Samedi dernier, bien des yeux étaient tournés vers Londres pour le mariage entre le prince Harry et l'actrice américaine Meghan Markle. L'occasion est belle pour planifier une journée oh so British, avec thé de l'après-midi, exposition à saveur londonienne ou visite d'une municipalité qui cultive avec vigueur son lien avec le Royaume-Uni.

Hudson, Angleterre-en-Québec

Hudson - Dereck Jones n'a pas assez de mains pour répondre à la demande. En ce samedi après-midi ensoleillé, le restaurant qui jouxte sa boutique, rue Main à Hudson, est presque plein à craquer.

Les clients sont attablés pour un afternoon tea (avec scones, crème Devonshire et petits sandwichs au concombre), un vrai déjeuner à l'anglaise ou des Bangers & Mash concoctés avec des produits directement importés du pays du prince Harry.

En effet, presque tout chez Clarence & Cripps provient du Royaume-Uni. Dereck Jones et sa femme Nicky Fisher sont à la tête de cette charmante boutique depuis quatre ans. Ils importent de leur pays natal tablettes de chocolat typiques (comme la Flake de Cadbury), sablés de chez Marks & Spencer, croustilles à parfum de Guinness, thé PG, marinade Branston... Même les épices utilisées pour la fabrication, à Saint-Louis-de-Gonzague, des saucisses Lincolnshire sont importées! Les papilles sont bluffées: on se croirait vraiment chez les Anglais.

Beaucoup d'expatriés britanniques ayant le mal du pays font un tour à Clarence & Cripps, mais le mot se passe aussi chez les voyageurs nostalgiques de leur séjour en Angleterre. La boutique et le restaurant connaissent une popularité certaine. D'où cette animation qui fait courir Dereck Jones depuis la matinée.

Il faut dire que ce jour-là, le marché Finnegan's a ouvert ses portes pour sa saison estivale, qui s'étirera jusqu'à la fin du mois d'octobre. Le marché aux puces tenu par la famille Aird attire tous les samedis, depuis plus de 40 ans, un flot de visiteurs. Le stationnement se remplit tôt; l'ambiance est bon enfant, entre les chasseurs d'aubaines, les fanas d'antiquités et les habitués qui passent d'une table à l'autre pour se saluer.

Julia Schroeder est au marché tous les samedis depuis six ans pour vendre ses pops glacés, faits à la main, à Hudson même, à partir de fruits frais. Elle a ses clients fidèles qui réclament leurs parfums favoris à chaque visite: hibiscus et mûres, limonade à la lavande, ananas romarin... «Il y a un côté très personnel au marché, explique-t-elle. C'est comme une communauté. Aussi, la marchandise est vraiment de qualité et les vendeurs mettent beaucoup de coeur dans ce qu'ils font.»

C'est le cas de Julie Saint-Gelais, qui propose macarons et sablés maison, mélange de thés de son cru, porcelaines délicates et antiquités. D'autres vendent des poêles en fonte remises à neuf, des cabanes à oiseaux faites à la main, des roses séchées en bouquets, des bibelots en parfait état... Il y a ici de vrais trésors qui ne demandent qu'à être trouvés.

Même constat à la vieille grange de 2 Barns Owls, au coeur de la ville d'Hudson. Cette galerie d'art déjantée et accueillante propose des oeuvres signées par plusieurs artistes de la région, de Montréal et parfois de l'Ontario. Les artistes sont souvent sur place pour discuter; certains soirs, on y présente des spectacles musicaux sous le toit de planches.

Hôtel à l'anglaise

Patricia Wenzel et David Ades ont eux aussi trouvé un trésor à Hudson, sans qu'ils l'aient vraiment cherché. Ils ont trouvé une nouvelle passion: celle d'hôtelier et de restaurateur. Habitué de fréquenter depuis plus de 30 ans l'auberge Willow Inn, sise sur un magnifique terrain bordant le lac des Deux Montagnes, le couple a appris avec déception la fermeture de l'établissement en novembre 2016. «J'ai posé un peu trop de questions; je me suis mis le bras dans l'engrenage», dit en rigolant David Ades.

Pendant un an, ils ont travaillé d'arrache-pied sur le bâtiment, tant à l'extérieur qu'à l'intérieur, pour permettre une ouverture graduelle: le restaurant en octobre dernier, l'hôtel il y a deux semaines à peine.

Le toit de métal a été refait en entier, la cheminée de pierres vieille de 200 ans a été convertie au gaz naturel, les planchers sont désormais faits de chêne huilé... Surtout, les chambres ont été restaurées et redécorées avec une touche britannique (à preuve, le tapis à motif tartan des couloirs). Et le restaurant a pris les allures d'un chic gastro-pub à l'anglaise, avec banquettes de cuir capitonnées et vue imprenable sur le lac et les bateaux qui effectuent la traverse Oka-Hudson.

Le menu du chef Shaun Hughes - un enfant d'Hudson qui a roulé sa bosse notamment chez Joe Beef à Montréal - se veut aussi d'inspiration anglaise. Dans le bon sens du terme, précise Patricia Wenzel, elle-même d'origine anglaise.

