Isolé dans le Pacifique, à 1500 km au nord-est de Tahiti, l'archipel des Marquises compte une douzaine d'îles. Six d'entre elles sont habitées, mais n'ont pas nécessairement un aéroport et un hôtel. Le meilleur moyen de les visiter est de monter à bord du cargo mixte Aranui 3, qui les ravitaille toutes les trois semaines.

En plus de transporter 2500 tonnes de vivres et de marchandises, l'Aranui 3 accueille jusqu'à 200 passagers. Entre le départ et le retour au port de Papeete (Tahiti), le dépaysement est complet. Davantage un voyage culturel qu'une croisière de divertissement, c'est aussi un retour dans le temps. Les paysages constitués de falaises abruptes et de pics enrobés de brouillard sont exactement les mêmes que ceux décrits par les explorateurs européens au XVIIIe siècle.

Pendant que les matelots déchargent les conteneurs, les passagers visitent les îles et rencontrent les habitants. Les échanges sont faciles, car la population a soif de contact avec les étrangers. De plus, tout le monde parle français. Les Marquises sont l'un des cinq archipels de la Polynésie française, collectivité outre-mer de la France.

Sans être luxueux, le cargo offre un bon niveau de confort et la vie à bord s'écoule tout doucement. Les cabines sont bien aménagées: il y a une piscine, une salle d'exercice, un bar, un salon et une salle à manger. Le temps en mer permet d'apprendre à tresser des chapeaux, nouer des paréos ou assister à des cours de danse polynésienne. Les repas sont servis à heures fixes dans une atmosphère conviviale et sans exigences vestimentaires. En shorts ou en paréo, les passagers s'assoient avec qui ils veulent.

Les groupes se forment selon les trois langues officielles de l'Aranui 3: français, anglais et allemand. Les passagers proviennent du monde entier, mais environ la moitié d'entre eux sont de nationalité française. La moyenne d'âge se situe entre 55 et 65 ans et, en général, ce sont des gens qui ont beaucoup voyagé.

Les membres d'équipage, presque tous originaires des Marquises, arborent fièrement leurs tatouages et parures d'os sculptés. Il suffit de leur demander la signification de tel dessin pour qu'ils racontent des pans de leur vie. Ces sympathiques conversations sur les ponts rendent le voyage inoubliable.

La revanche des tatoués

Après avoir compté 100 000 personnes au début du XVIe siècle, la population marquisienne a été décimée par les guerres tribales et les épidémies apportées par les Européens. Au début du XXe siècle, il n'y avait plus que 2000 Marquisiens. Ils ont été forcés par les missionnaires de renoncer à leur langue et au tatouage, dont ils revendiquent la paternité. Ce n'est que dans les années 80 que les Marquisiens ont pu renouer avec leur langue. Et le tatouage est vite redevenu une façon d'afficher leur appartenance. L'archipel compte maintenant près de 9000 personnes, regroupées en petites communautés dans les vallées.

Les habitations sont dissimulées sous la végétation, entourées d'arbres fruitiers, de poules et de cochons en liberté. Les quelques routes sont souvent cahoteuses. Et même si plusieurs habitants possèdent une jeep, le cheval demeure un mode de transport apprécié. Bien des enfants vont encore à l'école à cheval.

Les gens vivent au rythme de la nature. Dès le lever du jour, ils s'affairent dans leur jardin, cueillent fruits et fleurs en écoutant le chant des oiseaux. L'artisanat est l'une des activités principales des Marquisiens, reconnus comme les meilleurs sculpteurs de l'Océanie. C'est à l'ombre des arbres qu'ils créent leurs tikis en bois de rose ou d'ébène verte, et une grande partie de leur production est exportée.



Photo fournie par l'Aranui 3

Les Marquisiens sont abondamment tatoués, un art dont ils revendiquent la paternité.

Escales multiples

La douzaine d'escales de l'Aranui 3 dans différentes communautés est une bonne introduction à la vie des Marquises. Les passagers ont droit à plusieurs visites guidées de sites archéologiques; ils ont la chance de voir des tikis en pierre et des pétroglyphes étonnants. Les randonnées en forêt sont ponctuées d'arrêts pour admirer la nature sauvage et les chutes vertigineuses.

À l'occasion, des repas sont offerts dans des restaurants locaux et des pique-niques sont servis sur les quelques plages qui ne sont pas infestées de nonos (petits moustiques bien désagréables). Quand il n'y a pas de quai, le navire reste au mouillage et des barges transportent les passagers jusqu'à la rive.

L'itinéraire de l'Aranui 3 comprend également deux journées en mer et des arrêts aux Tuamotu (Fakarava ou Takapoto à l'aller; Rangiroa au retour). Cet archipel composé de nombreux atolls s'étend entre Tahiti et les Marquises. Les passagers y sont invités à visiter une ferme perlière, explorer les fonds marins et profiter des belles plages de sable blanc.

Les frais de ce voyage ont été payés par la Compagnie polynésienne de transport maritime. Transport assuré par Air Tahiti Nui.



Photo Andrée Lebel, La Presse

Les visiteurs sont accueillis par des musiciens et chanteurs au jardin des fruits et des fleurs dans l'île Ua Huka.

Repères

Combien ça coûte?

Le prix de la croisière de 14 jours à bord de l'Aranui 3, aller-retour à Papeete (Tahiti), comprend tous les repas (sur le bateau et dans les îles), le vin aux repas et les excursions guidées.

Une cabine standard avec toilette et douche privées coûte 4400$ par personne. Le prix des cabines de luxe et des suites va de 5300 à 6500$. Des couchettes sont aussi offertes à 2600$ dans l'un des deux dortoirs.

Le prix du billet d'avion est d'environ 2200$ entre Montréal et Papeete, avec escale à Los Angeles. Il faut compter au moins 17 heures pour se rendre à destination.

Pour qui?

Pour des gens en bonne condition physique, avides de découvertes et d'exotisme.

Pour quoi?

Pour découvrir un coin du monde peu fréquenté, des gens accueillants et une culture fascinante. Aussi pour un dépaysement total et des vacances sans stress.

Quand y aller?

Le meilleur moment de l'année pour visiter les Marquises est de novembre à mars. En octobre, on peut voir de nombreuses baleines. Il est préférable d'éviter la saison des pluies (juillet et août).

aranui.com

Photo fournie par l'Aranui 3

Sans être luxueuse, cette cabine standard du cargo mixte est confortable.