Tirs de missiles, échanges acrimonieux entre  Donald Trump et Kim Jong-un: la péninsule coréenne  a souvent fait la manchette ces dernières semaines, sans montrer son visage le plus flatteur. À l'approche  des Jeux olympiques de PyeongChang, qui se tiendront du 9 au 25 février, les touristes doivent-ils craindre de  se rendre en Corée du Sud? Le point en cinq questions.

Doit-on avoir peur de voyager là-bas?

Pour répondre à la question des clients, les agents de voyages et les assureurs s'en remettent à l'évaluation formulée par le ministère des Affaires étrangères du Canada, qui dicte d'y prendre des mesures de sécurité «normales», alors qu'on recommandait par exemple (au moment d'écrire ces lignes) de faire preuve d'une «grande prudence» lors des séjours en France en raison de la menace terroriste élevée. Officiellement, donc, il n'y a pas d'inquiétude particulière à y avoir. «Si je pouvais y aller, j'irais sans hésiter», dit Michelle Cho, professeure adjointe au département d'études est-asiatiques de l'Université McGill.

Peut-on annuler un voyage si la situation s'aggrave?

Les compagnies d'assurances calquent leurs actions sur les avis du ministère des Affaires étrangères du Canada. Si la situation devait évoluer rapidement et qu'Ottawa en venait à décréter qu'il y a urgence de quitter le pays, «le voyageur sera rapatrié aux frais de l'assureur ou, s'il n'est pas encore parti, obtiendra soit un remboursement, soit un crédit pour un nouveau voyage», précise Suzie Pellerin, vice-présidente de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes. Il faut toutefois communiquer rapidement avec son assureur, car les dépenses effectuées sans son aval pourraient ne pas être remboursées.

La menace d'un conflit fait-elle fuir les touristes?

Oui et non, répond Randy Snape, directeur du marketing de l'Office national de Corée au Canada. «Il y a un impact, oui, mais cela fait plus de 50 ans que la Corée y est confrontée», explique-t-il. Et à pareille date l'an dernier, le nombre de Canadiens (175 000 environ) qui avaient visité la Corée était exactement le même. Pas de hausse, mais pas de recul non plus, donc. Les tensions sont surtout susceptibles de refroidir les touristes qui n'y ont jamais mis les pieds, remarque Pascale Marcotte, professeure à l'Université Laval et responsable scientifique de la Chaire de recherche sur l'innovation en tourisme. Ainsi, les touristes continuent d'affluer en France en dépit des attentats terroristes qui y ont été commis «parce que les gens connaissent déjà la destination. Ils y sont peut-être même déjà allés pendant un attentat, ou juste après, et n'ont pas été touchés. C'est différent pour une destination lointaine, dont on ne connaît que les images véhiculées aux nouvelles», explique la chercheuse.

La situation risque-t-elle d'empirer à la veille des Jeux?

Dur, dur à prédire, mais les experts consultés sont d'avis que non. «Le régime nord-coréen est peut-être paranoïaque, mais il n'est pas suicidaire. Il sait que des gestes qui mettraient en péril les touristes affaibliraient sa position alors que son but, c'est de se maintenir, il doit donc faire preuve d'un certain rationalisme», dit Serge Granger, professeur à l'École de politique appliquée de l'Université de Sherbrooke. Certes, Pyongyang pourrait procéder à de nouveaux tests de missiles balistiques d'ici les JO. «Mais cela m'étonnerait, et ils sont de plus en plus précis: les chances d'erreur diminuent», note Serge Granger. D'ailleurs, les deux Corées se rencontreront la semaine prochaine à l'occasion de leurs premiers pourparlers officiels en plus de deux ans afin de trouver des façons de collaborer en prévision des Jeux olympiques.

Quelle sera l'importance de ces Jeux pour la Corée du Sud?

Pas aussi grande que ceux de Séoul, remarque Michelle Cho: «Ceux de 1988 ont eu un impact majeur sur le moral de la population et dans le cheminement du pays vers la libéralisation après la chute du régime militaire». Cette fois, on cherche surtout à faire connaître la Corée comme destination de sports d'hiver et à accroître le tourisme dans la région de PyeongChang. N'empêche, «on ressent une fierté nationale certaine, car contrairement aux deux Jeux olympiques d'hiver précédents, les préparatifs vont bon train et les installations seront prêtes à temps. C'est un signe envoyé à la communauté internationale», dit Michelle Cho. Selon Pascale Marcotte, la Corée peut s'attendre à une hausse du nombre de visiteurs en 2019. «L'année des Jeux, il y a une baisse des visiteurs ‟réguliers" qui préfèrent laisser passer l'afflux d'athlètes et de dignitaires, mais ils viennent souvent plus nombreux, ensuite, profiter des nouvelles installations et infrastructures.» La Corée du Sud vient, par exemple, d'inaugurer une nouvelle liaison de train rapide qui permettra de relier en deux fois moins de temps (63 minutes plutôt que 2 h 30 min en bus) Séoul et PyeongChang, un projet estimé à lui seul à 4,5 milliards CAN et qui facilitera les déplacements vers la côte est du pays.

photo Kim Hong-Ji, archives reuters

Un reportage sur un lancer de missile nord-coréen est diffusé à Séoul, en Corée du Sud, le 29 novembre dernier.