Hanoï envisage de s'attaquer à l'une des distractions les plus populaires du Vietnam: le karaoké, d'où il entend chasser les «maux sociaux» en interdisant aux clients de danser pour limiter la consommation de drogue et les risques de prostitution.

Le ministère de la Culture, des Sports et du Tourisme du pays communiste a mis un projet de décret amendé sur la table, dont l'AFP a obtenu une copie et dont la presse locale se fait l'écho mercredi.A l'article 36, le texte «interdit sévèrement les actes de danse, de pornographie, de prostitution, de trafic et d'usage de drogue dans les salles de karaoké».

«L'interdiction vise à éviter les maux sociaux», explique Le Anh Tuyen, chef du département juridique du ministère, cité par le quotidien Thanh Nien. «Les bars-karaokés sont faits pour chanter, pas danser. L'interdiction de danser dans les bars-karaokés est destinée à limiter la consommation d'ecstasy».

S'il est définitivement approuvé, le texte pourrait bannir toute forme de danse à partir de septembre, sans toutefois prévoir d'amende pour les clients qui bougeraient au rythme de la musique sans se livrer à des agissements illicites comme la consommation de drogue ou la prostitution, poursuit M. Tuyen.

Soucieux de retenir les touristes et pour compenser la mesure en ce temps de difficultés économiques, le gouvernement pourrait parallèlement autoriser les discothèques des hôtels quatre et cinq étoiles à rester ouvertes plus tard la nuit, jusqu'à 2 heures du matin contre minuit actuellement.

Une extension que les autorités «n'encouragent» malgré tout pas, «car il y a jusqu'à 121 hôtels quatre étoiles au Vietnam» et de «grosses difficultés de gestion se poseront», a expliqué le même responsable à l'AFP.

Le couvre-feu de minuit devrait quoi qu'il arrive être maintenu dans les hôtels trois étoiles, par manque de capacités d'inspection, selon M. Tuyen.

Le gouvernement a ouvert sa proposition de décret aux commentaires des Vietnamiens. Et dans les médias d'un pays où le karaoké constitue l'une des principales distractions du week-end, les réactions ne se sont pas fait attendre.

«Qui peut contrôler, qui peut donner une définition de ce que c'est que danser?», s'interroge un lecteur sceptique, Nhu Dan, dans les lignes du quotidien en ligne VNExpress. «Ce sera ennuyeux d'entrer dans un karaoké, de s'assoir à une place et de chanter», renchérit un deuxième, Thu Hong.

Le gouvernement vietnamien n'en est pas à sa première attaque contre les karaokés. Le texte que les autorités proposent d'amender en encadre déjà strictement les modalités d'exploitation.

Il y interdit la vente d'alcool, y impose des salles aux vitres transparentes -- des mesures dans les faits peu respectées. Il interdit aussi leur emplacement à moins de 200 mètres d'écoles, de lieux de culte, d'hôpitaux, d'administrations ou de sites culturels et historiques.