Il a la cinquantaine burinée et porte un chandail sans appel : « Abortion is murder ». Tout sourire, il applaudit un musicien accompagné de ses perruches bleues comme l'océan à l'arrière-plan. À quelques enjambées de là, des blondes à chapeau de cow-girl trompent la soif, attablées au kiosque de Paul's Daughter.

À Coney Island, le passant oublie les orages qui menacent son quotidien. Pour une poignée de dollars, il s'offre ici une après-midi de liberté. Et pourquoi pas un tatouage de jaguar, de Michael Jackson ou de Hello Kitty.

Face à une machine à sous au milieu de laquelle trône Zoltar, héros du film Big, Carlo Muraco, patron du bar Margarita Island, plaide pour ses affaires : « Faites un voeu. Zoltar peut vous faire grandir ou rajeunir. » Cela fait 30 ans qu'il passe ses journées à l'ombre du Cyclone, montagnes russes phares de Coney Island, dans les cris et le vacarme du métro qui surplombe le bord de mer.

ZONE PROTÉGÉE

Même si elle a connu des jours sombres, Coney Island est toujours debout. En 1966, Fred Trump, père de l'actuel président, faisait démolir Steeplechase Park, le dernier des trois parcs d'attractions du boardwalk, pour construire des complexes d'appartements comme à Miami Beach. Heureusement, cette vague immobilière est aujourd'hui endiguée grâce à la Commission de préservation des monuments qui, en mai dernier, a déclaré « paysage emblématique » 3,8 km du boardwalk.

Aménagée en 1923, cette promenade a résisté à bien des assauts, y compris naturels, comme l'ouragan Sandy, qui a failli la condamner. Mais la station balnéaire a tenu le coup et respire la nostalgie des temps passés, à l'instar de cartes postales aux couleurs délavées par le soleil de plusieurs étés.

Se rendre à Coney Island, c'est faire une balade dans le temps, se frayer un chemin entre le kitsch et l'art, démêler le vrai du faux et goûter à la culture populaire américaine les pieds dans le sable. 

À Coney Island, l'esprit bon enfant côtoie l'excès, comme le concours du plus grand avaleur de hot-dogs tous les 4 juillet chez Nathan's. La chaîne de restauration sur le pouce, dont on retrouve des enseignes même en bord d'autoroute, a été fondée en 1916. « On aime croire que le hot-dog est né à Coney Island », raconte Marie Roberts, artiste peintre en résidence au Circus Sideshow et professeure d'art à la Fairleigh Dickinson University. « À l'époque, personne ne s'asseyait par terre pour manger. Et jusqu'en 1948, les hommes devaient porter un haut à la plage », glisse-t-elle au cours d'une visite guidée du curieux petit musée à l'étage d'une salle de spectacles où se produisent avaleurs de sabres, cracheurs de feu, contorsionnistes, charmeurs de serpent, etc. Marie peint les annonces qui décorent la façade de cette institution de Coney Island. Dans un coin du musée, on trouve une affiche vintage du défilé annuel de sirènes qui a lieu chaque année en juin, une tradition parmi d'autres qui ont la peau dure dans ce bout de plage de Brooklyn.

New York Aquarium

Un observatoire de la faune marine en bord de plage. Nouvelle section consacrée aux requins depuis juin.

602 Surf Avenue

Williams Candy

Pour des pommes d'amour, des bonbons et des barbes à papa multicolores dans une boutique de référence depuis plus de 75 ans.

1318 Surf Avenue

Gargiulo's

Un restaurant napolitain ouvert en 1907 par la famille Gargiulo à la salle à manger aux airs de décor de film.

2911 West 15th Street

Coney Art Walls

Un musée en plein air avec des oeuvres murales et quelques échoppes pour casser la croûte.

3050 Stillwell AvenuBNNe

PHOTO MURIEL FRANÇOISE, COLLABORATION SPÉCIALE

Même si elle a connu des jours sombres, Coney Island est toujours debout.

Photo Muriel Françoise, collaboration spéciale.

La restauration rapide règne en maître à Coney Island, notamment chez Paul's Daughter.