Révoltes et crises politiques en Égypte et en Tunisie, guerre en Libye, répression en Syrie, insécurité en Algérie: le tourisme dans le monde arabe fait grise mine, sauf au Maroc, qui tire sans trop de mal son épingle du jeu malgré un attentat à Marrakech en avril.

«Le printemps arabe, l'attentat de Marrakech, la conjoncture économique, le ramadan en plein mois d'août. Tout cela a joué et nous a affectés», reconnaît le ministre marocain du tourisme Yassir Znagui.

«Nous ne sommes pas dans l'euphorie, mais la forte progression de notre tourisme - 10% en moyenne au cours des 10 dernières années - nous a permis de résister au ralentissement de l'activité cette année», a-t-il évoqué dans un entretien à l'AFP.

«En dix ans, a-t-il précisé, nous avons plus que doublé le nombre d'arrivées de touristes, avec 9,3 millions d'entrées en 2010 (ndlr: y compris les Marocains résidant à l'étranger qui représentent 40% du total)».

S'il est resté à l'abri des grandes révoltes arabes, grâce à des réformes voulues par le roi Mohamed VI sur fond d'instabilité régionale, sans faire taire les revendications sociales, le Maroc ne connaîtra cependant pas cette année une progression à deux chiffres de son tourisme.

Selon les chiffres officiels, 4,2 millions de touristes ont visité le Maroc au premier semestre de l'année, soit une progression de 6,3% par rapport à l'an dernier (contre une progression d'environ 11% en 2010).

«Nous ciblons un deuxième semestre correct, et je serais content d'une progression de 5% du nombre de touristes sur l'année», affirme le jeune ministre qui vient du monde de la finance internationale.

En 2010, rappelle fièrement M. Znagui, «le Maroc était numéro 5 sur le Top ten mondial de Lonely planet», avec une progression très forte de touristes venant notamment de Russie (+85%) ou de Pologne (100%) ainsi que d'autres pays du nord.

Seul point noir: les nuitées totales ont baissé de 2% au premier semestre par rapport à l'an dernier (-5% à Marrakech, -15% à Fès), surtout de la part des Français, avec un taux d'occupation en baisse également de deux points à 41%, selon les chiffres officiels.

De fait, la période du ramadan en particulier semble avoir été «calamiteuse» pour les hôteliers, selon le quotidien L'Économiste qui cite des patrons de l'industrie hôtelière en colère.

Mais globalement, le score du Maroc reste plus qu'honorable comparé aux autres pays du sud de la Méditerranée au premier semestre: en Tunisie, le nombre de touristes a baissé de plus d'un tiers (-38,9%), atteignant 2,77 millions, et en Égypte de -60%.

L'Algérie reste une destination difficile en raison de l'absence d'infrastructures hôtelières, et de la situation sécuritaire au Sahara où sévit Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) et où des Occidentaux ont été enlevés.

À l'est de la Méditerranée, la Syrie vit une des pires périodes de son histoire récente. Le tourisme est en berne après avoir fortement progressé ces dernières années.

Le tourisme constitue un des principaux employeurs et une source de devises dans ces pays (près de 7% du PIB tunisien, 11,5% du PIB égyptien, et 10% du PIB marocain).

Là aussi le Maroc s'en tire bien cette année: ses recettes touristiques ont progressé de 8,5% sur la période janvier-juillet, à 33 milliards de dirhams (3 mds d'euros) par rapport à l'an dernier.

Pour l'avenir, le ministre du tourisme table sur «un doublement de la taille du secteur en nombre d'arrivées, et un triplement des recettes, positionnant le pays parmi les 20 meilleures destinations» du monde alors qu'il est actuellement au 26e rang, selon l'Organisation mondiale du tourisme (OMT).

À cette fin, un Fonds marocain de développement touristique (FMDT) a été mis en place cette année, avec un programme d'investissements de l'État, en partenariat avec des Fonds étrangers - arabes et asiatiques - d'un montant de 1,5 md de dh (136 millions d'euros), devant être porté à 10 mds de dh (909 M d'euros) à l'horizon 2020.