Quand on pense aux châteaux de la Loire, on pense à Chenonceau, Chambord, Azay-le-Rideau. Nantes? Pas vraiment. Et pourtant, le Château des ducs de Bretagne se trouve bel et bien sur la mythique rivière. Peut-être l'oublie-t-on parce qu'il est excentré par rapport aux autres, moins célébré, plus lourdaud.

C'est d'ailleurs ce qui frappe en premier: les hauts remparts massifs, les douves, le chemin de ronde d'un demi-kilomètre de cet édifice où une partie de l'histoire de la France et de la Bretagne s'est jouée. Quand on passe les lourdes murailles et qu'on pénètre dans la cour, on se retrouve pourtant face à de fines dentelles sculptées d'inspiration Renaissance italienne. Le contraste étonne, mais on n'est pas au bout de nos surprises.

Le château, situé au coeur de Nantes, a rouvert ses portes l'an dernier après trois ans de gros travaux et 15 ans de restauration. Cette opération de plus de 80 millions de dollars en valait le coût: non seulement la structure est-elle maintenant prête à affronter les siècles, mais tout l'intérieur a été transformé en un magnifique Musée d'histoire de Nantes, où on peut passer une journée entière sans s'ennuyer.

Et pour cela, pas besoin d'être Nantais. On s'étonne en effet de trouver tant de liens entre cette ville de l'ouest de la France et nous. Le musée Pointe-à-Callière, dans le vieux port de Montréal, présente d'ailleurs jusqu'en octobre l'exposition France, Nouvelle-France justement coproduite avec le Musée de Nantes.

Port négrier

La mode est aux présentations multimédias, aux montages audiovisuels dans les musées. Celui du Château des ducs de Bretagne n'y échappe pas, mais réussit un bel équilibre entre ces apports modernes et la façon plus traditionnelle d'évoquer le passé. Ce qui permet de faire le lien dans un ensemble qui fut tour à tour logis royal, caserne, arsenal, prison. Les Allemands l'ont même utilisé pendant la Deuxième Guerre mondiale. Des empreintes de ces diverses occupations sont donc visibles un peu partout.

Les salles abordent diverses époques dans la vie de Nantes, dont le passé négrier de la ville. En France, le commerce du «bois d'ébène» a amené la prospérité à plusieurs ports, mais tous ne le reconnaissent pas encore aujourd'hui. Nantes, dont le commerce colonial a connu son apogée avec la traite des Noirs, a au contraire choisi d'aborder la question de front.

La ville fut en effet le premier port négrier de France. Une activité régie par des mécanismes économiques très complexes, et très bien expliqués dans l'exposition. Des croquis, des lettres, des dessins d'entreponts où on entassait la «marchandise» donnent, littéralement, la chair de poule.

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Pour en savoir davantage: www.chateau-nantes.fr