Droit comme un i, l'oeil pétillant et la répartie vive, Jean Vouardoux trimballe ses 77 ans avec l'énergie d'un jeune homme. Et n'allez surtout pas lui dire que son «vin de glacier» a un goût, disons, bien particulier. Pour lui, c'est le meilleur. Point.

«Il faut le faire rouler dans sa bouche, et oublier tout ce à quoi on est habitué. C'est un vin très différent», avertit M. Jean. Et pour cause: on ne vide jamais les tonneaux de mélèze dans lesquels le vin mature. On leur rajoute simplement la nouvelle production de l'année, qui se mêle au vin pas encore tiré. Une goutte de vin peut ainsi passer des décennies dans ces barils, dont le plus vieux daterait de 1650. C'est dire que le mélange à 14,7 degrés qui en résulte a un caractère... unique.

 

Plusieurs villages de montagne du Valais, en Suisse, produisent ce fameux vin de glacier, mais Grimentz a été le premier d'entre eux, assure notre hôte. Mais n'en boit pas qui veut. Il est réservé aux grandes occasions, peut-être, aussi, aux visiteurs insistants...

Ce vin, que certains comparent au Xérès, est aussi un prétexte pour découvrir les villages de montagne de la région de Sion. Des villages traditionnels où on parle parfois encore le patois, et dont certaines maisons en bois remontent au moyen âge en dépit d'un climat difficile. L'air de la montagne est vivifiant, presque autant que le petit fendant qu'on sert bien frais.

Le Valais produit le tiers des vins suisses, excellents mais rares et chers. De fait les Suisses boivent presque toute la production, et en laissent bien peu pour l'exportation.

Le Musée valaisan de la vigne et du vin a deux antennes, l'une à Sierre, l'autre à Salgesch. Ils sont reliés par six kilomètres d'un sentier au coeur du vignoble, avec pas moins de 80 panneaux explicatifs. Les vignes s'accrochent à la montagne, ou reposent sur d'antiques terrasses de pierre. En face, des montagnes aux neiges éternelles. En bas, le Rhône qui prend sa source pas très loin. Et au milieu, de sympathiques vignerons qui ne demandent pas mieux que de faire un brin de jasette.

Comme Clotilde Caloz, qui débourgeonnait ses ceps ce jour-là. Bien du travail, dit-elle, mais aussi bien du plaisir. Et la satisfaction de produire un vin qui s'est beaucoup amélioré depuis le virage qualité entamé au début des années 90. De sorte qu'aujourd'hui on ne recule devant rien pour tirer le meilleur parti d'une production réduite (l'Alsace produit quatre fois plus que le Valais), en raison du manque de terres propices.

Et ce n'est pas faute de tout essayer. Certains ceps sont par exemple plantés sur des parcelles au dénivelé de 70%. Lors de la récolte, c'est un hélicoptère qui doit venir chercher les précieuses grappes. Excessif? Il leur arrive de transporter les vaches de la même façon, alors...