Poubelles débordantes dans les rues, trains à l'arrêt stoppés par des manifestants fumigènes à la main, manifestations violentes, inondations... autant d'images qui peuvent faire mal à l'attractivité de la France, même en cas d'Euro de foot réussi.

«C'est juste catastrophique. Les médias internationaux montrent Paris en feu et une France en conflit social permanent. Et les étrangers qui voient des poubelles devant le Café de Flore s'imaginent que tout le pays est dans cet état!», déplore jeudi à l'AFP Jean-Pierre Mas, président des Entreprises du voyage.

Selon le représentant des agences de voyages françaises, «la saison estivale est d'ores et déjà pourrie, car nous sommes pile dans la période où les gens réservent leurs vacances d'été, et ils ne vont pas hésiter à aller ailleurs».

«Nous avons reporté à septembre l'espoir de voir la fréquentation repartir», se désole Frédéric Valletoux, président du Comité régional du tourisme pour Paris et l'Ile-de-France.

Au célèbre café Les Deux Magots, à Saint-Germain-des-Prés, le directeur d'exploitation, Serge Bonnin, admet «ne pas connaître la même affluence en ce mois de juin qu'à l'habitude les autres années».

À quelques mètres de là, José Fernando Ogura et Fernanda Andreazza, touristes brésiliens déjà passés par Londres, Lille, Rennes et le Mont-Saint-Michel, estiment cependant que «la situation à Paris n'est pas si catastrophique que ça, c'est bien pire au Brésil !»

«Nous ne nous sentons pas du tout en insécurité, en revanche, la ville est très sale, surtout si on compare à Londres», affirment-ils.

Pour Christoph Kujawa, venu de San Francisco avec femme et enfants, «c'est au contraire le moment le plus sûr pour venir à Paris, car la sécurité est poussée à son maximum».

«Globalement, les touristes sont assez patients et compréhensifs, mais il y a forcément de la déception, car quand on est en vacances, on n'a pas envie d'être confrontés à un lot d'ennuis», résume Denis Juillière, guide-conférencier pour voyages organisés.

Sans compter pour sa profession «les difficultés à résoudre au quotidien: trouver de l'essence pour les bus, chercher des activités de repli lorsque les bateaux-mouches sont à l'arrêt et les musées fermés».

Au-delà du tourisme de loisirs, les professionnels estiment que le tourisme d'affaires pâtit aussi du contexte défavorable, et que l'attractivité économique de la France pourrait également en souffrir.

Tous les espoirs sur l'Euro

«L'histoire de la chemise arrachée d'Air France a fait le tour du monde», rappelle-t-on au Medef.

L'organisation patronale déplore «l'image caricaturale d'un pays toujours en grève renvoyée à l'international. On nous demande en permanence: pourquoi votre pays est bloqué? Ça peut se redresser, mais il faut pouvoir être cohérent et constant pendant des mois».

Du côté de Business France, agence chargée de promouvoir la France à l'étranger, sa directrice générale Muriel Pénicaud juge que «pour les investisseurs qui n'ont pas encore investi en France, c'est plus un frein, un frein psychologique. Là, on doit redoubler de pédagogie pour expliquer, décoder, mettre en perspective».

À défaut de réparer les dégâts, l'Euro de football (10 juin-10 juillet) pourrait être l'occasion d'atténuer les impacts négatifs.

«L'Euro peut permettre d'avoir un rebond, les matchs et qu'il y aura autour vont rassurer et donner une bonne image de la France, on pourra recommuniquer sur du positif», estime Christian Mantéi, directeur général d'Atout France, organisme de promotion du tourisme dans l'Hexagone.

En cas d'Euro «réussi, l'image du pays sera un peu corrigée. Mais imaginez ce que ça donnera si des équipes de foot ne peuvent pas se déplacer à cause d'une grève?», s'inquiète Jean-Pierre Mas.

Si la France était toujours en 2015 la première destination touristique mondiale avec 84,7 millions d'étrangers reçus, «le dommage à long terme peut être important, car on est en concurrence avec d'autres pays», a rappelé sur RTL Marc Lhermitte, du cabinet EY qui a publié fin mai son baromètre annuel de l'attractivité.

«Mais la France est résiliente» selon lui, et si jamais les partisans de foot voient des poubelles dans la rue ou ont un train qui ne part pas, «ils se diront «c'est la France»!».