Depuis la première présentation de Papillons en liberté, en 1998, plus d'un million de personnes ont participé à cet événement hors de l'ordinaire qui se déroule chaque année dans la grande serre du Jardin botanique de Montréal. Un succès sur toute la ligne, qui doit sa réussite à sa longue préparation.

Pour accommoder les 15 000 papillons qui sont relâchés annuellement, les horticulteurs de l'Insectarium de Montréal doivent planifier, plus d'un an à l'avance, quelles seront les plantes qui serviront à les nourrir et à accueillir leurs oeufs. «Le plus grand défi est de reproduire, dans un environnement contrôlé, un contexte naturel», explique Lorraine Bluteau, horticultrice à l'Insectarium.

L'aménagement de la grande serre tropicale est donc refait tous les ans afin d'accueillir les insectes. En 2009, ce sont les papillons des Amériques qui sont en vedette, alors que l'an dernier, les espèces du continent africain étaient en lumière. L'équipe de l'Insectarium a donc dû cultiver, dans ses propres serres, les plantes qui serviront à alimenter ces nouveaux pensionnaires.

Coordination délicate

L'énorme difficulté pour les horticulteurs, c'est de coordonner la floraison des plantes nectarifères, celles dont se nourrissent les papillons, avec la tenue de cet événement. «Qui plus est, elles doivent tenir le coup jusqu'à la fin d'avril. Chaque année, on fait de nouvelles expériences. On fonctionne par essais et erreurs», poursuit-elle.

De plus, il faut assurer la reproduction des espèces avec des plantes hôtes. «Chaque famille de papillons pond ses oeufs sur une plante déterminée. La plante hôte servira ensuite de nourriture aux chenilles afin qu'ils se transforment plus tard en papillons, complétant ainsi leur cycle de vie», explique Mme Bluteau.

Pendant que les horticulteurs préparent la serre, les entomologistes de l'Insectarium se procurent les papillons dans des fermes d'élevage éparpillées partout dans le monde. Désormais, ils s'approvisionnent uniquement en papillons «équitables» produits dans des fermes certifiées par la World Wildlife Fund. Ces fermes d'élevage permettent à des communautés d'amasser un revenu en protégeant la forêt plutôt qu'en la détruisant, comme c'est souvent le cas. Ce commerce protège ainsi la biodiversité de la planète.

Ces insectes sont ensuite expédiés par avion sous forme de chrysalides, le stade transitoire entre la chenille et le papillon. Une fois à destination, ces bijoux vivants sont pris en charge par les entomologistes de l'Insectarium. Chaque chrysalide sera ensuite accrochée une à une dans sa position naturelle afin de favoriser l'émergence de papillons.

Espèces québécoises

Pour la première fois en 2009, le Jardin botanique accueille des espèces québécoises, dont la saturnie cécropia, le plus grand insecte de la province, dont les ailes peuvent mesurer jusqu'à 17 cm. Malgré notre hiver rigoureux, on recense plus de 3051 espèces de papillons sur notre territoire. De ce nombre, 85% sont des papillons de nuit, d'où le fait qu'on ne les aperçoit pas beaucoup.

«Présentement, la plupart de nos papillons sont en diapause, l'équivalent de l'hibernation chez les insectes. On doit donc tricher avec la nature pour les faire émerger», explique Stéphane Le Tirant, conservateur à l'Insectarium. Pour ce faire, on va les soumettre à une période de froid intense, essentielle à leur développement, suivie d'un printemps simulé. Grâce à ce tour de passe-passe, on peut ainsi les contempler avant la mi-mai, période où ils font normalement leur apparition.

Pendant la durée de Papillons en liberté, les visiteurs peuvent admirer environ 1500 papillons simultanément dans la grande serre. Une centaine de papillons sont relâchés chaque jour en présence d'animateurs, qui prennent le temps d'expliquer chaque espèce. Le meilleur moment pour les observer est en matinée, lors de changements dans la pression atmosphérique ou encore lors de journées ensoleillées, alors qu'ils sont très actifs. Le truc pour entraîner ces vedettes ailées près de vous ou, mieux encore, sur vous, c'est de porter des vêtements rouges, couleur qui les attire. Un entomologiste averti en vaut deux!

Papillons en liberté: jusqu'au 26 avril au Jardin botanique de Montréal. Tél.: 514-872-1400 ou museumsnature.ca