Après cinquante ans de tourisme de masse, l'Espagne veut promouvoir ses atouts culturels, historiques ou gastronomiques pour attirer des visiteurs étrangers qui ne se contentent plus toujours du seul modèle «soleil, plage et sangria».

Cette orientation vers un tourisme davantage haut de gamme est soutenue par les responsables d'un secteur clef de l'économie espagnole, au sortir d'une saison estivale décevante, qui a vu le nombre de touristes étrangers baisser d'environ 10%.«Il est temps de chercher des clients avec un pouvoir d'achat élevé, car nous avons beaucoup à leur offrir», affirme Jose Maria Rubio, qui dirige la Fédération espagnole des hôtels et restaurants.

«L'Espagne a 3.000 kms de côtes, qui vont demeurer un facteur important» dans son offre touristique, mais «il faut compléter cette image avec la culture, les attractions naturelles ou historiques, la gastronomie», souligne-t-il.

Il s'agit notamment d'attirer des touristes plus exigeants vers les musées de Madrid ou Bilbao, les vignobles de la Rioja, le parc naturel de Doñana (sud-ouest) ou encore les cités «maures» historiques de Cadix ou Jerez.

Le tourisme représente environ 11% de l'emploi et du PIB espagnols, et le nombre de visiteurs étrangers devrait chuter de 10% cette année par rapport aux 57,4 millions de 2008, selon les estimations du gouvernement.

Selon l'Organisation mondiale du tourisme (OMT), l'Espagne a perdu cette année au profit des États-Unis - et derrière la France, toujours en tête - sa place de 2e destination touristique mondiale.

La crise économique et la concurrence des destinations moins chères en Méditerranée, comme la Croatie ou la Turquie, ne sont pas les seules causes de cette désaffection: le bétonnage des côtes, notamment de la Costa del Sol, joue également un rôle.

L'Espagne souffre d'une «perte d'identité de ses destinations côtières, elle doit proposer de nouvelles offres pour répondre aux nouvelles demandes du marché» et aller vers «une croissance qualitative plus que quantitative», selon un rapport gouvernemental publié en 2008.

Autrement dit, il faut faire évoluer le modèle de tourisme de masse, lancé il y a 50 ans par le régime franquiste, qui a transformé les petits villages de pêche méditerranéens en cités HLM pour vacanciers anglais, allemands ou français.

Le gouvernement vient de lancer un programme dénommé «Privilège Espagne» visant à lancer des «produits à haute valeur ajoutée» pour attirer des «touristes plus exigeants», vers la Rioja, le Pays Basque (nord) ou encore Saint-Jacques-de-Compostelle en Galice (nord-ouest).

Et la fréquentation accrue cet été (+ 2%) des 93 «Paradors», hôtels de luxe installés dans des bâtiments historiques à travers le pays, conforte l'idée d'un tournant vers un tourisme plus exclusif.

La gastronomie joue également un rôle dans cette évolution, alors que la qualité de la cuisine espagnole et la réputation internationale de ses «chefs», en Catalogne ou au Pays Basque, ne cessent de grandir.

Il n'y a pas que «la paella, le gazpacho et les tapas» en Espagne, rappelle M. Rubio, qui vient de lancer un nouvelle initiative, «Savourer l'Espagne», afin «d'augmenter la compétitivité touristique du pays» par le biais de sa cuisine.