«Ajustez vos montres: il n'est plus 15h, mais 16h. Durant tout le voyage, nous serons à l'heure des Îles-de-la-Madeleine», dit la voix dans le haut-parleur.

Nous sommes encore dans le port de Montréal, les derniers passagers viennent à peine de monter à bord du Vacancier. Mais grâce à cette seule annonce, on se sent déjà presque là-bas. Une bonne façon de se mettre dans le bain, en plus d'éviter les imbroglios dus aux fuseaux horaires. De toute façon, l'équipage de ce traversier-croisière est à 95% originaire des Îles, alors qu'on le veuille ou non, on a déjà un pied à Cap-aux-Meules avant même de partir.

 

À l'heure pile, le bateau - d'une capacité de 450 passagers - se glisse le long du quai pour entamer son périple hebdomadaire vers son port d'attache. De la mi-juin à la fin septembre, le Vacancier reliera ainsi 15 fois la métropole à l'archipel. Le voyage inaugural de la saison 2010, qui a pris fin vendredi dernier, était loin d'être plein. Mais il ne faut pas s'y fier: certaines traversées affichent déjà complet.

Le premier voyage avait pour thème «Homard et patrimoine maritime». Est-il vraiment nécessaire de dire que tout le monde a choisi le fameux crustacé au premier repas? Deux historiens, Maxime Arseneau et Jacques Lacoursière, étaient aussi à bord pour mieux expliquer les Îles et leur peuplement, et bien d'autres enjeux encore.

Plusieurs autres croisières thématiques auront lieu au cours de l'été. Il en est ainsi une, «Victoire de l'amour», qui appareille après-demain. Non, il ne s'agit pas d'une expédition coquine, mais au contraire d'une croisière religieuse, avec messes et prières au programme!

S'approprier le fleuve

Qu'importent les thèmes, l'itinéraire est toujours le même: on part à 15h - pardon, à 16h - le vendredi, et on passe devant le Quai de l'horloge, puis sous le pont Jacques-Cartier. On vient d'appareiller, mais on se sent presque dépaysés en découvrant sous un angle différent des villes et des paysages qu'on croyait pourtant connaître.

Passe Trois-Rivières, puis Québec aux alentours de minuit. Illuminée comme jamais, la capitale offre un coup d'oeil splendide. Entre les deux, passage obligé au salon-bar, où un chanteur réussit à faire danser quelques braves. Les consommations sont offertes à un prix très raisonnable, ce qui est aussi le cas du vin à table.

Quant aux repas, ils se prennent à la cafétéria le matin et le midi, et dans la salle à manger le soir, dans un décor plus recherché. Les repas sont simples, très goûteux, copieux. Les poissons et crustacés frais y ont une bonne place.

Les lève-tôt verront Tadoussac et l'embouchure du Saguenay le lendemain matin. Puis on longe une bonne partie de la Côte-Nord, avant de passer du côté sud. La nuit venue, le bateau se glissera ensuite entre l'île Bonaventure et le rocher Percé, sombre, massif, encore plus impressionnant qu'en plein jour. Arrêt à Chandler pour prendre des passagers, puis c'est la traversée du golfe jusqu'aux Îles-de-la-Madeleine, qui apparaissent dans toute leur beauté le dimanche matin.

Une formule flexible

Certains quittent le bateau ici, souvent avec leur propre voiture. Pour, la plupart du temps, prendre au retour un autre traversier de la CTMA, celui-là vers l'Île-du-Prince-Édouard. C'est l'intérêt de la formule: on peut faire Montréal-les Îles, les Îles-Montréal ou l'aller-retour, qui reste tout de même l'option la plus populaire. Il est même possible d'utiliser le Vacancier comme hôtel pour deux nuits à Cap-aux-Meules.

Plusieurs aussi avaient amené leur bicyclette, d'ailleurs transportée gratuitement. L'un des forfaits s'appelle «Croisière et vélo», c'est le plus économique de tous: 999$ aller-retour pour une cabine intérieure avec salle de bain partagée. D'autres se loueront une auto sur place ou participeront aux visites guidées. Trois jours, ce n'est pas beaucoup pour découvrir les Îles-de-la-Madeleine, mais assez pour s'en faire une idée générale. Et attraper le virus qui vous y ramènera invariablement...

Nous avons quitté les Îles mardi soir dernier, avec trois heures de retard à cause d'un vent incroyable. Ce qui a écourté l'arrêt du lendemain à Chandler, d'où on devait faire une excursion vers Percé. Annulée, l'excursion. Le capitaine aura toutefois la gentillesse de prendre tout son temps lorsque l'on est passé devant le fameux rocher, avant de mettre les gaz pour Québec et la longue escale du lendemain.

Les passagers sont surtout québécois, mais il y a aussi quelques Ontariens et une poignée d'étrangers. Essentiellement des retraités, à l'exception de 35 élèves d'une école de Sherbrooke, disciplinés et sérieux comme des papes quand l'heure des cours était venue.

Le retour vers Montréal se fait dans la nuit du jeudi au vendredi. À nouveau l'entrée dans le port, à nouveau le quai Bickerdike. On prend la valise, le vélo, au revoir les amis et c'en est fait d'une expérience unique. On remet ça? Certainement, même si des améliorations - idéalement un beau navire tout neuf! - seraient les bienvenues (voir autre texte).

Infos: www.ctma.ca ou 1-888-986-3278

Les frais de ce voyage ont été payés par la CTMA