Lieu de tournage d'une multitude de films, la mythique vallée de la Mort, en Californie, offre aux visiteurs une expérience unique: le désert. Le visiteur découvre dans cet endroit, considéré comme l'un des plus chauds et des plus secs du monde, des dunes impressionnantes, des canyons étroits, de grands étangs salés et, s'il est chanceux, une rencontre avec un roadrunner bien vivant.

Elles changent parfois d'aspect en raison des vents capricieux. Souvent sinueuses, les plus hautes dunes n'atteignent qu'une quarantaine de mètres. Pourtant, on croirait des montagnes. Mirage ou illusion?

Rien d'étonnant, nous sommes en plein désert. Ici, dans le parc de la vallée de la Mort, en Californie, elles portent le nom de dunes plates de Mesquite. Une véritable mer de sable qui nous transporte au Sahara. Là encore, le mirage est parfait. Pas de caravanes de dromadaires à l'horizon, mais la marche sur la crête des collines est lente, parfois pénible, car on s'y enfonce un peu à chaque pas.

Les dunes de Mesquite sont prisonnières, encerclées par des montagnes depuis des millénaires. La roche érodée par le vent d'un côté de la vallée a formé ces gigantesques vagues de sable qui s'étendent sur 14 km2. Elles sont lisses, parfois ridées, mais tout en bas entre d'épars buissons de mesquite (une espèce d'acacia), de nombreuses traces de lézards, de serpents, de rongeurs ou de coyotes démontrent que l'endroit est bien vivant. D'ailleurs, si vous logez à Stovepipe Wells, tout près, vous aurez probablement l'occasion d'entendre le jappement des grands canidés la nuit.

Si fascinant soit-il, le milieu est cependant hostile. Le meilleur moment pour aller marcher dans les dunes est le petit matin, ou encore, la nuit à la pleine lune. Le ciel est alors d'un noir d'encre parsemé d'étoiles. Pour la première fois de votre vie, vous aurez peut-être l'impression d'entendre le silence.

Les dunes sont facilement accessibles de la route. Impossible de s'y perdre. La température d'hiver est agréable, de 10 à 20 °C, mais la surface du sable peut parfois dépasser les 40 °C quand le soleil atteint son zénith.

Le paysage tourmenté de la vallée de la Mort a servi de plateau de tournage à des dizaines de westerns, à Star Wars et à bien d'autres films. Les phénomènes géologiques ont coloré les canyons, les flancs de montagne et les vallées de jaune, de brun, d'ocre, de rouge ou encore de bleu saisissant.

Un désert de paradoxes

En dépit de son nom, la chaleur a fait très peu de victimes dans la vallée de la Mort. Il n'en demeure par moins qu'on y a enregistré le record de la plus haute température ambiante mesurée au monde: 56,7 °C (134 °F) le 10 juillet 1913 à Furnace Creek, nom prédestiné, principale oasis de ce désert de 225 km de longueur. D'ailleurs, de mai à septembre, le thermomètre indique souvent plus de 40 °C et le mercure descend très rarement en dessous de 30 °C en juillet et en août. Facile de comprendre pourquoi c'est l'automne et l'hiver que la désertique vallée est la plus fréquentée.

Même si les hautes montagnes limitent l'horizon, certains coins de la célèbre vallée sont les plus bas en Amérique du Nord par rapport au niveau de la mer. Nous sommes également à l'endroit le plus sec du continent: 50 mm de pluie par année, comparativement à 764 mm à Montréal, sans compter la neige. Ce qui explique que les lacs y sont disparus depuis longtemps pour laisser place à une croûte de sel qui s'étend souvent sur des kilomètres, comme au Badwater Basin.

La situation est d'ailleurs paradoxale parce qu'une bonne partie de l'exceptionnel relief du parc a été jadis sculptée par l'eau, comme on peut le voir sur les lisses parois de marbre du très étroit couloir de Mosaic Canyon.

L'appel du désert

Ces conditions extrêmes n'ont toutefois pas empêché la vallée de la Mort de connaître sa ruée vers l'or, comme en témoigne la ville fantôme de Ryolite, à la frontière du parc dans le Nevada, ou encore cette petite ville fondée en 1906 et dont il ne reste que le nom inusité de Skidoo.

Mais la vocation minière de la vallée, c'est avant tout son borax, exploité durant des décennies, jusqu'en 2005 d'ailleurs, et dont il reste plusieurs artéfacts. C'est le cas de ce convoi de wagons sur roues qui pouvait transporter 36 tonnes de borax non raffiné sur 260 km grâce à un incroyable attelage de 20 mules et 2 chevaux. Mais, coup de chance, au moment où la mine a cessé ses activités, les propriétaires ont décidé d'utiliser leur chemin de fer, devenu inutile, pour amener des touristes en plein désert. Le magnifique hôtel Furnace Creek Inn, construit par la Pacific Borax en 1927, a connu un succès immédiat. Aujourd'hui, à défaut d'avoir les moyens d'y loger, vous pouvez découvrir cette petite oasis grâce à une visite guidée.

À la rencontre du roadrunner

Depuis le temps que j'en rêvais, la rencontre a finalement eu lieu. Elle s'est déroulée à l'arrière du musée de Furnace Creek, le dernier endroit où je m'attendais à l'apercevoir. Trois jours d'excursion dans le désert n'avaient rien donné. Le mythique roadrunner de mon enfance, celui du dessin animé, était là devant moi, plumage brun foncé tacheté et blanc, de la taille d'un coq mais beaucoup plus svelte, doté de grandes pattes rompues à la course.

L'émotion a vite cédé la place à l'étonnement. Le grand géocoucou, de son nom scientifique, n'est pas très loin de sa caricature animée, le «beep beep» cinématographique et le coyote en moins. Il se déplace très rapidement d'un endroit à l'autre, inspecte les lieux quelques instants et repart aussi vite, le cou tendu, pour s'arrêter de nouveau brusquement. Habituellement silencieux, il peut se déplacer à 25 km/h, non pas pour fuir, pourrait-t-on croire, mais bien pour capturer ses proies, comme des serpents et des petits lézards. C'est d'ailleurs parce qu'il courait devant les diligences qu'il porte le nom de roadrunner.

À Furnace Creek, meilleur endroit pour un rendez-vous hivernal, il circule plutôt entre les maisons du personnel. À mon grand plaisir, j'ai suivi la bête durant une quinzaine de minutes jusqu'au moment où elle a fait un saut de deux bons mètres pour s'installer délicatement sur son nid, au sommet d'un dracéna géant près d'une maison. Un spectacle inouï. L'oiseau du désert niche dans un arbre ou un arbuste et peut voler très bien au besoin. Et le fameux coyote? Le géocoucou est effectivement trop rapide pour ses ennemis à quatre pattes. Mais à la première occasion, ils ne manqueront pas de dévorer ses oeufs ou sa progéniture. La vie n'est pas un dessin animé.