Marignan 1515, une date incontournable pour les écoliers qui revit au musée national de Zurich avec une exposition consacrée à cette bataille qui a remodelé la carte autour du riche duché de Milan.

Resté dans l'Histoire comme la «bataille des géants», cet affrontement a redéfini les frontières de l'Europe, contribuant à la renommée du jeune François Ier, qui venait  tout juste d'accéder au pouvoir en France, mais a également façonné le destin de la Suisse.

À travers 250 pièces, l'exposition permet de comprendre les enjeux de ce conflit qui opposait les troupes du roi de France et ses alliés vénitiens aux mercenaires suisses, venus défendre le duché de Milan.

L'exposition s'ouvre sur une présentation des fastes de la Cour de Milan, au coeur d'un centre économique en pleine expansion que convoitaient les grandes puissances militaires européennes.

Louis XII invoqua ainsi sa filiation avec les Visconti, qui régnaient auparavant sur le duché, pour contester la légitimité de Ludovic Sforza, le maître des lieux, et déclencher en 1499 la deuxième guerre d'Italie.

«Tout l'équilibre en Italie change à partir de là», a expliqué Denise Tonella, une des conservatrices du musée, lors d'une présentation à la presse.

L'exposition se concentre alors sur la puissance militaire des confédérés, alors à son apogée, en présentant notamment des pièces du butin de guerre ravi à la Bourgogne ou encore une somptueuse épée offerte par le pape Jules II pour les récompenser de leur engagement contre la France.

Roulements de tambours, son des cors, tirs de l'artillerie française... Un dispositif sonore est ensuite mis en place autour d'une projection pour permettre aux visiteurs de prendre de conscience de la violence de ce combat sanglant qui fit plus de 10 000 morts en l'espace de 20 heures.

Le mythe de Marignan 

Le musée se tourne ensuite vers la mise en scène de la victoire, qui permit à François Ier d'asseoir son autorité, avec une médaille à son effigie le présentant comme celui qui réussit à battre les Helvètes pour la première fois depuis Jules César.

Les visiteurs pourront admirer le traité de paix, orné de 19 sceaux et signé par le roi de France. Celui-ci veilla cependant à offrir des conditions généreuses aux soldats confédérés, négociant en échange un contingent de mercenaires qui allaient par la suite accompagner les troupes royales pendant plus de 250 ans.

Mais l'exposition ne s'arrête pas là, puisqu'elle se penche ensuite sur le mythe lié à Marignan et à son rôle dans l'avènement de la neutralité de la Suisse.

Officiellement instituée durant le Congrès de Vienne, en 1815, la neutralité encore récente du pays alpin fut remise en cause en 1889 par le chancelier allemand Bismarck, qui s'attaqua à la Suisse où venaient se réfugier des socialistes allemands pour poursuivre leur activité politique.

L'exposition présente une série d'articles publiés par l'archiviste zurichois Paul Schweizer dans le Neue Zürcher Zeitung, qui répliqua à cette attaque contre la souveraineté de la Suisse en s'attachant à démontrer que la neutralité de la Suisse puisait sa source dans le traité de paix de Marignan.

500 ans après, Marignan est à nouveau un sujet de polémique en Suisse. Le 19 mars, le politicien de la droite populiste, Christoph Blocher, a expliqué à un parterre de 1.300 auditeurs à Zurich que, à Marignan, l'Histoire avait parlé. Elle a selon lui montré une fois pour toutes que le destin de la Suisse n'était pas de se mêler des affaires du monde, mais de rester souveraine à l'intérieur de ses frontières. En cette année électorale pour la Confédération, il y voit un argument de plus dans sa campagne contre l'immigration en Suisse.

L'exposition se tient au Musée national de Zurich du 27 mars au 28 juin.