Le parc Algonquin, c'est un territoire plus vaste que l'Île-du-Prince-Édouard, parsemé de plus de 1500 lacs et 2000 km de voies canotables. Un territoire sauvage méconnu des Québécois, mais pourtant situé à moins de cinq heures de route de Montréal. Visite.

Seule la portion sud-ouest du parc Algonquin, traversée par la route 60 sur une distance de 56 km, est facilement accessible en voiture. L'arrière-pays offre donc bon nombre de défis pour les aventureux qui voudraient atteindre des chalets rustiques à pied ou en canot, ou camper loin de toute civilisation. Mais il y a déjà tant à faire aux abords de la route qu'un seul voyage risque de ne pas suffire pour tout explorer.

Appareil photo au cou, on se lance tout d'abord à la découverte de quelques sentiers en forêt.

À l'aube et au crépuscule, les chanceux pourraient apercevoir le museau d'un cerf ou l'ombre d'un orignal dans l'un des 15 sentiers d'interprétation du parc. Heureusement, l'automne venu, les moustiques et les mouches noires, si voraces au printemps, se font rarissimes, nous informe Kevin, qui travaille au parc provincial depuis plus de 20 ans.

Quinze sentiers d'interprétation

Un feuillet gratuit, offert à l'entrée du parc et au centre d'accueil des visiteurs, donne un aperçu de tous les sentiers accessibles par la route et de leurs caractéristiques. Chacun de ces itinéraires propose un point de vue unique sur un paysage caractéristique du parc.

Si on peut n'en parcourir qu'un, c'est sans contredit le sentier Lookout qu'il faut choisir, dont les 2 km longent un précipice. «Parmi tous les sentiers, c'est toujours mon préféré, raconte Kevin, même après les avoir tous faits plusieurs fois.» On ne tarde pas à comprendre la raison de cette préférence: environ 30 minutes après avoir amorcé la marche, les randonneurs sont récompensés par l'un des panoramas les plus impressionnants du parc.

Ce belvédère naturel est l'endroit par excellence pour mesurer l'immensité du territoire et admirer le tableau de couleurs à l'automne, quitte à y prendre son temps pour capturer quelques clichés ou esquisser un croquis. Dès la fin du mois de septembre, les érables commencent à se teinter de rouge et d'orange, suivis des trembles, des bouleaux et des épinettes qui arborent, au début d'octobre, des reflets jaunes, presque dorés parmi le vert profond des conifères.

Malgré quelques pentes assez raides, le sentier Lookout se parcourt facilement en une heure. Plusieurs familles accompagnées de jeunes enfants - parfois même avec poussettes - choisissent d'ailleurs d'emprunter le sentier en sens inverse pour atteindre le belvédère plus rapidement.

Un grand nombre de sentiers courts ont d'ailleurs été aménagés dans le parc afin d'accueillir des visiteurs de tous âges. Celui de Beaver Pond serpente sur 2 km à travers un terrain accidenté et mène aux étangs et barrages construits par des castors. Même si l'on n'aperçoit aucun castor lors de la marche, on devine qu'au moins l'un d'entre eux est passé par là en voyant la multitude de troncs rongés...

La Whiskey Rapid Trail vaut elle aussi une promenade pour ses chemins escarpés qui longent la rivière Oxtongue et ses rapides qui surgissent à l'orée d'une forêt dense et compacte. Les sentiers de Track and Tower, Booth's Rock et Mizzy Lake (l'un des deux plus longs avec ses 10 km), suivent, quant à eux, des tronçons de l'ancienne voie ferrée qui traversait le parc.

Un après-midi en canot

Après une marche revigorante en matinée, un tour sur l'eau permet de découvrir les lacs majestueux du parc. Deux établissements (Portage Store et Algonquin Outfitters) louent kayaks et canots dans le parc et organisent des excursions allant d'une à trois journées, camping à la belle étoile compris. Au Portage Store, il est également possible de réserver des excursions guidées de quatre heures en après-midi.

«Beaucoup de familles préfèrent les tours guidés d'une demi-journée pour en voir un maximum en peu de temps, car on peut facilement prendre un mauvais chemin et se perdre entre tous les lacs communicants», raconte Shay, une jeune guide qui accompagne les groupes lors des excursions d'une demi-journée.

Lors de ces visites, deux guides entraînent les canoteurs sur 7 km à travers les eaux d'un noir d'encre par groupes de deux ou trois par canot, les enfants généralement installés au centre.

Du lac Canoe, point de départ de l'excursion, il faut pagayer à vive allure pour affronter les forts courants et les vents contraires qui rendent cette partie du trajet plus difficile.

Le tour d'une demi-journée inclut une pause bien méritée, après une heure et demie d'efforts, dans l'île aux Bleuets, où les guides remontent les canots et distribuent pommes, biscuits et pastilles de purification d'eau au cas où les gourdes fournies seraient déjà à sec.

Le périple se termine en fin d'après-midi avec la traversée du lac Smoke, tout aussi imposant, pour atteindre la berge située à quelques minutes à pied du Portage Store.

Photo Laila Maalouf, La Presse

Le panorama du sentier Lookout.

À savoir

> Une excursion guidée d'une demi-journée au Portage Store coûte 35,95$ (taxes en sus). Les moins de 14 ans paient moitié prix.

> Le permis d'entrée pour un jour au parc provincial Algonquin (valide jusqu'à 22h) coûte 20$ (taxes comprises) par véhicule.

