Alba Diaz gère un hôtel d'un genre particulier à Cali. Sa spécialité: recevoir des touristes étrangers venus pour une opération de chirurgie esthétique dans la troisième ville de Colombie, devenue une Mecque du bistouri.

Dans un quartier aisé, cette femme de 55 ans est un véritable ange gardien pour les patients qu'elle suit, depuis leur arrivée à l'aéroport jusqu'à la clinique, veillant sur eux durant leur convalescence, ponctuée de diètes et massages particuliers. À ses côtés, une infirmière bilingue en anglais.

«Le plus important, c'est l'amour, l'affection. On est là pour en donner un peu à la personne qui en a besoin, alors qu'elle a laissé sa famille, son mari, ses enfants, qui souffrent aussi pour elle, à l'autre bout du monde», raconte-t-elle à l'AFP, confiant que de nombreux patients se sentent déprimés après l'opération.

Sa vocation a démarré d'une manière personnelle. Sa propre fille, résidente aux États-Unis, était rentrée au pays pour une plastie abdominale, une opération de réparation esthétique du ventre, avec liposuccion. Comblée par les petits soins de sa mère, elle lui propose alors l'idée de fonder cet hôtel.

Actuellement, l'établissement compte une dizaine de chambres, dont les prix varient entre 55 et 68 dollars par jour.

L'affaire fonctionne d'autant mieux que la Colombie est réputée pour sa tradition de la chirurgie plastique, se classant au troisième rang d'Amérique latine derrière le Brésil et le Mexique, et au 11e rang mondial.

Chaque année, quelque 211 879 opérations de ce type y sont effectuées, soit 3,3% du total dans le monde, selon les chiffres de l'ISAPS, la Société internationale de chirurgie esthétique.

Client de l'hôtel, un infirmier espagnol de 39 ans, qui préfère garder l'anonymat, a lui aussi fait le déplacement pour une plastie abdominale, conseillée par une amie colombienne qui lui a recommandé la ville de Cali. Avant même le prix avantageux, «c'est la qualité qui compte», souligne-t-il.

Innovation technologique

Pour Miriam Alvarado, une femme de 53 ans originaire de Porto Rico, la décision de se faire opérer en Colombie lui est venue naturellement après que sa soeur et sa belle-soeur eurent tenté l'expérience.

En deux semaines, tout était réglé: le voyage et l'opération prévue, une intervention au menton et une liposuccion. Et cette fois, l'argument économique a joué à plein: dans son pays, elle aurait dû débourser 14 000 dollars. À Cali, la facture n'excédera pas les 4000 dollars.

En outre, les conditions médicales lui semblent meilleures en Colombie. «À Porto Rico, il y a des chirurgiens de toute sorte, mais le traitement postopératoire n'est pas aussi avancé qu'ici», estime-t-elle.

Autre patient convaincu des bienfaits locaux, Peter McCabe, un homme d'affaires américain résident en Colombie, qui s'est offert à Cali un «rafraîchissement facial», contre l'avis de ses proches. «Ma famille me disait que si je devais le faire, qu'au moins je le fasse à la maison», sourit-il.

Mais après avoir vu son visage rajeuni sur Skype, beaucoup ont changé d'avis et certains projettent même de venir en Colombie pour une opération.

Toutefois, les risques ne sont pas nuls.

Entre 3 et 5% des patients opérés ne sont pas satisfaits du résultat, un pourcentage qui monte à 12% pour les opérations du nez, confesse Lina Triana, chirurgienne à Cali et secrétaire de l'ISAPS, rappelant que de nombreux praticiens non qualifiés proposent leurs services.

Mais, selon elle, les bons chirurgiens colombiens n'ont pas de leçon à recevoir. Au contraire: «Maintenant ce sont nos collègues d'Europe et des États-Unis qui doivent apprendre chez nous comment sculpter de beaux corps».

L'innovation technologique est l'un des arguments de poids des praticiens colombiens, qui organisent chaque année à Cali un salon spécial pour exposer leurs exploits.

C'est ainsi le cas du docteur Alfonso Riascos qui a présenté une technique spéciale pour réaliser un «rajeunissement facial» sans laisser de cicatrice près de l'oreille, comme c'est souvent le cas.

«J'ai débuté il y a plus ou moins cinq ans avec des patients sélectionnés et aujourd'hui j'en suis à 400», explique fièrement ce chirurgien, dont un tiers de la clientèle est étrangère. Sa marque de fabrique: une discrète cicatrice de cinq centimètres sur le cuir chevelu.

Pour Alba, la tenancière de l'hôtel, les bonnes affaires ne vont pas s'arrêter de sitôt. «Nous avons eu des groupes familiaux, avec le papa, la maman, les trois enfants. Et en plus une des filles a amené son époux. Ils adorent être accompagnés», se réjouit-elle.