Au début des années 60, les habitants de Rivière-à-Pierre, dans la région de Portneuf, ne pouvaient ni chasser ni pêcher sur leur territoire, car chaque pouce de terrain était réservé à l'usage exclusif des membres des clubs privés de chasse et pêche. Une injustice, qui a été réparée par la première vague de «déclubage» de l'histoire du Québec. C'est ainsi qu'on a créé la réserve faunique de Portneuf, qui fête maintenant son 40e anniversaire.

Député de la région de 1966 à 1970, Marcel R. Plamondon rappelle le contexte de l'époque. «Les gens de Rivière-à-Pierre venaient à mon bureau pour se plaindre, me disant: ça n'a pas de bon sens. On est entouré de barrières!», raconte cet ancien député de l'Union nationale, lors d'une conversation téléphonique.

Mais pour abolir les clubs privés, il fallait du courage politique. Leurs membres étaient essentiellement des gens riches et influents. «Il ne faut pas s'en cacher. Ce sont ces gens-là qui contribuaient aux caisses électorales. Il n'était donc pas évident de leur enlever ce privilège», se rappelle M. Plamondon. Mais le ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, Gabriel Loubier, fonce quand même, avec l'appui du premier ministre, Daniel Johnson.

À Portneuf, l'époque des clubs privés a laissé sa marque. Quarante ans plus tard, parmi les 45 chalets que compte la réserve faunique de Portneuf, sous la gestion de la SÉPAQ depuis 1995, une quarantaine ont été construits par les clubs privés. «Certains sont de véritables châteaux en bois rond, comme le chalet Castor, situé face au lac Lapeyrère», affirme Michel Coulombe, directeur de cette réserve faunique.

L'autre relique de l'époque des clubs privés, c'est l'absence de regroupement de chalets. L'équation est simple: un lac, un chalet. «C'était la norme à l'époque. Et les chalets occupent toujours l'emplacement où l'on profite de la meilleure vue sur l'eau», dit M. Coulombe. Résultat: les visiteurs d'aujourd'hui profitent d'une tranquillité totale et d'une vue splendide.

À l'origine, la réserve faunique de Portneuf couvrait un territoire de 300 km carrés, superficie qui a plus que doublé aujourd'hui pour atteindre 775 km2. Ce territoire public demeure néanmoins la troisième plus petite réserve faunique du Québec sur 15, après Port-Daniel, en Gaspésie, et Rimouski. «Mais elle est celle qui reçoit le plus grand nombre de visiteurs en fonction de sa grandeur», dit M. Coulombe. Ici, on profite de la proximité de la ville de Québec, qui se trouve à une heure trente en voiture.

Comme dans toutes les réserves fauniques, les activités les plus populaires sont la chasse au petit gibier et la pêche. Le poisson-vedette demeure la truite mouchetée, mais la truite moulac, un hybride de truite grise et de truite mouchetée, est en plein essor. Sa particularité: elle résiste mieux à l'eau chaude, vit plus longtemps (ce qui permet de capturer de plus belles prises) et se nourrit de poissons-appâts. «À mon avis, la truite moulac possède la meilleure chair parmi tous les salmonidés», soutient M. Coulombe. Quinze lacs abritent cette espèce à découvrir.

La clientèle vient également pour relaxer, s'adonner au canot-camping dans les deux circuits offerts et faire de l'escalade sur une paroi rocheuse située à l'est du territoire. En hiver, Portneuf se transforme en paradis des sports hivernaux. À cette période, les Montréalais constituent 30 % des visiteurs, contre un mince pourcentage en été. Plus de 50 km de sentiers, balisés et entretenus mécaniquement, font la joie des skieurs.

Depuis son ouverture, la réserve faunique de Portneuf a accueilli plus de trois millions de visiteurs.