Des voyageurs intrépides nous racontent leurs histoires. Elles sont parfois rocambolesques et même difficiles à croire. Parfois, aussi, leurs aventures ont surtout d'extraordinaire qu'elles les ont menées plus loin. Dans tous les sens du terme.

Qui?

Andréanne Clot, qui a enseigné l'anglais en Chine durant un an

Quoi?

Petite excursion de détente en montagne...

Où?

En Chine, dans la province du Shaanxi

Lorsque les gens se déplacent vers la province du Shaanxi en Chine, c'est généralement pour visiter Xi'an et son armée de guerriers de terre cuite. Cependant, pour les voyageurs à la recherche de sensations fortes, à seulement 120 kilomètres de la ville se trouve le mont Huashan, longtemps reconnu comme la randonnée la plus dangereuse du monde. Ces sentiers creusés à même le roc et séparés du gouffre par de minces chaînes laissent le grimpeur à la merci des éléments pour atteindre une altitude de 2154 m au plus haut sommet. Été comme hiver, des centaines de touristes téméraires affrontent les chemins traîtres de cette montagne, espérant ne pas faire partie des statistiques et pouvoir dire qu'ils ont touché la mort du bout des doigts.

Après tout de même un peu de recherche sur les risques possibles de cette aventure, je décide de tenter ma chance. Comme je l'ai souvent remarqué dans les endroits touristiques chinois, n'importe qui affronte véritablement n'importe quel défi, habillé n'importe comment! C'est donc sans grande surprise qu'à l'entrée du téléphérique pour accéder à la montagne, je remarque plusieurs femmes en talons hauts et en minijupes.

Normalement, l'ascension peut se faire à pied, mais, par manque de temps, nous prenons le téléphérique jusqu'au sommet Nord, le point le plus bas de la montagne. Dès que nous posons les pieds au sommet, je comprends que toutes mes inquiétudes sont fondées. Pressé contre la chaîne par la foule de touristes excités, je m'approche dangereusement du gouffre. Devant nous, un précipice de plusieurs centaines de mètres, des parois de roc acéré et un vent puissant siffle dans un vacarme.

Dès que nous empruntons le trajet vers le sommet Ouest, la foule devient plus compacte. Régulièrement, nous devons nous coller contre la paroi pour laisser les marcheurs venant à sens inverse passer, gardant toujours en tête qu'à la fin de la journée, nous allons devoir faire le même manège. Après une heure d'ascension, nous sommes pratiquement au sommet lorsque le terrain change et que nous devons maintenant grimper des marches creusées à même la montagne. Notre seul point d'ancrage est une chaîne, séparant deux pentes abruptes vers le vide. Alors que je suis rendue au milieu de la passerelle, une bourrasque me force à tomber à genoux afin d'éviter une chute fatale. Je reprends tranquillement pied, consciente qu'il en aurait fallu de peu.

Ce qui distingue réellement Huashan des autres montagnes impressionnantes de la Chine est sa «passerelle» en bois qui longe le roc à quelques mètres sous le sommet Sud. Pour quelques yuans de plus, les randonneurs téméraires sont équipés d'un harnais de torse pour s'aventurer dans un des parcours aériens les plus risqués de la planète. Dès le départ, le touriste affronte une échelle verticale métallique où sa dextérité est mise à rude épreuve. Arrivé en bas, il peut se reposer sur une formation rocheuse naturelle avant de devoir grimper dans une série d'étriers creusés à même la montagne. À ce point, tout ce qui empêche le marcheur de glisser vers sa mort est une vieille chaîne rouillée, son équilibre et l'équipement «Made in China». Finalement, le touriste épuisé pose les pieds sur la fameuse planche, large d'une trentaine de centimètres, où un travailleur de la montagne offre de prendre une photo souvenir. Certains visiteurs vont même jusqu'à se pencher vers le vide, se laissant suspendre par leur équipement. J'ai décidé que tendre le bras serait un compromis acceptable...

Après avoir visité les cinq sommets et marché pendant plus de six heures, je crois que Huashan est une incroyable randonnée permettant aux grimpeurs téméraires de tester véritablement ce dont ils sont faits. Pour moi c'est 50% de forme physique, 30% de courage et 20% de pure folie!