au bureau d'information touristique.

Fromagerie la Maison Grise

Marie Vaillancourt a repris, en 2008, la ferme de son père, assurant ainsi le prolongement des activités agricoles à la «Maison Grise» depuis quatre générations, qui existait avant même la fondation du village de Wotton! Avec son conjoint, Marco Dodier, elle élève quelque 500 chèvres et produit une dizaine de fromages caprins de style français, des classiques bien exécutés: crottins, bûchettes, faisselles, cendrés. On accueille les visiteurs même pendant la saison morte, à condition qu'ils préviennent la veille.

Photo Bernard Brault, La Presse

L'étang Burbank, à Danville, a une superficie de 1 km2.