«Avant, les Anglais étaient connus pour leur mauvaise cuisine. Ce n'est plus vrai aujourd'hui. On trouve à Londres et dans les régions anglaises une cuisine exceptionnelle qui allie qualité et créativité».

À ce chapitre, la chaudrée de poisson du chef Hughes est particulièrement réussie, avec son bâtonnet de poisson croustillant et son pétoncle poêlé, arrosés d'un riche bouillon crémeux. On offre aussi le typique Welsh Rarebit (épinards à la crème) pour le brunch du week-end ou l'incontournable tarte boeuf et rognons (steak and kidney pie). Le fish'n chips est promis pour bientôt...

À l'auberge, les plats sont préparés à partir d'ingrédients locaux et le menu évolue au gré des saisons. Une serre et un potager devraient d'ailleurs s'ajouter sous peu aux installations du Willow Inn, pour fournir la cuisine en produits frais.

Une histoire récente

Avec ces nombreuses adresses inspirées de l'Angleterre, on pourrait croire que l'histoire d'Hudson est intimement liée à celle de la mère patrie. Or, il n'en est rien, selon Maben W. Poirier, fondateur de la Société historique d'Hudson, qui gère le Musée d'Hudson. «Le territoire était occupé par des francophones avant la Conquête de 1759-1760, et ce, jusqu'en 1825.» Graduellement, jusqu'à la fin des années 70, les francophones ont quitté leurs terres, puis la ville d'Hudson au profit d'autres municipalités, comme Dorion. Ils ont été remplacés par des anglophones. «Mais ces derniers venaient du Canada anglais ou des États-Unis, pas d'Angleterre», explique M. Poirier. Certes, il y a bien eu des résidants importants dans l'histoire d'Hudson dont les origines s'enracinaient dans l'autre continent, comme Thomas Macaulay, né de père écossais et devenu président, en 1889, de la compagnie d'assurances Sun Life. «Mais la présence d'Anglais venus de l'Angleterre est un phénomène assez récent, et je serais surpris qu'Hudson compte aujourd'hui plus de 20 familles originaires d'Angleterre», ajoute M. Poirier.

Qu'importe, cette communauté est bien vivante. Assez pour présenter tous les deux ans une exposition de vieilles voitures anglaises, rue Main. Cette année, le rassemblement est prévu pour le 27 mai.

Photo Bernard Brault, La Presse

Dereck Jones (notre photo) et sa femme Nicky Fisher sont à la tête de la boutique Clarence & Cripps depuis quatre ans.

Thé à l'anglaise: Pour petites et grandes royautés

Un détail suffit parfois pour gagner le coeur d'un enfant.

À l'hôtel Fairmont Le Reine Elizabeth, les petits princes et princesses ont droit à un service de thé à l'anglaise où, imaginez! on leur sert des biscuits à la gelée avec leur initiale tracée au chocolat. Mathilde et Zoe, 12 ans et 5 ans respectivement, ont remarqué ce détail bien avant de s'extasier devant le plateau étagé d'où débordaient sandwichs, tartelettes, scones et autres macarons.

«Ils savaient qu'on viendrait?» Bien sûr. Les réservations sont obligatoires pour le service de thé d'après-midi au restaurant Rosélys du Reine Elizabeth. Mais pourquoi être aussi pragmatiques? «C'est le traitement qu'on réserve aux princesses.»

Depuis trois ans, l'hôtel montréalais propose une version pour enfants de son on ne peut plus typique thé à l'anglaise. Parmi l'assortiment de 15 thés en feuilles offerts, certains contiennent très peu ou pas du tout de théine. Tous sont présentés dans de petits pots pour permettre de choisir, au nez, le parfum souhaité.

Ainsi Mathilde choisit un thé vert avec morceaux de papayes et de fraises, pétales de rose et camomille. Zoe opte pour un thé blanc qui fleure étonnamment le raisin, avec pétales de bleuets et camomille. Toutes deux auraient aussi pu choisir un chocolat chaud... Les deux reines de la table (les adultes!) y vont pour plus corsé, soit un Darjeeling biologique et un thé chaï épicé.

Chacune reçoit sa théière personnelle et un petit sablier pour dicter le temps d'infusion. Les tasses et les soucoupes de porcelaine sont fleuries, comme il se doit. On compare les coloris. Zoe préfère la tasse jaune, Mathilde, la verte.

Quand arrivent les bouchées salées et sucrées, les biscuits initialisés volent la vedette, mais rapidement, les regards se tournent vers les plateaux étagés. Un pour les petites, un pour les grandes. Les bouchées sucrées sont les mêmes sur les deux plateaux, signés par le chef pâtissier Maître Ouvrier de France Jean-Marc Guillot. Tartelettes aux petits fruits, biscuits avec crème de citron, macarons aux carottes, biscuit au café avec fondant au chocolat et mousse de lait...

Les scones cuits sur place sont encore chauds. La crème Devonshire et les confitures attendent sur la table.

Pour le salé, le chef a réinterprété les classiques britanniques: pain aux concombres, tartelette sablée avec radis et oeuf mimosa, pain au saumon fumé et beurre d'algues. Les princesses ont droit notamment à des minisandwichs au fromage grillé et des toasts au beurre d'érable et à la confiture.

