Sur la large rivière aux eaux brunâtres, une grosse «pitoune» de 4 m entraînée par le courant passe sous nos yeux et se met à... onduler. Une longue queue dentelée ne laisse aucun doute sur son origine. Une fois repéré, le crocodile disparaît soudainement sous l'eau.

Pourtant, à cette heure-ci, les cocodrilos du Rio Tempisque, au Costa Rica, sont habituellement discrets. C'est que, sur son cours inférieur d'une trentaine de kilomètres (la seule partie navigable), le Tempisque change de physionomie au gré des marées du Pacifique. Le niveau de la rivière fluctue de 2 à 4 m au cours de la journée, ce qui modifie le paysage et le comportement de la faune. À marée basse, le Tempisque devient l'attrait incontesté du parc Palo Verde, du nom d'un arbre qui prolifère dans la région. Les rives boueuses sont alors dénudées et, pour la plus grande joie des visiteurs, de nombreux crocos se dorent au soleil.

Situé entre la ville de Canas et la côte du Pacifique, ce parc regroupe la plus grande diversité et concentration d'oiseaux au Costa Rica, en plus d'une faune et d'une flore extrêmement variées. D'une superficie de 19 000 hectares, on y découvre une quinzaine d'écosystèmes différents.

D'ailleurs, pour vous rendre à l'entrée principale du parc à partir de Liberia et de la ville voisine de Bagaces, vous emprunterez une route cahoteuse de 28 km qui traverse d'immenses rizières ou des champs de canne à sucre, de la verdure à perte de vue. Quelques kilomètres après le poste d'accueil, vous apercevrez la vaste lagune, point de ralliement de dizaines de milliers d'oiseaux quand l'eau devient rare partout ailleurs. En vous promenant sur une longue plateforme, vous pourrez admirer d'innombrables canards aux longues pattes appelés dendrocygnes, de délicats jacanas sautillant sur les nénuphars ou encore de nombreux échassiers comme l'ibis blanc, l'impressionnant jibaru ou la spectaculaire spatule rosée, toute de rose vêtue et dotée d'un long bec en forme de... spatule.

Des monstres de 400 kg

Mais bon nombre de touristes visitent Palo Verde d'abord pour observer les crocos. Ils accèdent au Tempisque surtout à partir des villages touristiques de la côte comme Tamarindo, Playa Flamingo, Playa Coco et plusieurs autres, tous situés à environ une heure de route de la ville de Liberia, desservie, par vol direct, par trois compagnies aériennes au départ de Montréal.

Une des nombreuses excursions proposées vous fera vite réaliser qu'il vaut mieux ne pas se baigner ici. Les crocodiles sont nombreux, souvent très gros, parfois autour de 300 ou 400 kg. En apparence inertes, ils restent néanmoins extrêmement alertes. Au printemps dernier, des capitaines de bateaux d'excursion les attiraient avec des cuisses de poulet pour qu'ils s'élancent hors de l'eau près des embarcations. La scène est spectaculaire. Frissons garantis. Il est interdit de nourrir les crocos (et autres animaux), mais la pratique semble courante. Elle suscite cependant des inquiétudes chez les autorités et les hôteliers: les grands sauriens deviennent de plus en plus familiers et s'aventurent parfois dans les lagunes d'eau salée, près des plages.

En plus des cocodrilos et d'une faune ailée variée, les excursions d'une durée d'environ deux heures vous permettront de voir quelques gros iguanes, d'étranges chauves-souris minuscules bien endormies sur leur tronc d'arbre et, qui sait, peut-être un boa constricteur. Les singes capucins demeurent toutefois l'attraction préférée des grands et des petits. L'excursion se termine généralement par un repas dans un petit resto familial, inclus dans le forfait habituellement très abordable.

Plusieurs excursions ont comme point de ralliement le village de Bolson, à une heure de la route de la côte, mais on peut aussi faire une courte visite à partir du pont de l'Amistad, qui traverse le Rio Tempisque (Route 18) près de son embouchure. Pour découvrir l'île aux oiseaux (isla de Pajaros), un important lieu de nidification, vous devez vous rendre à partir de Puerto Humo, à une trentaine de kilomètres de Nicoya.