Donald Trump et ses décrets migratoires font peut-être renoncer certains à leurs projets de vacances aux États-Unis, mais la baisse est due aussi à la hausse du dollar et devrait être limitée, selon les spécialistes.

La promulgation du décret migratoire du président Trump, le 27 janvier, a secoué, durant quelques heures, le tourisme mondial.

Dans les sept pays musulmans directement visés bien sûr, mais aussi au-delà. Le tour-opérateur en ligne Kayak a vu, par exemple, les recherches de vols de l'Europe vers les États-Unis chuter de 23% le 28 janvier.

Lors de la semaine suivant la signature du décret, les réservations à destination du pays de la statue de la Liberté, de Hollywood et de Disneworld ont reculé de 6,5% au niveau mondial, selon le cabinet spécialisé ForwardKeys.

Selon un sondage du comparateur de vols Cheapflights, 29% des Britanniques, de loin les premiers visiteurs après les Canadiens et les Mexicains, se disaient mi-février moins enclins à se rendre aux États-Unis qu'avant l'investiture de Donald Trump.

Pourtant, alors qu'a été signé lundi un nouveau décret pour remplacer le premier, bloqué par la justice, le tableau n'est plus aussi inquiétant.

Les réservations de Britanniques pour l'été 2017 sont bien en baisse, par rapport à l'an passé, constate l'association britannique des agents de voyage (ABTA). Mais «c'est toujours le cas lorsque la livre glisse face au dollar», a dit son porte-parole à l'AFP.

«Il est possible que l'élection de Donald Trump ait changé les projets de voyage de certains clients, mais il faut se rappeler qu'il a aussi des supporteurs au Royaume-Uni», explique-t-il.

«En 2016, le taux de change (euro/dollar) s'est dégradé et les réservations ont reculé, alors qu'Obama était encore au pouvoir», appuie un porte-parole de la fédération allemande des voyagistes (DRV).

Pour le PDG du voyagiste français Voyageurs du Monde, Jean-François Rial, l'effet change n'explique pas tout. «On préfère aller au Mexique ou au Canada à cause de Trump. On a quand même toutes les semaines des gens qui nous disent ça», assure-t-il.

Ironie du sort, le Mexique, tant décrié par Donald Trump, pourrait ainsi bénéficier de la mauvaise image du président américain: Cheapflights a ainsi relevé un bond des recherches sur ce pays.

Décrochage léger mais réel 

«À la lumière du décret migratoire et des discours associés», l'office du tourisme de New York, NYC & Company, explique avoir revu ses prévisions et anticipe désormais une baisse de 300 000 visiteurs venus de l'étranger en 2017.

Si elle se concrétisait, ce serait la première baisse depuis 2008, année de la crise financière.

L'office rappelle que si les touristes étrangers sont nettement moins nombreux que leurs homologues américains (12,4 millions contre 49,3 attendus cette année), ils dépensent, en moyenne, quatre fois plus lors de leur visite.

Le cabinet spécialisé Euromonitor prévoit, lui aussi, un léger décrochage, qui priverait tout de même les États-Unis de plusieurs centaines de milliers de visiteurs par an, jusqu'à un million en 2020.

L'association des voyagistes américains (US Travel Association), très prudente dans sa communication, a bien constaté que le premier décret migratoire de Donald Trump avait «globalement refroidi la demande» de voyages vers les États-Unis.

Lundi, elle a regretté que l'administration Trump n'ait pas profité du nouveau décret pour signaler aux personnes non concernées par le texte qu'elles étaient les bienvenues aux États-Unis.

«Si les électeurs indécis avaient besoin d'entendre certaines choses pour être motivées et aller voter», a-t-elle ajouté, «cela vaut aussi pour les voyageurs indécis».

Carole Ange, directrice générale déléguée de Groupe Travel & Co, qui comprend notamment le voyagistes Back Road, spécialiste du voyage sur mesure en Amérique, ne s'attend pas à une catastrophe pour autant, juste à «une année flat», sans croissance, au même niveau qu'en 2016.

«On devrait faire une bonne arrière-saison, une fois que M. Trump se sera un peu calmé», ajoute-t-elle.

Administrateur du voyagiste québecois Beltour, Hamza Belhajali voit même lui des raisons de se réjouir d'un «effet Trump».

Il a ainsi déjà constaté une hausse de la demande des Québecois pour New York et Washington, «curieux d'aller voir ce qui se passe» au pays de Donald Trump.