La petite histoire d'Ole Smoky Moonshine a tout d'un grand succès... né dans la clandestinité.

Il y a quatre ans, quand l'État du Tennessee a légalisé les distilleries, Joe Baker a sauté sur l'occasion pour faire connaître le moonshine, un alcool que ses oncles, ses grands-pères et ses arrière-grands-pères fabriquaient jusqu'alors illégalement.

Aujourd'hui, la distillerie Ole Smoky Moonshine de Gatlinburg, située au pied des Smoky Mountains, attire énormément de curieux qui repartent presque inévitablement avec un pot Mason rempli du puissant alcool.

Comme plusieurs Américains du sud-est des États-Unis, les ancêtres de Joe Baker ont commencé à distiller leur propre alcool lorsque les taxes sur le whisky ont explosé, à la fin du XIXe siècle. Les distilleries illégales se sont ensuite multipliées pendant la prohibition. Les moonshiners se rendaient dans les montagnes des Appalaches et, à la clarté de la lune, fabriquaient leur boisson alambiquée en cachette.

«Pour les familles, c'était une source de revenus supplémentaires. Les gens avaient de grandes familles et les temps étaient durs. Pour plusieurs personnes de la région, c'était une manière de faire un peu de sous», raconte Johnny Baker, oncle de Joe Baker et coordonnateur des ventes aux groupes d'Ole Smoky Moonshine.

Quand le règlement concernant la fabrication d'alcools et de liqueurs a été modifié, Joe a demandé la recette du moonshine à son grand-père, ancien moonshiner. Un an plus tard, le jeune homme alors âgé de 33 ans ouvrait l'une des toutes premières distilleries de l'État.

Le succès a été éclatant. L'entreprise a dû déménager dans un plus grand local, dans la populaire rue Parkway, au centre-ville, et le nombre d'employés est passé de 7 à plus de 200 en moins de trois ans.

Une distillerie festive

Aujourd'hui, l'entreprise est un lieu hautement fréquenté par les touristes. Tous les jours, des spectacles de musique bluegrass sont présentés à l'entrée. À l'intérieur, les stations de dégustation du moonshine sont animées par des employés vêtus d'une salopette en denim. Il suffit de présenter une carte d'identité avec une preuve d'âge pour déguster gratuitement les échantillons des 12 produits différents.

Mais le succès du moonshine n'était pas assuré pour autant. Cette eau-de-vie fabriquée à partir de grains de maïs, de sucre et d'eau est extrêmement forte au goût. Disons qu'avec un degré d'alcool de 100%, on ne la déguste pas comme le vin.

«Les alcools concentrés à plus de 60% ne gèlent pas. On place donc le Moonshine original au congélateur. Très froid, c'est très bon! On pourrait le mélanger, mais ici, on est des hillbillies. On le boit nature», dit M. Baker.

Au départ, Ole Smoky Moonshine a lancé le Moonshine original, le White Lightning et les cerises macérées au marasquin et au moonshine dans des pots Mason, les contenants qui étaient souvent utilisés par les moonshiners illégaux. Avec le temps, la distillerie a créé des alcools dilués et aromatisés. Neuf whiskys sont par exemple parfumés aux mûres, aux pêches et à la limonade rose. La saveur la plus populaire demeure... la tarte aux pommes.

«Chacun a une préférence, mais le moonshine à la tarte aux pommes, on peut le réfrigérer et le boire froid. En hiver, plusieurs personnes aiment aussi le réchauffer quelques secondes au micro-ondes. Ça donne quelque chose comme un cidre», explique M. Baker.

Depuis la mi-septembre, Ole Smoky Moonshine exporte d'ailleurs quelques pots Mason en Colombie-Britannique. Bientôt, les Ontariens et les Albertains pourront acheter le moonshine dans leur province. Johnny Baker espère fort que ses produits aboutiront aussi dans les SAQ. Mais d'ici là, les Québécois devront visiter les Smoky Mountains pour déguster un trait de cet alcool folklorique.

www.olesmokymoonshine.com