Je ne suis pas une fan d'Anne... la maison aux pignons verts, et le cérémonial du 4 o'clock tea, ce n'est pas mon truc. Quant à la pratique du golf, ça m'intéresse à peu près autant que le curling. Alors quand des amis m'ont proposé, il y a de cela quelques années, d'aller passer des vacances à l'Île-du-Prince-Édouard, disons que je ne débordais pas d'enthousiasme. Pour moi, les vacances à la mer sont synonymes de côte Est. J'ai Cape Cod tatoué sur le coeur... Sans compter que l'Île-du-Prince-Édouard, c'est loin. Et pourtant, j'ai été charmée par cette province insulaire aux vallées verdoyantes, aux pelouses bien taillées et aux belles maisons victoriennes qui nous rappellent que nous sommes bel et bien dans un pays du Commonwealth...

C'est à North Rustico, situé en ligne droite avec le pont de la Confédération, que mes réticences se sont évanouies pour de bon. Je n'ai jamais été Canadian dans l'âme mais ce petit village de pêcheurs m'a tout de suite séduite. Tranquille, simple, loin des hameaux touristiques en kit avec leurs rangées de boutiques de souvenirs toutes semblables, ce petit village portuaire est authentique.

À cette hauteur,  la côte est magnifique avec ses rochers de grès rouge, ses dunes de sable et ses plages à perte de vue. Impossible de ne pas être impressionnée par cette nature sauvage, cette terre qu'on dirait enflammée et qui se découpe sur un fond de mer bleue. Difficile de croire qu'à quelques kilomètres à peine, on trouve des jardins en fleurs dignes du plus british des magazines de décoration anglais. Beau contraste.

Comme le littoral se trouve à l'intérieur du parc national de l'Île-du-Prince-Édouard, les lieux y sont pratiquement intacts et, surtout, très bien protégés. Ici, pas de gros domaines qui monopolisent le bord de mer. On y voit bien quelques demeures mais rien qui ne vienne défigurer le paysage. L'endroit est pratiquement à l'état brut.

En fait, la plus petite province canadienne est tout sauf un endroit à la mode. C'est sans doute une grande partie de son charme. Bien sûr, on peut aller visiter le village de la fameuse Anne de Lucy Maud Montgomery, sans doute l'attraction touristique la plus populaire de l'île. J'y suis allée une fois, lorsque mes filles étaient plus jeunes. Je n'en garde pas un souvenir indélébile sauf pour les 15 minutes où mon aînée, déjà urbaine à 6 ans, s'était retrouvée accroupie sur un petit tabouret à traire sa première vache. Only in PEI...

Je mentirais si je disais que la capitale, Charlottetown, est une ville trépidante. C'est l'image même qu'on se fait d'une ville canadienne: architecture à l'influence on ne peut plus anglaise, monuments militaires, l'unifolié tapissé partout. Chose certaine, ce n'est pas pour visiter Charlottetown qu'on roulera durant 12 heures. Sauf qu'une fois sur place, cette petite ville a quand même un passé historique suffisamment riche pour vous offrir une bonne journée de visite touristique. Et quelques belles terrasses pour profiter d'un repas estival. Mais on peut très bien éviter de se plonger dans une atmosphère citadine et opter plutôt pour les lobster suppers, des repas de homard à la bonne franquette qui ont lieu dans des salles communautaires et des sous-sols d'église. Typique.

Je suis retournée dans l'île quelques années plus tard, après avoir convaincu un groupe d'amies avec qui j'allais aux Îles-de-la-Madeleine de faire un loooooong détour pour aller dormir au Stanhope Resort (ici, je dois dire que le mot resort est complètement galvaudé) avant de joindre Souris où nous devions prendre le traversier. Le resort en question était en fait une immense auberge à l'air un peu abandonné mais situé sur un site magnifique, dans la baie de Covehead. Nous étions pratiquement les seules clientes de l'endroit (trois mères et... six enfants!) et nous avons failli ne pas souper tellement les environs étaient déserts. Mais quel paysage!

Je compte bien retourner à l'Île-du-Prince-Édouard pour visiter la péninsule de Greenwich, un endroit qu'on dit spectaculaire avec ses dunes de sable à perte de vue. Il y a aussi les centaines de kilomètres de sentiers. Et tous ces trésors se trouvent dans une petite île sans aucune prétention. C'est pour ça que je l'aime...