Les petites mains butinent d'assiette en assiette. Salé, sucré, sucré, salé, dans l'ordre et, surtout, le désordre. C'est la fête. «Ce n'est pas un thé, c'est un souper», lance Mathilde, observatrice. Zoe ne réplique pas, trop occupée à se lécher les babines de tout le sucre ingéré.

Les grandes ne sont pas en reste. Surtout quand, pour souligner l'évènement, le thé devient royal, avec une coupe de champagne. Il fait bon d'être une reine et une princesse, ne serait-ce que pour un après-midi...

Autres thés d'après-midi

Cantons-de-L'Est: Route des thés des Cantons-de-l'Est

Pour la quatrième année, cinq établissements des Cantons-de-l'Est sont regroupés pour former la Route des thés. Le musée Beaulne de Coaticook, le Centre culturel et du patrimoine Uplands de Lennoxville, le musée Colby-Curtis de Stanstead, le Salon de thé Scott à Scottstown et l'auberge La Chocolatière de North Hatley proposent chacun une interprétation personnelle du célèbre thé à l'anglaise. Costume d'époque à Lennoxville, touche écossaise à Scottstown: à chacun de choisir son thé! L'horaire varie selon l'établissement.

www.chemindescantons.qc.ca/route_des_thes

Gatineau: Salon de thé Mackenzie-King

Au coeur du parc de la Gatineau, dans le chalet Moorside de la maison de campagne du premier ministre Mackenzie King, l'heure du thé est résolument inspirée des traditions britanniques. Côté salé: sandwichs au concombre, au saumon fumé ou aux oeufs mayonnaise. Côté sucré: scones maison, confitures et crème caillée, servis avec un thé en feuilles bio. L'été, on peut manger en terrasse, dans le cadre enchanteur des jardins du domaine. Les fins de semaine, puis du mercredi au lundi à compter de juin.

tandco.ca

Québec: Château Frontenac

Avec l'ouverture cette semaine de l'exposition Ici Londres, au Musée de la civilisation de Québec, le Fairmont Le Château Frontenac a renouvelé la présentation de son thé d'après-midi en ajoutant quelques clins d'oeil à l'Angleterre. Des drapeaux Union Jack pourraient bien pousser autour des créations du chef Stéphane Modat... Sinon, le menu reste le même: inspiré des traditions britanniques, mais composé de bouchées salées et sucrées totalement réinventées et faites entièrement de produits locaux. Une sucette au bleu d'Élizabeth, my dear? Le samedi seulement, puis du mardi au samedi à compter du 26 juin.

www.fairmont.fr/frontenac-quebec

Montréal: Le Parloir

Ce salon de thé du Plateau Mont-Royal est célèbre pour ses scones, faits à la main par la propriétaire Sylvie Marchand. Mais il y a plus. Ici, on retrouve du canard confit et du foie gras sur les bouchées salées du service de thé. Les bouchées, certaines maison, d'autres faites par des pâtissiers montréalais (dont le Point G), sont servies sur des plateaux étagés, comme il se doit. Pour boire: plus de 20 thés parmi lesquels choisir. Du mardi au dimanche.

www.facebook.com/Le-Parloir-1459037220994915

Montréal: Burgundy Lion

Depuis octobre, le pub du quartier Saint-Henri propose sa version revisitée du thé de l'après-midi. Offert sur un fond de musique lounge dans le jardin d'hiver tout vitré, loin des télés qui diffusent le soccer en boucle niveau pub, le thé compte deux services sur plateau étagé: un salé et un sucré. Tout est fait sur place, jusqu'à la marmelade. Le thé à l'anglaise est servi le dimanche.

www.burgundylion.com

Photo Bernard Brault, La Presse

À l'hôtel Fairmont Le Reine Elizabeth, les petits princes et princesses ont droit à un service de thé à l'anglaise.

Londres, l'expo

Le musée de la Civilisation de Québec a inauguré la semaine dernière une toute nouvelle exposition consacrée à la capitale britannique.

Ici Londres dresse un portrait de l'effervescence créative de la ville, de 1950 à aujourd'hui. Au coeur de la salle principale, une maquette représentant Big Ben et le palais de Westminster sert de carrefour pour découvrir les quartiers créatifs que sont Soho, Chelsea et East End, ainsi que des lieux phares comme Whitechapel Gallery, Southbank Center et les écoles d'art. Le parcours multisensoriel permet de (re)découvrir cette ville de tous les contrastes, entre conformité et excentricité, entre tradition et innovation.

Plusieurs objets ont été prêtés par des institutions londoniennes, dont le musée Victoria & Albert, le Tate Britain et le Musée de Londres.

À savoir: Geneviève Borne prête sa voix à la narration de l'application qui accompagne l'exposition. À télécharger avant la visite.

Jusqu'au 10 mars 2019

www.mcq.org

PHOTO FOURNIE PAR LE MUSÉE de la CIVILISATION

L'exposition Ici Londres aborde la créativité culturelle de la capitale anglaise.