Le train attend en gare à Senneterre, l'immense ville de La Vallée-de-l'Or d'à peine 3000 habitants. Des canoteurs remplissent le premier wagon de leur équipement.

Des jeunes amoureux d'origine africaine envoie la main à la mère de l'un d'entre eux. Une famille de quatre générations s'embrasse sur le quai avant de laisser les arrière-grands-parents partir en escapade avec une partie de leur descendance. Récits.

Le train reliant Senneterre à Montréal est dans une classe à part. Il ne compte que deux wagons, le premier pour les marchandises et le second pour les passagers. Malgré les nombreux arrêts en chemin, il est possible de débarquer ou de récupérer ses paquets venus de la « grand-ville » à des endroits presque aléatoires. 

Pour se rendre à Montréal, la durée prévue du voyage est de 12 heures. Mais il faut aussi tenir compte des arrêts plus ou moins fréquents. Et pour la majorité du trajet, on ne peut compter sur aucun service cellulaire. Nous sommes bien loin de l'atmosphère du train reliant Montréal à Toronto un matin de semaine, disons. Le bonheur.

Après le départ, il ne faut que quelques minutes pour que le train s'enfonce dans la forêt dense aux arbres courts.

Environ deux heures et demie après notre départ, les canoteurs approchent du cours d'eau à partir duquel ils comptent entamer leur périple d'une semaine pour retourner à leur voiture à Senneterre. Ils débarquent à « Dix », un arrêt offert sur demande seulement.

Un peu plus loin, le train s'arrête pour déposer la boîte de carton adressée à Alexis au crayon-feutre, sans adresse ni nom de famille. C'est son épicerie de la semaine commandée par téléphone ou par télécopieur en provenance de Senneterre.

C'est en discutant avec Béatrice et sa fille Victoire, venues de Kinshasa en République démocratique du Congo pour visiter l'autre fille et son mari congolais à Senneterre, que nous traversons l'immense réservoir Blanc de la rivière Saint-Maurice. Pendant de longues minutes, tout ce que nous voyons des deux côtés du wagon, c'est de l'eau. Beaucoup d'eau. Et la bordure n'est pas très large de chaque côté du chemin de fer. Tout autour, de petites cabanes en plus ou moins bon état sont installées près de la rivière. « Mais pourquoi ont-ils choisi de vivre ici ? Ce sont des pêcheurs ? », lance Béatrice. En effet, de nombreux camps de pêche et de chasse génèrent une bonne part de la fréquentation du coin.

Peu de temps après avoir passé le pont de la Rivière-du-Milieu, la famille Maheux atteint La Tuque, où les arrière-grands-parents, leurs petites-filles et arrière-petits-enfants iront passer « une petite vacance ».

Puis, c'est à Hervey-Jonction que Lucas, son père et sa copine descendent, avant de poursuivre leur chemin vers Québec. C'est aussi ici que Shirley et Louis Simpson débarquent pour rentrer à Lac-aux-Sables, dans la MRC de Mékinac.

En comptant tous les arrêts sur demande, il nous a fallu 14 heures pour faire le trajet Senneterre-Montréal. Certes, c'est plus du double du temps que cela nous aurait pris en voiture. Mais du côté des anecdotes et des paysages, ce train est manifestement un incontournable.

Photo Catherine Lefebvre, collaboration spéciale

Béatrice regarde sa fille et son mari avant de quitter Senneterre pour ensuite rentrer en République démocratique du Congo dans quelques semaines.

Photo Catherine Lefebvre, collaboration spéciale

Le deuxième et dernier wagon du train est réservé aux passagers.

LES CANOTEURS

En tout, ils sont 10. La plupart d'entre eux ne se connaissent pas et personne ne sait vraiment où il s'en va. Une chose est sûre, ils débarquent tous au même endroit - inconnu de plusieurs - pour entreprendre une semaine de canot. Dans le lot, il y a Adrienne et Frédérique qui aiment toujours aller canoter dans des endroits moins connus. Pour retourner au point de départ par les flots, le train est parfait, selon eux. 

SHIRLEY ET LOUIS SIMPSON

Derrière nous, il y a Shirley et Louis Simpson. Mariés il y a 56 ans hier, ils viennent d'aller visiter leur fille à Senneterre pour faire du camping en famille. Après Saint-Hubert et l'Europe, ils ont passé 30 ans à Val-d'Or, à l'époque où Louis était pompier pour les Forces armées canadiennes. Ils habitent maintenant sur la terre des ancêtres de Louis, à Lac-aux-Sables, pour profiter pleinement de leur retraite.

LUCAS 

À côté de Shirley et Louis, il y a le petit Lucas, 3 ans, son père Hugo et sa copine Isabelle. Ils viennent d'aller visiter grand-maman Margot à Lebel-sur-Quévillon. Et Lucas se souvient très bien ses vacances chez mamie. Puis, à travers la panoplie de divertissements électroniques disponibles, il n'y a rien de tel qu'un bon livre pour faire passer le temps en train.

LA FAMILLE MAHEUX

À l'avant du wagon, il y a Ange-Aimée et Henri-Louis Maheux. À 70 ans, ils sont les arrière-grands-parents de Lovely, 2 ans, et Thomas, 3 ans, ainsi que les grands-parents de Sabrina, la mère de Lovely, et Cynthia, la mère de Thomas. C'est entre autres pour célébrer l'anniversaire de Cynthia qu'ils vont passer quelques jours à La Tuque en famille. Pour eux, c'est le plus beau cadeau à leur offrir, tout en se faisant plaisir à eux-mêmes au passage.