Il faut fouiller très fort dans les guides touristiques sur l'Argentine pour trouver la moindre mention de Mataderos, un petit village devenu, avec l'expansion urbaine vers l'ouest, un simple quartier de Buenos Aires. Et pourtant...

Dans ce quartier ouvrier, tous les dimanches la foire bat son plein. En habits gaucho, au beau milieu de la rue transformée en marché à ciel ouvert et en piste de danse, des couples jouent du mouchoir dans une danse traditionnelle de la culture paysanne argentine. D'autres, vêtus en simples vêtements «civils» se joignent à eux. Rien de professionnel nulle part, mais beaucoup de spontanéité partout. Que des amateurs qui partagent la même passion. Quel que soit la danse ou le chant, le folklore gaucho est à l'honneur. On est en plein coeur de la culture argentine, mais on est bien, bien loin du tango plus chic, plus léché... et beaucoup plus urbain. Le gaucho, rappelons-le, est aux Argentins ce que le cowboy est aux Texans.

Tout autour, dans toutes les rues du quartier, des centaines de kiosques célèbrent la culture gaucha et ses souverains indiscutés, le cheval et son cavalier. On y vend aussi de l'artisanat plus général. Pour une bouchée de pain, vous pouvez notamment y trouver une ceinture de cuir qu'on ajustera sur place et à laquelle on ajoutera la boucle que vous aurez choisie dans un assortiment sans fin. Une immense statue d'un cavalier sur sa monture ressort de la mer de toiles qui délimitent les kiosques.

Au tournant du XXe siècle, c'est ici qu'on a installé l'abattoir principal qui fournissait la viande à la grande ville. Depuis, les gauchos ont disparu du paysage, mais l'engouement pour leur mode de vie et pour leur aura mythique, elle, est bien vivante. On y a même consacré un petit musée local.

Festin carnivore

D'immenses steaks, saucisses et viandes de toutes sortes cuisent sur de gigantesques grils. On est en Argentine, patrie du carnivore, ne l'oublions pas. Ailleurs, des kiosques offrent des pâtisseries et des sucreries, d'autres des glaces, de la bouffe typique (empanadas et autres) de la bière, des vêtements, des ponchos plus ou moins traditionnels, des peintures ou des instruments de musique. Ici et là, on a improvisé des terrasses de restos.

Plus tard dans la journée, à l'extrémité de la rue principale, les chevaux font leur entrée et les spectateurs peuvent assister à la démonstration des habiletés des gauchos qui doivent d'abord et avant tout être des cavaliers émérites. Et être capable de le prouver.

Loin des excursions qu'on vous proposera à Buenos Aires et qui offrent des spectacles professionnels et bien encadrés, la Feria gaucha de Mataderos est d'abord et avant tout une fête du peuple qui porte encore dans son coeur cette petite fibre gaucha qu'on se permet encore de laisser vibrer. Une fois par semaine à tout le moins.