Plus important projet de mise en valeur du patrimoine industriel en une décennie au Québec, le musée Boréalis, qui vient d'ouvrir ses portes à Trois-Rivières, redonne vie de façon spectaculaire à une ancienne usine de filtration de la Canadian International Paper (CIP), jadis la plus importante usine de pâtes et papiers du monde, en y présentant des expositions et des expériences multisensorielles.

La nouvelle institution, qui a coûté près de 8 millions, se situe au confluent de la rivière Saint-Maurice et du fleuve Saint-Laurent, dans un lieu absolument magnifique. Juste pour son emplacement stratégique offrant des vues spectaculaires, ce centre d'histoire de l'industrie papetière vaut le détour.

Mais il y a plus. Le musée occupe un bâtiment datant des années 20, qui a été reconverti en musée sans en dénaturer la nature. La brique rouge si caractéristique de l'époque, les vieilles poutres métalliques et la tuyauterie d'origine sont encore en place. L'endroit servait autrefois à la filtration de l'eau pour blanchir le papier que l'on fabriquait à la CIP, usine qui a définitivement fermé ses portes en 2000 et a complètement été rasée depuis.

Seul ce bâtiment a survécu, sauvé in extremis du pic des démolisseurs par monsieur le démolisseur lui-même, qui a eu la présence d'esprit d'avertir la municipalité de son énorme potentiel. «C'est à ce moment-là que s'est produit un déclic: voilà l'endroit idéal pour y déménager le Centre d'interprétation de l'industrie papetière, qui se cherchait de nouveaux locaux», indique Valérie Bourgeois, directrice de Boréalis.

Parcours en trois sections

Ce musée se divise en trois sections. La visite commence par l'exposition permanente, Racines et identité, qui nous fait revivre la glorieuse époque de l'industrie papetière, dont Trois-Rivières était la capitale mondiale. Des artefacts de la vie en forêt (godendart, cant hook, perche, etc.), un modèle réduit d'une véritable machine à papier ainsi que de nombreux documents audiovisuels, mettant en scène d'anciens travailleurs, bûcherons et draveurs, racontent cette saga.

Le musée délaisse par la suite l'aspect plus historique pour faire vivre des expériences à ses visiteurs. À la tour d'observation, accessible par une passerelle extérieure, les visiteurs s'avancent dans le Saint-Maurice jusqu'à l'ancienne prise d'eau. De là, d'autres points de vue saisissants s'offrent à nous. Une oeuvre artistique sonore et visuelle est présentée à l'intérieur de la magnifique tourelle.

De retour dans le musée, rendez-vous dans les voûtes de l'ex-usine de filtration, où se trouvait l'immense réservoir d'eau tout en béton. «Bienvenue dans cette cathédrale de l'ère industrielle», clame Michel Jutras, directeur des Arts et de la Culture de Trois-Rivières, lors de la visite des lieux. On ne pourrait mieux dire. Dans cet espace grandiose, la réverbération acoustique et la faible luminosité rappellent l'atmosphère des églises.

Ici, l'expérience consiste à déambuler, dans la pénombre, lampe à rayons ultraviolets à la main, pour lire des inscriptions peintes sur les murs, invisibles autrement, et visionner cinq vidéos du Parcours des oubliés, mettant en vedette des personnages imaginaires, tels que le gardien des lieux. Expérimenter cette immersion dans les profondeurs procure la même sensation que pénétrer dans un lieu sacré.

En plus de posséder une salle pour des expositions temporaires, le nouveau musée trifluvien organise de nombreuses activités destinées à un public de tout âge. Les enfants peuvent participer à un atelier de fabrication de papier et les ados sont conviés à un rallye dans les voûtes. Pour les groupes, on propose des prestations de Tom Caribou, maître-draveur joué par un comédien professionnel.

L'ouverture du musée Boréalis fait partie d'un vaste plan visant à revitaliser tout un secteur de Trois-Rivières, baptisé «Trois-Rivières sur Saint-Laurent». D'ici quelques années, sur les anciens terrains de la CIP, émergeront un marché public, un amphithéâtre, des pistes cyclables et des copropriétés. Selon Yves Lévesque, maire de Trois-Rivières, il s'agit du plus grand projet immobilier de l'histoire de la ville.

Infos: www.borealis3r.ca