La faiblesse du dollar canadien et l'élection de Donald Trump ne semblent pas freiner l'envie des Québécois de fuir le temps maussade des dernières semaines pour profiter du sable chaud du nord-est des États-Unis. L'industrie touristique américaine observe une augmentation notable du nombre de Québécois dans le Maine et au New Jersey cet été, même si les festivités du 150e anniversaire de la fédération canadienne et celles marquant les 375 ans de Montréal battent leur plein.

«Je visite les commerces et les hôtels et j'entends beaucoup parler français cet été!», s'exclame en français Meagan Poirier, porte-parole de la Chambre de commerce d'Old Orchard Beach. Cette destination du Maine prisée des vacanciers québécois a regagné en popularité cette année, explique-t-elle. « Il y a plus de réservations de Québécois que l'an dernier. Nous sommes heureux! Il y a beaucoup de spéciaux justement pour les clients canadiens», ajoute-t-elle.

«Après une baisse de deux ans en raison du taux de change, nos hôtels et nos campings nous rapportent qu'il y a plus de réservations du Québec. Nous voyons une augmentation de Québécois à Cape May cet été», se réjouit Diane Wieland, directrice du bureau de tourisme du comté de Cape May. Ce secteur touristique du New Jersey qui comprend toute la péninsule au sud d'Atlantic City avait connu une forte baisse de 30 à 40% de touristes canadiens l'été dernier. Mais ce déclin est bel et bien terminé, assure Tammy Gomez, copropriétaire du camping Beachcomber, près de la plage de Wildwood.

«L'affluence [de Québécois] est très forte. Cette année, les conditions météo ici ont beaucoup aidé. Il y a une augmentation d'au moins 40% de touristes venant du Québec dans les dernières années.»

Même son de cloche plus au sud, à Virginia Beach. «Je n'ai pas de pourcentage précis, mais ça a augmenté. Il y a aussi plus de Québécois. D'après le directeur, ça a diminué beaucoup par rapport à ce que c'était il y a 10 ou 15 ans, mais dans la dernière année environ, ça n'a fait qu'augmenter», explique Stephanie Nesom, chef de réception du Best Western Plus Sandcastle.

«Oui, ils sont plus nombreux. Nous recevons beaucoup de touristes québécois», assure Sarah Potter, présidente de la Chambre de commerce d'Ogunquit, dans le Maine. Les vacanciers québécois affluent vers cette plage du Maine cet été, «malgré le taux de change», dit-elle. Et l'élection de Donald Trump? «Les Canadiens avaient peur de traverser la frontière quand Trump parlait du [décret] d'immigration, mais ça s'est calmé maintenant que l'inquiétude à ce sujet a diminué», soutient-elle.

Un effet Trump?

L'effet Trump existe, mais demeure «marginal», selon Michel Archambault, professeur émérite au département d'études urbaines et touristiques à l'UQAM. «Il existe pour ceux qui sont très politisés, qui n'iront pas [aux États-Unis] par principe. Mais ce n'est pas majeur en comparaison des autres critères», explique-t-il. «Il y a un effet [Trump], c'est sûr. [...] Mais l'effet Trump n'est pas seul. C'est plus vers la fin de l'été qu'on va pouvoir établir des analyses», affirme Claude Péloquin, directeur des études à la Chaire de tourisme Transat à l'UQAM.

Deux éléments influencent d'abord et avant tout le choix des vacances des Québécois : le taux de change et la météo au Québec, soutient Michel Archambault. «La planification de vacances en Europe se fait beaucoup plus à l'avance, mais pour l'est des États-Unis, les gens prennent leur décision à la dernière minute, à moins qu'ils n'aient de jeunes enfants», dit-il. Ainsi, avec le temps «horrible» des derniers mois au Québec, il n'est pas étonnant que les Québécois prennent le chemin du sud cet été, d'autant que les vacanciers semblent s'être «habitués» au taux de change défavorable, ajoute-t-il.

Étonnament, malgré la hausse des vacanciers québécois observée dans le Nord-Est américain, un sondage de la firme ontarienne Forum Research, publié aujourd'hui et obtenu par La Presse, conclut plutôt que les Québécois ont peu d'intérêt pour des vacances aux États-Unis. Seuls 7% des répondants à ce sondage mené auprès de 801 Québécois la semaine dernière ont dit que les États-Unis étaient leur premier choix de destination s'ils planifiaient des vacances avec leur budget actuel. Plus de la moitié des répondants privilégiaient plutôt le Québec (27%) ou l'Europe (25%). «Le fait le plus surprenant, c'est à quel point les Québécois sont aventureux quand ils voyagent», note Lorne Bozinoff, président de Forum Research.

«Ce qui me surprend beaucoup, c'est le 25% en Europe. Avec tous les problèmes de sécurité en Europe, c'est un chiffre impressionnant», analyse Michel Archambault.

«Je suis étonné par ces résultats : 7% aux États-Unis, ça n'a pas de sens!», s'étonne son collègue, le professeur Claude Péloquin. L'expert accorde d'ailleurs peu d'intérêt aux sondages d'intention de voyage en raison de leur grande volatilité et de la disparité entre les intentions des gens et la réalité. «Nous n'utilisons pas ces sondages [dans nos recherches]», dit-il.

Par exemple, un sondage de Vividata mené auprès de 7000 Québécois soutenait l'an dernier que 19 % des Québécois avaient fait un voyage aux États-Unis l'année précédente.

EN CHIFFRES

71% : des Québécois avaient l'intention de prendre des vacances cet été, selon un sondage de CAA-Québec réalisé en avril auprès de 1002 Québécois.

11% : des voyageurs québécois avaient l'intention de prendre leurs vacances aux États-Unis.

52% : des voyageurs québécois avaient l'intention de prendre leurs vacances au Québec.