Plus de 300 km de sentiers ceinturent le massif des Annapurnas, au Népal. Longue randonnée favorite du pays, elle offre une mosaïque complète de paysages himalayens et de cultures. Prêt pour un petit tour à l'ombre du 10e plus haut sommet du monde?

Les paysages donnent envie de courir. Pour s'envelopper de la moiteur subtropicale des rizières et s'éclipser dans la forêt de pins. Pour ne rien manquer à l'approche du col enneigé, le Thorong La juché à 5416 m, non loin de hauts plateaux désertiques tibétains, avant de caresser les fleurs de rhododendrons et de jeter son corps usé dans des sources chaudes.

La chaîne des Himalayas provoque cet amalgame climatique: la barrière montagneuse bloque la mousson. Les lourds nuages s'écrasent sur le versant sud, assurant à la végétation de quoi s'abreuver, tandis que la sécheresse sévit au nord. Les sentiers contournent un massif long de 55 km où a grandi la famille des Annapurnas: l'Annapurna I, au 10e rang des sommets du monde à 8091 m, et ses frères II, III et IV et Sud. De 15 à 20 jours suffisent pour en faire le tour, mais plusieurs randonneurs restent plus longtemps et ajoutent des détours jusqu'à des camps de base.

Ici, le maïs est cultivé en terrasses. Un troupeau de yaks broute. Là, une femme moissonne l'orge à la faucille pendant que le vent porte les prières des loungtas, ces drapeaux tibétains colorés. À petite distance, un verger regorge de pommiers et d'abricotiers. Ailleurs, des pèlerins hindous et bouddhistes traversent les steppes asiatiques pour se rendre au temple sacré de Muktinath. Et sur cet ancien couloir de traite avec le Tibet, des gens tournent machinalement les moulins à prières pour y diffuser le mantra inscrit à l'intérieur.

C'est bien là l'un des attraits du tour des Annapurnas: il grouille de vie. Rarement plus de quatre heures de marche séparent les villages où vivent une dizaine de groupes ethniques. On croise aussi souvent des Népalais qui, sangle au front, transportent de tout dans une hotte de bambou. Ou des écoliers qui dévalent les pentes et sollicitent les randonneurs avec leur maigre vocabulaire anglais: «water, pen, sweets, money».

Une transformation continue

Depuis que les touristes ont eu accès à la région en 1977, des auberges ont été construites. Plus de 50 000 visiteurs par année trouvent ainsi facilement un toit et de la nourriture. Que ce soit pour un dal bhat (riz et lentilles) aux pousses de bambou ou des hamburgers de yak servis chez... Yac Donald's.

Mais le tourisme laisse des traces dans ce pays parmi les plus pauvres du monde. Et pour minimiser la pollution et la dégradation environnementale, un projet de conservation de la région, l'ACAP, a été créé en 1986. L'aire s'étend sur 7629 km2, où vivent 40 000 personnes. Les touristes doivent payer environ 30$ pour y entrer.

L'argent est réinvesti localement: conservation des ressources, gestion touristique, éducation environnementale, etc. Diverses ONG subventionnent aussi des projets régionaux. Les habitants vendent ainsi de l'eau ozonisée pour limiter les bouteilles de plastique, bannies par endroit. Certains cuisinent ou chauffent l'eau à l'énergie solaire pour contrer la déforestation. Mais d'autres clôturent leur jardin avec des bouteilles de bière, des rebuts parmi d'autres.

Une route cahoteuse transforme le tour des Annapurnas. Presque toute la section ouest au col Thorong La peut être parcourue en 4x4 et une route grignote la montagne à l'est. Certains habitants y voient un synonyme de développement alors que des propriétaires d'auberges craignent pour leur gagne-pain.

Si les paysages donnent envie de courir, les gens, eux, donnent envie de s'arrêter. Pour partager le quotidien de ces hôtes, pour se réfugier dans un monastère ou se mêler à une classe d'écoliers, avant de jeter son corps sur un lit, la tête dans les nuages.



REPÈRES

Quand y aller? Pour une vue imprenable sur les sommets et un accès sécuritaire au Thorong La, préférez la haute saison de mars et avril ou octobre et novembre. Pour une expérience différente et éviter les touristes, osez la mousson entre mai et octobre!

Comment s'y rendre? Le tour des Annapurnas est près de Pokhara, la 3e ville en importance au Népal. Il est possible de se rendre en autocar ou jeep à plusieurs points de départ. Il y a aussi un petit aéroport dans la section ouest du tour des Annapurnas, à Jomsom.

Seul ou en groupe? Plusieurs visitent la région avec guide et porteurs. D'autres y vont en groupe. Si vous y allez seul, soyez prudent. Il est généralement facile de s'orienter. Dans tous les cas, ne négligez pas la haute altitude. Les Annapurnas sont impitoyables et il y a aussi des zones d'avalanche ou de glissement de terrains.

Pays sûr? La récente stabilité politique favorise le retour des touristes au Népal. Ils avaient fui le pays durant l'insurrection maoïste. Informez-vous néanmoins de la situation politique du pays avant de partir.

Carte de la région des Annapurnas