Rien de tel qu'un voyage de pêche pour changer d'air, se ressourcer et profiter de la nature. Pierre Gingras présente trois pêcheurs, qui racontent leurs plus beaux souvenirs de pêche...

Médecin, Michel Brabant pêche seulement à l'occasion. Il sort rarement sa canne plus d'une fois par année, une dizaine de jours tout au plus, parfois moins. Membre de l'équipe du service de médecine des toxicomanies du CHUM, il privilégie les destinations nordiques et lointaines, à partir de Kuujjuaq ou encore de Schefferville.

«Ces vacances me permettent de décompresser plus rapidement, explique-t-il. C'est incroyable! L'avion vous dépose au bout du monde et repart. Puis, c'est le silence absolu, les paysages dépourvus d'arbres, une beauté unique. Je me sens hors du temps.»

Sans être un grand mordu de la pêche, il apprécie le fait de passer des heures en cuissardes à avancer dans l'eau le long de la rive en quête du monstre dont il rêve. «C'est un plaisir fou de prendre de la truite, de la ouananiche et surtout de l'omble chevalier, de loin mon poisson préféré en raison des difficultés pour le faire mordre à la mouche, de sa combativité et de sa chair exquise. La pêche est bonne, les poissons de bonne taille, moins toutefois qu'on l'imagine!»

D'ailleurs, le pêcheur insiste sur le fait qu'en dépit des kilomètres parcourus et des sommes investies, le poisson n'est pas toujours au rendez-vous. Mais le plaisir n'en est pas moins grand.

«Je me souviens d'un endroit où la truite ne mordait pas. Notre chalet était situé à 20 ou 25 m de la rivière. Or, pendant toute une nuit, des centaines et, probablement des milliers de caribous ont contourné notre chaloupe stationnée sur la rive pour poursuivre leur périple. Nous n'avons pas fermé l'oeil à cause du clapotis. C'était fascinant. Trouvez-moi un seul endroit au monde où une chose pareille peut se produire.»

Michel Brabant a aussi en mémoire cette poursuite d'une heure à la rencontre d'une harde de boeufs musqués, au lac Bérard, à environ 140 km au nord-ouest de Kuujjuaq. Finalement, avec son guide, il a pu approcher à près de 100 m d'une quarantaine de bêtes pour les observer à loisir, de très jeunes comme de très vieux mâles. «Jamais je ne vais oublier ça», dit-il.

Il se souvient également d'un séjour sur le bord de la rivière Aux Feuilles, non loin de la mer, toujours dans la baie d'Ungava. La pêche avait été médiocre, les conditions d'hébergement, épouvantables. Mais là encore, le paysage de cette vallée peuplée de caribous et de lagopèdes était d'une beauté incomparable, insiste-t-il.

Michel Brabant apprécie autant le côté contemplatif que sportif de ses expéditions. Bien sûr, l'objectif ultime reste le poisson. Son expérience la plus marquante à cet égard a eu lieu sur la rivière Napeu Kainiut, au nord-est de Schefferville.

«Nous devions marcher une bonne heure pour accéder à un rapide très large. C'était la place de l'omble chevalier, des poissons d'environ 18 à 20 pouces de longueur qui mordaient juste en amont du rapide. Ils connaissaient le truc. Dès qu'ils étaient ferrés, ils se laissaient porter par l'eau, ce qui nous obligeait à courir sur la rive à toute vitesse avec nos grandes cuissardes, entre les roches, sur 50 ou 100 mètres, pour éviter que le fil ne se brise. Difficile de connaître une plus grande excitation de pêche. Et vous n'avez pas le temps de penser aux myriades de mouches noires!», raconte-t-il.

Malheureusement, les deux sites nordiques les plus appréciés par M. Brabant ne sont plus accessibles aujourd'hui.

Ils ont été loués à des sociétés d'exploration minière.