Les joyaux de la couronne de Bohême, inestimables chefs-d'oeuvre de l'art médiéval vieux de plus de sept siècles, sont de nouveau exposés au public depuis vendredi au Château de Prague, après une pause de cinq ans.

Selon une tradition établie par le roi de Bohême et l'empereur germanique Charles IV de Luxembourg (1316-1378), les bijoux comprenant la couronne royale, le sceptre, le globe impérial et d'autres objets précieux ne sont exposés qu'à des occasions exceptionnelles.

Cette tradition a été renouvelée après la naissance de la Tchécoslovaquie en 1918.

L'exposition qui restera ouverte pendant dix jours marque cette année le 20e anniversaire de l'indépendance de la République tchèque (1993), le 95e anniversaire de la Tchécoslovaquie et la récente élection du nouveau président, Milos Zeman.

Ancienne résidence royale, le Château de Prague abrite aujourd'hui le siège officiel de la présidence tchèque.

Ornée de 96 pierres précieuses dont des rubis, des saphirs et des spinelles, la couronne, un superbe ouvrage en or massif pesant 2,358 kilos, fut pour la première fois portée par Charles IV lors de son couronnement à Prague en 1347.

Le trésor séculaire a été sorti jeudi de la «chambre de la couronne» dans la cathédrale Saint-Guy au Château, dotée de sept serrures et d'un système de sécurité électronique sophistiqué. La tradition veut que les sept plus hauts responsables de l'État et de l'Église, détenteurs des sept clefs, se réunissent à cette occasion pour ouvrir la chambre.

«La valeur des joyaux de la couronne est incalculable. C'est pourquoi il est impossible de les assurer», a déclaré le porte-parole de la chancellerie présidentielle, David Sebek.

L'exposition est aménagée dans la salle Vladislas, bâtie au 15e siècle en style gothique tardif. La dernière exposition des joyaux a attiré il y a cinq ans plus de 30 000 visiteurs, obligés de faire la queue pendant plusieurs heures.

Selon une vieille légende, une mort atroce dans l'année attend celui qui ose poser la couronne royale sur sa tête, sans être le roi de Bohême.

Le dernier à avoir, en 1942, bravé cet interdit séculaire a été le SS-Obergruppenführer Reinhard Heydrich, dirigeant nazi en Bohême-Moravie occupée. Par ce geste, il voulait impressionner son rival d'alors, l'amiral Wilhelm Canaris, chef du contre-espionnage (Abwehr).

Quelques jours plus tard, Heydrich est mort à Prague des suites de ses blessures infligées lors d'un attentat commis le 27 mai 1942 par des résistants tchécoslovaques.