> Plusieurs types d'hébergement permettent de passer la nuit dans l'enceinte du parc, mais il faut réserver tôt, que ce soit pour dormir dans les yourtes du lac Mew, l'un des huit terrains de camping situés le long de la route 60 ou les trois pavillons (Killarney Lodge, Bartlett Lodge et Arowhon Pines).

> Dans le parc, on peut casser la croûte au Portage Store, au Sunday Creek Café, situé dans le centre d'accueil des visiteurs, ou au terrain de camping Lake of Two Rivers, où une petite épicerie permet aussi de faire des provisions. Les trois pavillons proposent par ailleurs des menus de plusieurs services pour le dîner et le souper.

> 442 km séparent Montréal du parc Algonquin, situé à 243 km d'Ottawa.

> Pour plus d'information: algonquinpark.on.ca

> Pour voir le parc en direct: algonquinpark.on.ca/webcam

Photo Laila Maalouf, La Presse

Art et histoire en nature

Peu de paysages canadiens ont inspiré autant d'artistes que le parc Algonquin. On songe bien sûr aux tableaux du Groupe de Sept, comme L'érable rouge d'A.Y. Jackson ou Le pin de Tom Thomson, devenu l'emblème du parc. Cours de peinture, expositions, théâtre ou parcours historique, voici trois activités pour stimuler sa fibre créatrice ou sortir des sentiers battus.

Peinture en nature

Peinture sur toile au bord du lac Found, dessin sur canot miniature ou pagaie en bois, sculpture en terre glaise ou sur pierre sous la tonnelle... ces cours d'art ne sont que quelques exemples parmi ceux qui sont offerts à l'Algonquin Art Centre. Mieux vaut réserver sa place pour certains, mais d'autres sont ouverts à tous, adultes et enfants, sans réservation et toute la journée. Le matériel est vendu sur place ou fourni, selon les cours. Le centre est ouvert jusqu'au 17 octobre.

algonquinartcentre.com

Expositions

À l'intérieur de l'Algonquin Art Centre, une exposition thématique sur la nature fait découvrir aux visiteurs les oeuvres d'artistes locaux, inspirées par les paysages du parc. Au centre d'accueil, une exposition bien différente (bilingue) sur la faune, la flore et l'histoire du parc nous apprend par exemple qu'une voie ferrée le traversait jusqu'en 1959 pour relier Ottawa, Arnprior et Parry Sound. Jusqu'en 1936, date à laquelle la route a été achevée, c'était aussi la seule façon d'avoir accès aux auberges et chalets du parc. Le parcours, présenté sur deux étages de façon assez ludique (avec des poissons vivants et des animaux empaillés), plaira même aux plus grands.

Théâtre

Plusieurs soirs par semaine, l'amphithéâtre à ciel ouvert du parc accueille jusqu'à 1000 spectateurs pour un spectacle ou des sketchs en plein air. Des «Public Wolf Howl» (séances de hurlements de loup collectives) sont par ailleurs régulièrement organisés afin d'entendre ces bêtes nocturnes. S'il pleut pendant le jour, on peut toujours se rabattre sur le théâtre intérieur du centre d'accueil, où des pièces de 45 minutes sont présentées pour les 5 à 12 ans sur des sujets comme les insectes et autres créatures qui hantent le parc. À noter que le programme hebdomadaire paraît tous les jeudis.

Photo Laila Maalouf, La Presse

Exposition à l'Algonquin Art Centre.

Autour du parc

Le long de la route 60 ou dans la région de Muskoka, à l'ouest du parc, un petit détour peut mener à d'intéressantes découvertes. Voici quatre arrêts pour casser la croûte ou prendre une pause.

Huntsville

Cette charmante ville offre un grand choix de restaurants et de pubs au bord de l'eau. Dans Main Street, entre les boutiques attirantes, le restaurant That Little Place by the Lights sert notamment de délicieuses pizzas cuites au four à bois sous la gouverne de Manny, le propriétaire italien. On s'offre un gelato sur place ou on traverse la rue jusqu'à The Nutty Chocolatier, pour son étalage alléchant de crèmes glacées, fudges maison, chocolats et bonbons.

thatlittleplacebythelights.ca

thenuttychocolatier.com

Bonnechere Caves

Sur le chemin du retour, un bref détour vers Eganville permet d'explorer les petites grottes de Bonnechere, un témoignage intéressant de la richesse du sous-sol de la région. Les visites guidées d'une heure commencent par une présentation de 20 minutes sur les fossiles, au grand plaisir des enfants. Départs toutes les 30 minutes chaque jour (de 10h à 16h), jusqu'à l'Action de grâce.

bonnecherecaves.com

Barry's Bay

Marchés de fermiers et antiquaires parsèment le chemin qui mène au parc Algonquin. Une heure avant d'arriver à destination, on se dégourdit les jambes à Barry's Bay en fouinant derrière les vitrines remplies d'objets cocasses ou dans les nombreux magasins de plein air et de matériel de camping.

Whitney

À la lisière du parc, côté est, The Mad Musher est l'endroit pour goûter à un burger au wapiti ou à du ragoût de gibier, qu'on peut accompagner d'une bière brassée dans la région, la Muskoka. Ce «diner» aux allures rétro possède même ses propres chambres si on veut dormir tout près du parc.

madmusher.com

Photo Laila Maalouf, La Presse

Hunstville

Photo Laila Maalouf, La Presse

Les grottes de Bonnechere